Des sommes bien inférieures aux voeux des provinces

Ottawa — Plusieurs ministres provinciaux ont dénoncé dimanche ce qu’ils perçoivent comme un ultimatum du gouvernement Trudeau au sujet des négociations sur les transferts fédéraux en santé.
Ils ont soutenu que la dernière offre du gouvernement fédéral est encore plus néfaste aux différents budgets provinciaux en matière de santé que les promesses électorales élaborées par les libéraux en 2015.
Les ministres provinciaux et territoriaux des Finances devaient exercer des pressions sur leur homologue fédéral Bill Morneau à l’occasion d’un souper de travail, dimanche soir. Les discussions se poursuivront lundi. Les ministres de la Santé se joindront aux négociations au cours d’une séance extraordinaire au cours de l’après-midi.
Dimanche soir, M. Morneau a dit espérer que les provinces aborderont les discussions avec un esprit ouvert.
Les différentes parties semblaient loin d’une entente, dimanche soir.
« Je peux parler pour tout le monde au pays : nous ne sommes pas satisfaits de la façon dont ces discussions sont menées », a déclaré le ministre québécois de la Santé, Gaétan Barrette au cours d’une entrevue réalisée dimanche.
« Il n’y a eu aucune négociation au cours de la dernière année, et voilà que Bill Morneau nous sert un ultimatum. C’est insultant et inapproprié. S’il ne présente pas une meilleure proposition à la table, [les discussions] ne se dérouleront pas très bien demain [lundi] », a-t-il ajouté.
M. Morneau a défendu l’offre fédérale en affirmant que le gouvernement souhaitait des résultats qui « feront une réelle différence pour les Canadiens ».
Offre fédérale
Les libéraux fédéraux ont indiqué précisément aux provinces et aux territoires quelles sommes additionnelles en transferts en santé ils recevront l’an prochain, et celles-ci sont bien inférieures à ce que souhaitaient les premiers ministres.Les chiffres dévoilés par le ministère des Finances, dimanche matin, ont montré que les libéraux tablaient sur une augmentation de trois pour cent du financement des soins de santé, à 37,15 milliards l’an prochain, par rapport à 36,1 milliards pour la période correspondante de l’année précédente.
M. Morneau avait été catégorique, vendredi, affirmant que les demandes des provinces quant aux hausses des transferts en santé « dépassaient tout ce que [le gouvernement fédéral] considérerait ». Le ministre fédéral a martelé qu’il n’accepterait pas que les augmentations annuelles des transferts dépassent 3 %, ou que la part des dépenses assumée par le gouvernement fédéral soit relevée à 25 % des budgets provinciaux en santé.
Ainsi, le taux de croissance du transfert en santé passerait de 6 à 3 %, comme prévu, ce qui réduirait de près de 1,1 milliard par année les paiements combinés d’Ottawa aux provinces par rapport à ce qu’elles comptaient obtenir. Les gouvernements des provinces affirment que cela laisserait de grands trous dans leur budget de soins de santé.
Mais, si on se fie aux déclarations de M. Barrette et du ministre des Finances de la Colombie-Britannique, Michael de Jong, Bill Morneau aurait proposé des augmentations fermes annuelles de 3,5 %. Un montant de 8 milliards sur 10 ans sera réservé pour des secteurs bien précis comme les soins de santé à domicile et la santé mentale. Le gouvernement fédéral aurait aussi l’intention de dépenser 1 milliard sur quatre ans dans les infrastructures reliées aux soins de santé à domicile.
Cette offre pourrait toutefois être moins avantageuse pour les provinces, a affirmé M. de Jong.
« Indécence »
M. Barrette a qualifié sur son compte Twitter d’« indécente » et d’« irresponsable » l’idée de M. Morneau de réduire la part du fédéral « de 23 % aujourd’hui à moins de 20 % sur 10 ans ».Certaines provinces soutiennent l’idée d’un financement fédéral sur dix ans qui verrait les transferts en santé augmenter de 5,2 % par année, tandis que d’autres voudraient voir le gouvernement fédéral faire croître graduellement sa part des budgets provinciaux de soins de santé à 25 %.
En tout, le gouvernement fédéral prévoit fournir aux provinces et aux territoires environ 72,8 milliards en paiements de transfert l’an prochain, incluant les paiements de péréquation aux provinces qui y auront droit.
Quatre provinces n’auront pas droit aux paiements de péréquation l’an prochain en vertu de la formule de calcul : Terre-Neuve-et-Labrador, Saskatchewan, Alberta et Colombie-Britannique. Les six provinces restantes recevront au total 18,25 milliards, le Québec obtenant la plus large part, à 11 milliards.
Le programme de péréquation inscrit dans la Constitution redistribue l’argent aux provinces les plus pauvres pour aider à financer les services publics.
Terre-Neuve-et-Labrador: 539 millions
Île-du-Prince-Édouard: 152 millions
Nouvelle-Écosse: 967 millions
Nouveau-Brunswick: 768 millions
Québec: 8,49 milliards
Ontario: 14,3 milliards
Manitoba: 1,35 milliard
Saskatchewan: 1,18 milliard
Alberta: 4,38 milliards
Colombie-Britannique: 4,86 milliards
Yukon: 38 millions
Territoires du Nord-Ouest: 45 millions
Nunavut: 38 millions
Total: 37,15 milliards
Transfert canadien en matière de programmes sociaux
Terre-Neuve-et-Labrador: 199 millions
Île-du-Prince-Édouard: 56 millions
Nouvelle-Écosse: 358 millions
Nouveau-Brunswick: 284 millions
Québec: 3,14 milliards
Ontario: 5,3 milliards
Manitoba: 502 millions
Saskatchewan: 438 millions
Alberta: 1,62 milliard
Colombie-Britannique: 1,8 milliard
Yukon: 14 millions
Territoires du Nord-Ouest: 17 millions
Nunavut: 14 millions
Total: 13,75 milliards
Financement total, incluant la péréquation et la formule de financement des territoires
Terre-Neuve-et-Labrador: 738 millions
Île-du-Prince-Édouard: 599 millions
Nouvelle-Écosse: 3,1 milliards
Nouveau-Brunswick: 2,8 milliards
Québec: 22,7 milliards
Ontario: 21,1 milliards
Manitoba: 3,68 milliards
Saskatchewan: 1,62 milliard
Alberta: 6 milliards
Colombie-Britannique: 6,67 milliards
Yukon: 972 millions
Territoires du Nord-Ouest: 1,3 milliard
Nunavut: 1,58 milliard
Total: 72,83 milliards