À Ottawa de trancher

L’appareil F-35 est au nombre des avions considérés par le gouvernement Harper.
Photo: Lockheed Martin L’appareil F-35 est au nombre des avions considérés par le gouvernement Harper.

Le processus pour évaluer les candidats au remplacement des avions de chasse canadiens a été « équitable, objectif et impartial ». Mais les critères d’évaluation étaient-ils arbitraires?

 

Cette question demeure sans réponse alors que le comité d’experts chargé de surveiller l’évaluation qu’a fait l’armée des appareils qui pourraient remplacer ses chasseurs a conclu, jeudi, que l’armée de l’air a évalué les options qui s’offraient à elle de façon « rigoureuse » et « impartiale ».

 

Les quatre panélistes qui ont présenté leurs conclusions jeudi ne se prononcent toutefois pas quant à l’appareil — entre le F-35 de Lockheed Martin et ceux de Boeing, Dassault et Eurofighter — qui répondrait le mieux aux besoins et critères de l’armée. « Nous n’avions pas le mandat de faire des recommandations », a résumé Keith Coulter, un ancien pilote de chasse qui siégeait au comité. « On est dans une démocratie, pas une technocratie », a renchéri son copanéliste Philippe Lagassé, expert de la défense à l’Université d’Ottawa. « Les ministres sont responsables de prendre des décisions. […] Ce n’est pas à des experts techniques de décider de la politique gouvernementale, ou de prendre des décisions. »


Sous-estimé de 10 milliards

 

Son comité a été mis sur pied il y a deux ans à la suite du rapport cinglant du vérificateur général, qui statuait que la Défense s’était organisée pour que le gouvernement se dote d’une flotte de F-35 en sous-estimant de 10 milliards les coûts réels de cet achat et en camouflant les risques qui y étaient associés.

 

Le processus d’achat avait été repris à zéro. Le comité a conclu qu’il n’y a eu « aucun préjugé favorable envers l’un des quatre appareils ».

 

Or, l’armée a mis de côté les besoins opérationnels qu’elle avait ciblés au départ, mais elle s’est de nouveau basée sur la politique de défense d’Ottawa, le Canada d’abord. Certains disent que seul le F-35 peut y répondre.

 

Est-ce que plus d’un appareil cadrait aux besoins de cette politique militaire ? Les experts n’ont pas voulu répondre jeudi. Est-ce que certains appareils se démarquaient ? Pas de réponse non plus. « Le processus n’était pas créé pour éliminer des appareils. […] Il n’y a pas de perdants, il n’y a pas de gagnants », a insisté M. Lagassé.

 

Ce sera maintenant à un groupe de sous-ministres de conseiller les ministres. Le groupe a reçu un rapport plus détaillé que celui remis aux médias, répertoriant les coûts et les risques que courrait chaque appareil dans le cadre des missions prévues à la politique de défense d’Ottawa.

 

Pourquoi le gouvernement cache-t-il ce document plus étoffé ? Et le premier ministre tiendra-t-il enfin un appel d’offres, ont demandé néodémocrates et libéraux aux Communes.

 

« Le gouvernement a reçu le rapport, il va en examiner les options et il va prendre des décisions dans l’intérêt supérieur des hommes et des femmes des Forces armées canadiennes », s’est contenté de répondre Stephen Harper.

 

Les conservateurs martèlent que le « gouvernement n’a pas encore pris de décision ». En coulisse, on promet une annonce « prochainement ».

Le processus n’était pas créé pour éliminer des appareils. Il n’y a pas de perdants, il n’y a pas de gagnants.

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