Legault demande des explications

Carles Puigdemont, un député espagnol en exil en Belgique pour avoir participé à l’organisation du référendum sur l’indépendance de la Catalogne de 2017.
Photo: Carsten Rehder Agence France-Presse Carles Puigdemont, un député espagnol en exil en Belgique pour avoir participé à l’organisation du référendum sur l’indépendance de la Catalogne de 2017.

Le premier ministre du Québec, François Legault, dit rester « perplexe » devant la révocation de l’autorisation de voyage électronique (AVE) délivrée au leader indépendantiste catalan Carles Puigdemont.

Il a demandé mardi des explications au gouvernement fédéral sur l’interdiction d’entrée au Canada frappant le député espagnol en exil en Belgique. « Parce que, pour l’instant, ça ne semble pas défendable », a-t-il lancé lors d’une mêlée de presse.

En attente de plus amples explications de la part d’Ottawa, M. Legault et les autres élus de sa formation politique se sont abstenus d’« [exiger] la révision de cette décision le plus rapidement possible », comme le stipulait un projet de motion soumis par le député péquiste Joël Arseneau à l’Assemblée nationale mardi après-midi.

M. Arseneau demandait au Parlement québécois de « [reconnaître] la légitimité de l’action politique des élus catalans qui défendent le droit à l’autodétermination de leur peuple » et de « [réaffirmer] le “droit de circuler librement” stipulé par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, ratifiée par le Canada ». Les députés caquistes ont balayé du revers de la main son projet de motion. « Pas de consentement », a tonné le leader parlementaire adjoint du gouvernement, Sébastien Schneeberger.

M. Arseneau a dit trouver « déplorable » que le Canada et le Québec « ne souhaitent pas être à la hauteur des pays qui, en Europe, ont accueilli Carles Puigdemont ». « Tous ces pays ont reconnu que Carles Puigdemont n’avait commis aucun crime autre que celui de vouloir donner la parole à ses citoyens à travers un exercice démocratique reconnu à travers toutes les démocraties occidentales, c’est-à-dire le référendum. En quoi est-ce que le Canada ne peut pas se mesurer à ces autres pays démocratiques de l’Europe et accorder le même traitement à M. Puigdemont ? C’est absolument inacceptable et incompréhensible », a-t-il déclaré.

M. Puigdemont a été forcé à l’exil en Belgique après avoir participé à l’organisation du référendum sur l’indépendance de la Catalogne de 2017. Il devait visiter Québec et Montréal du 2 au 4 avril à l’invitation de la Société Saint-Jean-Baptiste (SSJB) de Montréal. Mais le 31 mars, il a été avisé que son AVE avait été révoquée par Ottawa sans justification.

Le président général de la SSJB, Maxime Laporte, exhorte le gouvernement Trudeau à permettre à M. Puigdemont de visiter le Canada. « Aucune loi ici n’interdit d’organiser des référendums. Les accusations purement politiques dont fait l’objet M. Puigdemont en Espagne ne sont en rien un motif valable pour lui refuser l’accès au territoire québécois. Prétendre le contraire revient à accréditer l’idée qu’organiser un référendum constituerait une infraction criminelle », a-t-il plaidé mardi.

Réactions de Trudeau

 

À Ottawa, le premier ministre Justin Trudeau a affirmé qu’il n’interviendra pas pour infirmer la décision des fonctionnaires. « On a un processus indépendant. On fait entièrement confiance à nos fonctionnaires. Il n’y a pas eu d’intervention politique et il n’y aura pas d’intervention politique non plus », a-t-il lancé.

Le président du Comité spécial pour l’unité canadienne, Keith Henderson, applaudissait à la décision du gouvernement fédéral de refuser l’accès au pays à M. Puigdemont, qu’il décrit comme un hors-la-loi. « Les constitutions et les lois fondamentales d’un pays signifient quelque chose — ou non. En Espagne, elles veulent dire quelque chose. Les types qui ne les respectent pas en paient le prix. Ils ne devraient pas non plus être invités ici et y être traités comme n’importe quel autre leader d’opinion. »

L’ancien chef du Parti égalité regrette que le Canada n’ait pas maté, il y a 25 ans, les figures de proue du mouvement indépendantiste québécois, dont Jacques Parizeau et Lucien Bouchard, comme l’Espagne a mis au pas les leaders indépendantistes catalans.



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