Ottawa n’a pas de plan pour éliminer les subventions aux énergies fossiles

Même s’il s’est engagé il y a près de 10 ans à éliminer les subventions aux énergies fossiles, le gouvernement fédéral n’a toujours pas mis en oeuvre de plan pour y parvenir, conclut le Vérificateur général du Canada. Le ministère des Finances a même refusé de lui fournir certains documents.
Dans son rapport du printemps 2017, le vérificateur général Michael Ferguson souligne ainsi qu’il n’a pas été en mesure d’« établir de façon concluante si le ministère des Finances avait contribué à la mise en oeuvre de l’engagement pris par le Canada en 2009 lors du sommet du G20 d’éliminer progressivement et de rationaliser » les subventions offertes année après année aux entreprises du secteur pétrolier et gazier.
« Nous avons conclu qu’Environnement et Changement climatique Canada avait défini un plan pour appuyer la mise en oeuvre de l’engagement du G20 pris par le Canada en 2009. Cependant, le ministère [des Finances] n’avait pas encore mis ce plan en oeuvre. »

Le problème, c’est que le ministère a refusé au vérificateur l’accès à plusieurs centaines de pages de documents exigés, sous prétexte que celles-ci étaient « confidentielles ».
« Je suis très préoccupé par le fait que le ministère des Finances ne nous ait pas donné toute l’information dont nous avions besoin », a d’ailleurs affirmé Michael Ferguson. « L’accès à l’information est fondamental à notre indépendance et au travail que nous effectuons », a-t-il ajouté.
Le ministre des Finances, Bill Morneau, s’est défendu en disant que le gouvernement avait signé un décret mardi matin pour changer les règles et permettre l’accès à une partie des documents. Un geste « sans précédent », selon lui.
« C’était très important pour nous de faire ce que nous pouvions faire avec les règles, et après nous avons décidé que c’était important de changer les règles, a-t-il expliqué. C’est exactement ce que nous avons fait, a-t-il poursuivi. Ce sera plus transparent, plus ouvert à l’avenir. » Il n’a toutefois pas expliqué pourquoi il n’avait pas signé plus tôt ce décret et ainsi permettre au vérificateur général de mener son évaluation.
Horizon 2025
Le vérificateur a par ailleurs constaté que le gouvernement fédéral n’a toujours pas défini « ce que signifie l’engagement du G20 de 2009 visant à éliminer progressivement et à rationaliser les subventions inefficaces aux combustibles fossiles en fonction des particularités du pays ».
Le gouvernement de Justin Trudeau a promis d’éliminer ces subventions — qui auraient atteint 3,3 milliards en 2015, selon une analyse d’Équiterre — « à moyen terme », soit possiblement d’ici 2025. Il a justifié ce délai en soulignant les difficultés vécues par l’industrie pétrolière et gazière, en raison de la faiblesse des prix sur les marchés.
Or, constate le vérificateur général, le gouvernement n’a toujours pas « défini de plan de mise en oeuvre assorti d’échéances pour éliminer progressivement et rationaliser d’ici à 2025 les mesures fiscales qui sont toujours en vigueur ».
Plan climatique
Le rapport souligne pourtant que le respect de cet engagement du Canada jouerait un rôle majeur dans le plan de lutte contre les changements climatiques que le gouvernement Trudeau s’est engagé à mettre en oeuvre dans la foulée de l’Accord de Paris sur le climat.
Une telle élimination permettrait, selon le vérificateur, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et « la consommation excessive de combustibles fossiles, en encourageant les investissements dans l’énergie propre ».
Selon un rapport publié en mars par l’Agence internationale de l’énergie, les États doivent rapidement mettre fin aux subventions aux énergies fossiles s’ils veulent limiter le réchauffement global.
Le Canada n’est pas le seul à soutenir ce secteur, puisque le FMI évaluait en 2015 que les subventions publiques mondiales consacrées au secteur des énergies fossiles dépassaient les 5300 milliards de dollars chaque année.