Le secteur de l’aérospatiale au Canada a besoin de plus d’argent
Devant la menace que posent de nouveaux joueurs musclés dans l’industrie aérospatiale, le Canada doit redoubler d’efforts, selon un rapport rendu public jeudi.
Le Canada doit investir plus d’argent pour la recherche dans le secteur et négocier davantage d’accords de coopération bilatéraux, notamment avec la Chine et l’Inde, conclut l’examen de l’aérospatiale mandaté par le fédéral.Car l’industrie aérospatiale est non seulement une question d’accès aux marchés mondiaux mais aussi de sécurité nationale, a insisté l’ancien ministre David Emerson, qui a présidé l’examen.
Dévoilée jeudi, la révision stratégique était fort attendue par l’industrie. Elle se penchait non seulement sur l’aérospatiale, mais aussi sur l’industrie spatiale.
Ce secteur est d’une importance cruciale au Québec, où se trouvent environ la moitié des travailleurs en aérospatiale au pays.
Le rapport recommande à Ottawa de déclarer le secteur de l’aérospatiale «prioritaire», ce qui lui assurera plus de financement au sein des programmes de recherche déjà existants.
Il suggère aussi de créer un programme de démonstration à grande échelle, pour aider les entreprise à faire passer leurs innovations technologiques de l’étape du laboratoire aux essais réels sur les avions. Cette étape cruciale du développement serait le parent pauvre des programmes de financement fédéraux.
Et puisque le marché canadien est petit, le Canada doit demeurer un exportateur majeur, croit M. Emerson.
Selon lui, la Chine et l’Inde sont des menaces pour l’industrie canadienne, mais ces pays représentent aussi des occasions en or.
«La montée de nouveaux joueurs signifie qu’il y a de plus en plus de compétition», souligne M. Emerson.
«La Chine progresse très vite», ajoute-il avec un sentiment d’urgence.
L’examen recommande aussi d’obliger les entreprises qui souhaitent vendre des aéronefs au gouvernement à prendre des engagements fermes en matière de retombées industrielles et technologiques au pays. Une recommandation qui sera vraisemblablement bien accueillie par les syndicats et les petites entreprises reliées à cette industrie de pointe.
Le manque de travailleurs qualifiés a aussi été souligné par le responsable de l’étude qui recommande des efforts soutenus pour attirer les jeunes vers des domaines d’études utiles aux entreprises.
L’examen de l’industrie aérospatiale, qui se veut indépendant, a été annoncé en février dernier par le gouvernement Harper.
Cette révision devait être fiscalement neutre. Ainsi, toute suggestion faite de fournir plus d’argent à un endroit devait entraîner des compressions ailleurs.
Un rapport bien reçu
Le rapport a été bien reçu de façon générale par l’industrie. Ses membres ont d’ailleurs contribué au rapport.
L’Association des industries aérospatiales du Canada (AIAC) appuie les conclusions.
«M. Emerson reconnaît que l’industrie de l’aérospatiale et de l’espace est à un tournant crucial dans son évolution et que le gouvernement, l’industrie, les universitaires et les syndicats doivent s’adapter d’urgence à un environnement mondial hautement compétitif et en mutation rapide», a déclaré David Schellenberg, président du conseil d’administration de l’AIAC.
Mais il est essentiel que ces politiques soient mises en oeuvre rapidement et efficacement, prévient-il.
Il n’est pas indisposé par le fait que l’étude devait être fiscalement neutre, restreignant ainsi la marche de manoeuvre des responsables du rapport, qui devaient ainsi limiter leur suggestions et leurs coûts.
«On comprend que le gouvernement navigue dans un contexte fiscal difficile», a-t-il dit.
Chez le géant de l’aérospatiale Bombardier, le rapport est aussi bien reçu.
«M. Emerson a vraiment ciblé les bonnes priorités», a déclaré Hélène Gagnon, vice-présidente des affaires publiques de l’entreprise.
«Ce qu’il dit c’est qu’il y a un sentiment d’urgence. On prend un peu notre industrie aéronautique pour acquis au Canada. Mais la vérité c’est qu’on a perdu du terrain ces dernières années par rapport aux autres nations.»
L’industrie aérospatiale emploie quelque 160 000 personnes au pays et génère plus de 22 milliards $ de recette selon l’AIAC. Selon le gouvernement, ce secteur industriel se classe au deuxième rang mondial par rapport à son produit intérieur brut.