Ottawa sommé par le Sénat d’en faire plus pour les réfugiés syriens

Alors que la colline parlementaire a été désertée pour les vacances estivales, un comité sénatorial n’a pas voulu attendre la rentrée de septembre pour sommer le gouvernement de Justin Trudeau d’en faire davantage pour les quelque 28 000 réfugiés syriens accueillis au fil des derniers mois. Ottawa devrait par exemple bonifier les programmes linguistiques et cesser d’exiger que ces réfugiés remboursent leurs frais de transport vers leur pays d’accueil.

« Nous travaillons en temps réel », explique le sénateur Jim Munson, président du comité du Sénat sur les droits de la personne. Son comité a consulté ce printemps des groupes d’accueil et des nouveaux arrivants, et les sénateurs jugeaient qu’ils devaient faire part des préoccupations qu’ils ont entendues dès maintenant au gouvernement. « Parce que nous sentons qu’il y a un sentiment d’urgence », explique M. Munson.

Cela [les dettes à rembourser au gouvernement fédéral] semblait représenter une source d’anxiété énorme pour un couple avec quatre enfants qui habite un petit logement

 

Parmi les « observations » du comité, l’idée que le fédéral puisse radier les dettes de réfugiés moins nantis qui ont emprunté au fédéral le coût de leurs billets d’avion vers le Canada. « Cela semblait représenter une source d’anxiété énorme pour un couple avec quatre enfants qui habite un petit logement », a relaté le sénateur Munson au sujet d’une famille de Montréal qui a témoigné devant son comité.

« Effectivement, c’est vraiment un fardeau extrême », confirme Stephane Reichhold, directeur de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. Cette facture des frais de transport a été absorbée par Ottawa pour les réfugiés qui ont été accueillis pendant le programme d’accueil massif du gouvernement libéral — soit entre son entrée en fonction début novembre et la fin février. « C’est très arbitraire, dénonce toutefois M. Reichhold. C’est parce qu’il y en a un qui a réussi à monter dans l’avion avant l’autre. »

Un rapport d’évaluation de ce programme de prêt concluait, l’an dernier, que l’obligation de rembourser leurs frais de transport « crée du stress pour bon nombre de réfugiés » et en empêche certains de profiter d’une formation linguistique puisqu’ils se dépêchent de se trouver un travail. M. Reichhold réclame, comme le comité sénatorial, que ces frais soient assumés par Ottawa pour tous les réfugiés — venus de Syrie ou d’ailleurs. Une possibilité qu’étudie le ministre de l’Immigration John McCallum depuis la fin février. Son ministère examine les « solutions viables », a indiqué son bureau lundi.

Davantage de cours de langue

 

Le comité invite en outre Ottawa à bonifier les programmes de formation linguistique. Stephane Reichhold n’a pas constaté de problème au Québec, notant que la province a augmenté les ressources. Mais certains nouveaux arrivants ont confié au Devoir qu’eux et leurs enfants n’avaient accès qu’à des cours de francisation à temps partiel à Lévis.

Le sénateur Munson et ses collègues, qui ont recueilli les témoignages de réfugiés traumatisés ou souffrant d’un syndrome de stress post-traumatique, somment Ottawa d’établir un « plan d’action » en santé mentale.

Le bureau du ministre McCallum a fait savoir qu’il étudierait le rapport officiel du comité lorsqu’il sera déposé à l’automne. Quant à la dernière demande des sénateurs — que les réfugiés aient accès plus rapidement aux prestations fiscales pour enfants —, on note en coulisses qu’Ottawa a déjà agi en ce sens.

Reconnaissant que toutes ces préoccupations sont légitimes, Stephane Reichhold a cependant invité le fédéral et les citoyens à ne pas oublier pour autant les réfugiés venus d’autre part. « Les Syriens n’ont pas plus de problèmes que les Bhoutanais, ou les Colombiens, ou les Congolais, qui sont arrivés durant la même période », a noté l’intervenant.

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