La Constitution attendra

Ottawa — Peu importe qui sera le prochain chef du Nouveau Parti démocratique, la politique du parti concernant l'intégration du Québec dans la Constitution ne devrait pas changer. Les quatre principaux candidats en lice pour remplacer Jack Layton s'entendent ainsi pour dire que le débat constitutionnel ne fait pas partie de leurs priorités, ni de celles des Québécois, mais qu'il faut dans l'attente poser des gestes concrets pour la province.
Un jour, il faudra régler la situation. Mais pas tout de suite. Et pas question de se fixer un échéancier, ont tour à tour plaidé au Devoir Thomas Mulcair, Brian Topp, Paul Dewar et Nathan Cullen.Lieutenant québécois de Jack Layton pendant quatre ans — ayant alors vivement défendu la place faite au Québec par son parti —, M. Mulcair reprend les propos de son ancien chef: il promet de poser des «gestes significatifs pour donner un sens à la reconnaissance de la nation québécoise». Et il évoque quelques initiatives chères au NPD — imposer le français comme langue de travail dans les institutions fédérales non couvertes par la loi 101, garantir le poids politique du Québec dans la réforme de la carte électorale canadienne, encadrer le pouvoir fédéral de dépenser — pour illustrer ces «gestes concrets» qui aideront à «relever le défi historique de trouver une place pour le Québec au sein du Canada».
Mais selon lui, «il n'y a pas besoin de toucher à la Constitution» pour parvenir à cet objectif. «Je trouve regrettable que le Québec se soit fait imposer une Constitution qui jouait dans ses champs de compétence, a-t-il indiqué en entrevue. Les échecs de Meech et de Charlettetown prouvent que ce carcan non voulu est devenu intolérable. Mais il faut apprendre de ces événements: pour l'instant, rien ne nous empêche d'agir par des lois. Et une fois que ces lois auront été appliquées pendant un certain temps, tout le monde va se rendre compte que ça pourrait être constitutionnalisé.» Cette deuxième étape est toutefois encore très loin, et non nécessaire actuellement, soutient M. Mulcair.
Brian Topp
Même discours du côté de l'ex-stratège néodémocrate Brian Topp, qui a dirigé les campagnes qui ont mené à l'élection d'un premier député dans la province — M. Mulcair — et à la percée historique du parti au Québec en mai dernier.
Celui qui rappelle qu'il a travaillé aux côtés de Jack Layton à rédiger ses politiques pour le Québec reprend mot à mot les phrases-clés de l'ancien chef.
M. Topp reconnaît qu'il «y a du travail qui n'est pas fini sur la Constitution canadienne, ça c'est certain», mais il souligne qu'il faudra attendre d'avoir «les conditions gagnantes» avant de se lancer de nouveau dans une ronde de discussions. Mais comme son ancien patron, il explique très peu ce que pourraient être ces «conditions gagnantes» et à quel moment elles pourraient être réunies. Comme son adversaire montréalais, M. Topp récite les propositions de son parti pour défendre les intérêts de la province au pays. Quant à de nouvelles idées, il rappelle que la campagne ne fait que commencer.
«On ne peut pas refaire le lac Meech ou Charlottetown, qui étaient si "divisifs" et qui n'ont pas marché. On ne peut pas rater notre coup», a-t-il martelé au Devoir cette semaine. Or l'aspirant-chef refuse tout pronostic. «Ce n'est pas un dossier qui peut traîner 100 ans, mais ce n'est pas un dossier que nous allons régler l'année prochaine.» Un engagement pour un premier mandat à la tête du pays, s'il y accède un jour? «Si possible.» «Je pense que ceux qui ont fait des promesses là-dessus, des deux côtés de ce débat, l'ont regretté», précise-t-il cependant.
Paul Dewar et Nathan Cullen indiquent, comme M. Topp, que ce n'est pas la principale priorité de «M. et Mme Tout-le-monde» que d'exiger la ratification de la Constitution. Il faut plancher pour le moment sur des enjeux qui préoccupent les Québécois autant que les Canadiens, comme l'environnement, les soins de santé ou l'éducation, qui ne divisent pas le pays. Car c'est le message qu'ont envoyé à Ottawa les Québécois le 2 mai dernier, selon eux, en votant en grande majorité pour des partis fédéralistes.
Sur la question de la clarté référendaire, les candidats appuient la position de Jack Layton: la règle du «50 % + 1» est «incontournable», mais la question doit être claire, dit M. Mulcair à l'instar de ses adversaires.
Le député d'Ottawa-Centre, Paul Dewar, a toutefois hésité à dire ce chiffre tout haut, répétant au départ qu'il était d'accord «avec les résolutions du parti».