La diversité, une barrière au recrutement pour le NPD?

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, s'est adressé aux médias en compagnie de militants néodémocrates, lundi à Toronto.
Photo: Christopher Katsarov La Presse canadienne Le chef du NPD, Jagmeet Singh, s'est adressé aux médias en compagnie de militants néodémocrates, lundi à Toronto.

À une semaine du déclenchement possible de la campagne électorale, le Nouveau Parti démocratique n’a toujours que la moitié de ses candidats en lice. Et de l’aveu même du parti, c’est à cause des objectifs stricts qu’il s’est fixés pour recruter des candidats issus de la diversité qu’il n’arrive pas à suivre la cadence.

Tout indique que Justin Trudeau déclenchera la campagne fédérale dimanche prochain ou le suivant. Or, le Nouveau Parti démocratique ne compte à ce jour que 180 candidats sur les 338 circonscriptions au pays (29 au Québec, sur un total de 78 circonscriptions). À titre comparatif, le Parti conservateur a été le premier à confirmer ses 338 candidats mardi, tandis que le Parti libéral en compte 265 pour l’instant (61 au Québec), le Parti vert, 274 (63 au Québec) et le Bloc québécois, 52.

Les néodémocrates citent leur « processus démocratique » d’investiture pour expliquer leur retard. Celui-ci indique notamment que chaque association de circonscription du NPD a maintenant l’obligation — plutôt que l’objectif — d’offrir au moins un candidat à l’investiture qui soit une femme, issu de la communauté LGBT ou encore d’une minorité culturelle. Si une association de circonscription en est incapable, elle doit prouver au NPD qu’elle a fait des « efforts sérieux » pour essayer d’en recruter — en précisant les personnes contactées et les démarches entreprises.

« On a fixé des objectifs plus élevés à nos standards, en matière de diversité de candidats », explique le porte-parole du parti Guillaume Francoeur.

Le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, reconnaît que ce nouveau critère ralentit le processus de recrutement, mais il le défend. « Comme parti de gauche et parti progressiste, on sait que si on ne fait pas d’efforts, on va se retrouver avec un paquet de gars blancs de 45 ans. Or la recherche de candidats provenant des minorités et de femmes demande beaucoup plus de temps. » M. Boulerice reconnaît en outre que le NPD n’a pas embauché suffisamment d’employés en amont, le printemps dernier, afin de prévoir le temps nécessaire pour éplucher les dossiers de candidature. Le chef adjoint assure que le parti a corrigé le tir et que « les choses vont vraiment s’accélérer ».

Deux désistements

 

Ces retards dans l’approbation de candidatures ont cependant mené au moins deux aspirants candidats néodémocrates à tirer leur révérence. Le leader syndicaliste Sid Ryan a renoncé à briguer l’investiture du NPD à Oshawa, tandis que Janet-Lynne Durnford a fait de même dans Simcoe-Nord, également en Ontario.

Dans une publication Facebook, Mme Durnford déplore ne plus être en mesure, à seulement quelques semaines du vote, de mener une « campagne efficace » puisqu’à défaut d’être confirmée candidate néodémocrate, elle n’a toujours ni équipe de campagne, ni activités de financement, ni même de pancartes électorales.

Une critique réitérée par le président de l’association néodémocrate de Simcoe-Nord, Don Brundage. « On n’a personne à présenter aux électeurs », déplore-t-il en entrevue au Devoir. Et son association locale n’a pas l’intention de se charger de remédier à la situation. « Ça ne sert plus à rien de soumettre une candidature, parce que le processus d’approbation prendrait trop de temps. C’est sur leurs épaules, dit-il au sujet du NPD. Ils ont créé ce chaos ; c’est à eux de le régler. »

Sid Ryan dénonce lui aussi le fait que son dossier de candidature a mis beaucoup trop de temps à être épluché par le parti. « Je ne m’oppose pas au processus du NPD qui recherche une diversité, c’est positif. Mon reproche, c’est que tout le monde devrait être traité équitablement », fait valoir M. Ryan, qui estime que le parti a tenté de lui nuire personnellement en retardant l’approbation de sa candidature alors que la date de l’assemblée d’investiture approchait à grands pas.

Le désistement de M. Ryan et de Mme Durnford n’est pas passé inaperçu dans les rangs néodémocrates. « Je respecte la nécessité de s’assurer d’avoir des candidats solides et crédibles, mais c’est totalement inacceptable », a dénoncé l’ex-député et candidat Svend Robinson sur Twitter, en référence au traitement trop long des dossiers. Joint par Le Devoir mardi, il n’a pas voulu faire de plus amples commentaires.

Le NPD affiche un retard dans son recrutement partout au pays. Au Nouveau-Brunswick, il ne compte encore aucun candidat confirmé. D’ailleurs, mardi, 14 anciens candidats provinciaux du NPD ont claqué la porte du parti pour donner leur appui au Parti vert, justifiant leur geste notamment par cette absence de candidats au scrutin fédéral du mois prochain.

Avec Hélène Buzzetti

Singh se présente aux Québécois

Le NPD prend acte du fait que son chef est méconnu au Québec. Il a entamé une campagne de publicité destinée spécifiquement à la province, dans laquelle il aborde de front la différence de Jagmeet Singh. « Je ne suis pas comme les autres », l’entend-on dire alors qu’on le voit dépouillé de son habituel turban, sa volumineuse chevelure et pilosité faciale bien en évidence. « Comme vous, mon identité, c’est ma fierté. » M. Singh affirme que, n’ayant pas reçu « d’héritage » (une référence au chef libéral Justin Trudeau), il a « assez connu les injustices pour savoir [s]e battre ». « Et maintenant, je suis prêt à me battre pour vous », dit-il, alors qu’on le voit en train de boxer. Le slogan du parti sera d’ailleurs « On se bat pour vous ». Le NPD était la dernière des cinq formations fédérales à dévoiler son slogan électoral. Le Parti conservateur a opté pour « Plus. Pour vous. Dès maintenant ». Le Bloc québécois mise sur « Le Québec, c’est nous », le Parti libéral propose « Choisir d’avancer », tandis que le Parti vert martèlera le slogan « Ni à droite ni à gauche. Vers l’avant ensemble ». En anglais, les slogans libéral et vert proposent tous deux d’aller « forward ».

Hélène Buzzetti



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