Des yézidis implorent le Canada d’en faire davantage pour eux

Maintenant que le gouvernement Trudeau a accueilli plus de 25 000 réfugiés syriens au Canada, il doit se doter de nouvelles cibles d’accueil pour venir en aide cette fois-ci à la minorité yézidie persécutée par le groupe armé État islamique (EI). Car le système actuel, chapeauté par l’ONU, est imparfait. Et si rien n’est fait, les yézidis seront exterminés d’ici peu, s’inquiètent des ressortissants de cette minorité religieuse du Moyen-Orient.
Les hommes assassinés, les femmes violées, les enfants envoyés dans des camps d’entraînement du groupe EI. Relatant toutes les horreurs dont leur communauté a été victime, des représentants yézidis ont déploré en comité parlementaire mardi d’être « oubliés » par la communauté internationale. Leurs récits étaient difficiles à écouter, les députés ayant eu droit à des exemples d’atrocités tous plus horribles les uns que les autres.
Nadia Murad Basee Taha, kidnappée et détenue prisonnière par le groupe EI pendant trois mois, a raconté un massacre qui a eu lieu dans son village du nord de l’Irak. Plus de 700 hommes y ont été tués en deux heures. « Nous avons vu nos pères, nos frères, nos fils se faire assassiner au centre du village. » Les femmes de plus de 25 ans ont subi le même sort. Les plus jeunes, de 9 à 25 ans, ont été kidnappées, certaines pour se faire violer « par des dizaines de membres du groupe EI ». Les enfants, quant à eux, « se sont fait laver le cerveau par le groupe État islamique », a raconté la jeune femme de 22 ans, peinant à retenir ses larmes.
Mizra Ismail, président de la Yezidi Human Rights Organization International, a de son côté rapporté les cauchemars de mères forcées de regarder leurs enfants se vider de leur sang, après qu’elles eurent été violées plusieurs fois par des militants du groupe terroriste. D’autres mères ont imploré le groupe EI de leur rendre leurs enfants, pour se faire répondre que, ce qu’elles s’étaient fait servir en guise de repas, c’était leur chair.
« Honnêtement, je ne sais pas quoi vous dire par rapport à toute cette souffrance, a dit Nadia Murad Basee Taha, qui s’est depuis réfugiée en Allemagne. Il faut comprendre qu’un groupe pacifique fait l’objet d’un génocide simplement en raison de sa religion. Nous voulons vivre en paix. C’est tout ce que nous demandons. »
Murad Ismael, directeur général de l’organisme Yazda, demande en outre au Canada de s’engager à prendre en charge de 5000 à 10 000 réfugiés yézidis au pays. Car sa communauté risque d’être « exterminée d’ici 10 à 20 ans ». Ils étaient plus de 200 000 en Turquie, ils sont aujourd’hui 300 familles ; ils étaient 50 000 en Syrie, mais ne sont plus que 3000 aujourd’hui, a-t-il indiqué.
Le gouvernement canadien devrait cesser de se fier aux demandes d’asile qui lui sont transmises par l’ONU, car les yézidis sont là aussi discriminés par une majorité d’employés locaux musulmans, et les demandeurs d’asile doivent patienter jusqu’en 2022 pour plaider leur cause, a expliqué M. Ismael. « Les yézidis doivent pouvoir aller dans n’importe quel pays, tout comme les victimes de l’Holocauste lorsque la planète a enfin reconnu le génocide et les a laissées venir ici. »
Principe d’équité
La veille, des fonctionnaires du ministère de l’Immigration et un représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés arguaient que le processus d’accueil de réfugiés ne peut prioriser des demandeurs d’asile sur la seule base de leur religion. Car toutes sortes de facteurs doivent être pris en compte pour jauger leur vulnérabilité — notamment leur appartenance à une minorité ethnique, religieuse ou sexuelle.
Un discours repris par la directrice du Conseil canadien pour les réfugiés, Janet Dench, qui a martelé que l’accueil de réfugiés devait être « équitable ». « On ne devrait pas dire à une personne en péril qu’elle ne sera pas candidate à une réinstallation simplement en raison de sa religion ou de son origine ethnique », a fait remarquer Mme Dench, en notant que l’Afrique compte aussi son lot d’histoires d’horreurs.
Les conservateurs accusent cependant les libéraux de ne pas en faire assez pour aider avant tout les yézidis, victimes d’un génocide aux mains du groupe djihadiste EI.
Le putsch raté en Turquie pourrait retarder l’accueil de Syriens
Ottawa — La tentative de coup d’État de la semaine dernière en Turquie pourrait bien retarder encore davantage l’accueil au Canada de réfugiés syriens en provenance de ce pays.La délivrance des permis de sortie de Turquie pour les réfugiés était déjà un mécanisme long et complexe, ce qui a empêché le gouvernement canadien d’atteindre son objectif d’accueillir des milliers de Syriens de Turquie dans le cadre de son vaste programme visant à accueillir 25 000 Syriens en quelques mois. L’instabilité politique en Turquie ne fera rien pour arranger les choses, admet-on au ministère canadien de l’Immigration.
On estime que 549 Syriens réfugiés en Turquie ont déjà obtenu le feu vert d’Ottawa pour venir s’installer au Canada, mais ils n’ont toujours pas reçu leur permis de sortie du gouvernement turc ; 3815 autres dossiers sont toujours examinés par les autorités canadiennes.
Les efforts pour faire sortir de Turquie les réfugiés syriens étaient déjà semés d’embûches bureaucratiques. Contrairement à ce qui se fait dans d’autres pays, c’est le gouvernement turc, et non les Nations unies, qui gère le flux de migrants syriens — et ils seraient actuellement environ 2,7 millions dans ce pays. La Presse canadienne
Il faut comprendre qu’un groupe pacifique fait l’objet d’un génocide simplement en raison de sa religion. Nous voulons vivre en paix. C’est tout ce que nous demandons.