Consommation d'essence: le plan Cannon constituerait un recul

Le projet du ministre fédéral des Transports, Lawrence Cannon, de calquer les normes de consommation du parc automobile canadien sur celles récemment adoptées par les États-Unis constituerait un sérieux recul, selon une étude réalisée l'été dernier par l'International Council on Clean Transportation (ICCT).

Ce rapport, qui compare les normes actuelles et projetées de l'Europe, du Japon, du Canada, de la Chine, de la Corée du Sud et des États-Unis et qui compte un chapitre spécial sur les normes californiennes, indique que le parc automobile canadien affiche actuellement une consommation moyenne de près de 30 milles (US) au gallon (mpg), comparativement à 25 mpg pour les États-Unis dans leur ensemble et 23 mpg pour la Californie.

Avec l'entente volontaire signée en 2005 avec les constructeurs automobiles à l'époque du gouvernement Martin, le parc automobile canadien devra atteindre une moyenne de 34 mpg en 2010, ce qui est nettement plus performant que les 33 mpg que cible la Californie pour 2016 avec des normes que le Québec et le Manitoba rêvent de faire entrer en vigueur sur leur territoire!

Quant aux normes édictées par l'administration Bush il y a quelques semaines et que le ministre Cannon privilégie dans une approche continentale, comme il l'a laissé entendre en conférence de presse au Salon de l'auto de Montréal jeudi, elles exigeront d'atteindre en 2020 le niveau de consommation de carburant que le Canada est censé atteindre en 2010 selon l'entente de 2005 avec les constructeurs, toujours en vigueur.

Il en résulte que si le Canada s'aligne par voie réglementaire sur les normes instaurées par le président Bush ou si le Québec implante les normes californiennes sur son territoire, on risque en réalité de légaliser une hausse et non une baisse de la consommation, selon le directeur du Centre d'expérimentation des véhicules électriques du Québec, Pierre Lavallée.

L'étude de l'ICCT, réalisée l'été dernier, note sans complaisance que l'entente avec les constructeurs automobiles est strictement volontaire. Mais comme elle prévoit une réduction de 5,3 mégatonnes des émissions de gaz à effet de serre du parc automobile canadien, soit 25 % des émissions des véhicules neufs vendus entre 2008 et 2012, le parc automobile canadien, généralement moins gourmand que celui des Américains, dépasserait la performance moyenne de nos voisins du Sud.

Des normes sur le CO2

Le directeur du CEVEQ n'a pas été très impressionné par les doléances des constructeurs automobiles, qui ont accueilli l'annonce de nouvelles normes canadiennes de consommation en réclamant du temps, beaucoup de temps, pour s'y conformer.

L'étude de l'ICCT , a affirmé M. Lavallée, indique clairement que les mêmes constructeurs «se conforment déjà» à des normes encore plus sévères sur le marché européen et que rien ne justifie qu'ils ne le fassent pas ici.

General Motors, par exemple, affiche des ventes de véhicules qui émettent en moyenne 157 grammes par kilomètre (g/km) en Europe, comme Honda. Avec une moyenne d'émissions de 161 g/km, Ford devance même Volkswagen, Nissan, Mazda, Mercedes et BMW.

«Aucune raison, a expliqué M. Lavallée, ne permet à ces constructeurs de prétendre ne pas respecter des normes équivalentes à celles de l'Europe, qui vise un niveau d'émissions de 120 g/km par véhicule, sans distinction de classes, contrairement à ici. Les constructeurs polluent davantage ici parce que les gouvernements affichent une tolérance inexplicable, tout comme le font les groupes écologistes, qui doivent réclamer un réalignement des normes sur l'Europe et l'Asie parce qu'ils utilisent des critères beaucoup plus rigoureux et de nature environnementale alors que la consommation fait strictement référence au portefeuille.»

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