Ottawa gérera la campagne québécoise

Ottawa — Le Parti conservateur n'a plus d'organisateur en chef au Québec et ne compte pas en nommer un nouveau dans un avenir prévisible. Le Devoir a appris que les troupes conservatrices de la province seront dorénavant dirigées par les instances nationales, à Ottawa. C'est l'organisateur en chef pour tout le Canada, Doug Finley, qui prend le Québec en charge, comme c'est déjà le cas pour d'autres provinces.

L'organisateur en chef du Parti conservateur au Québec depuis plus de deux ans, Pierre Coulombe, a été remercié de ses services mercredi après-midi. Sa femme, qui était son adjointe dans les bureaux du parti à Montréal, a aussi quitté ses fonctions.

«Le départ de Pierre Coulombe fait partie d'une restructuration de notre organisation au Québec. On est dans un gouvernement minoritaire, alors il peut y avoir des élections bientôt. Cette restructuration vise à améliorer notre efficacité au Québec à l'approche de possibles élections», a soutenu au Devoir Ryan Sparrow, porte-parole du Parti conservateur à Ottawa.

En décembre dernier, Le Devoir révélait que les jours de Pierre Coulombe à la tête du PC au Québec étaient comptés. Il était sur la corde raide depuis plusieurs mois en raison d'une insatisfaction grandissante sur le terrain. Une source conservatrice bien branchée sur le Québec soutenait alors que «le parti est rendu à une autre étape au Québec» et que «ça prend quelqu'un de plus fort». Elle ajoutait: «Ça nous en prend plus pour continuer à grandir et atteindre nos objectifs.»

Une source haut placée estime que Pierre Coulombe «a fait du bon travail» puisqu'il a élargi la base conservatrice au Québec et contribué à une percée dans la province en 2006. Pour cette raison, il demeure en bons termes avec le parti. Il pourrait même occuper éventuellement d'autres fonctions au sein du PC, dit-on.

Mais sur le terrain, au Québec, on reproche à Pierre Coulombe de ne pas avoir su mettre sur pied une véritable machine politique. Même si les intentions de vote grimpent, la plupart des circonscriptions n'ont aucune liste de bénévoles et disposent de peu de moyens logistiques et financiers. Le pointage des sympathisants est déficient dans plusieurs régions. Ces faiblesses auraient d'ailleurs coûté la victoire dans Saint-Hyacinthe aux élections partielles de septembre dernier.

Surprise, pas de nouvel organisateur

La surprise vient du fait que M. Coulombe n'aura pas de remplaçant, du moins à court et à moyen terme. C'est le grand chef des opérations du PC à Ottawa et organisateur national, Doug Finley, qui s'occupera du Québec. «Je ne peux pas dire si cette nouvelle structure est permanente, mais elle sera en place pour un futur prévisible», a soutenu une source conservatrice bien au fait de la situation. C'est donc dire que, si des élections sont déclenchées ce printemps, le volet québécois de la campagne sera géré à partir d'Ottawa. Le PC conserve toutefois ses bureaux à Montréal et Québec, tout en préparant une campagne électorale spécifique pour la province.

Selon nos informations, les organisateurs régionaux, y compris celui qui est considéré comme le numéro deux du PC au Québec, Nelson Bouffard, ne sont pas touchés par la restructuration. «Les organisateurs régionaux restent en place, mais ils feront un rapport à Doug Finley. Cette structure est en place dans la majorité des provinces», précise une source conservatrice, qui ajoute que la majorité des candidats du PC sont déjà désignés dans les circonscriptions québécoises, ce qui enlèvera du poids à Doug Finley.

Hier, la nouvelle du départ de Pierre Coulombe commençait à se répandre chez les militants québécois. La vaste majorité des personnes contactées par Le Devoir estiment qu'il s'agit d'une bonne nouvelle pour le parti. «Il fallait qu'il se passe quelque chose, ça n'allait plus du tout», a soutenu une source bien au fait de l'humeur des militants sur le terrain.

Par contre, la prise en charge de la province par Doug Finley a surpris tout le monde. En privé, certains militants très impliqués dans l'organisation régionale exprimaient des doutes sur cette nouvelle structure, même si elle est en vigueur ailleurs au pays. «Dans les autres provinces, Doug Finley peut se rabattre sur le Parti conservateur provincial pour se faire aider et assurer le "micro-management". Mais au Québec, il n'y a pas de PC provincial, la base vient du PLQ et de l'ADQ. Pour mettre des militants libéraux et adéquistes dans la même salle, il faut bien connaître le terrain et avoir un certain doigté!» D'autres se demandaient si Doug Finley, un excellent stratège sur la scène pancanadienne, sera en mesure de bien adapter le message au Québec, terre politique distincte.

D'autres soulignent toutefois que le travail de terrain est surtout l'affaire des organisateurs régionaux, qui sont toujours en place. De plus, Doug Finley n'a jamais été très loin de Pierre Coulombe. «Depuis le début, la stratégie, c'est lui. Il sait comment gagner des élections, c'est le plus important», dit une source québécoise. Le lieutenant politique de Stephen Harper au Québec, Lawrence Cannon, continuera également d'exercer son influence.

Un militant a soutenu que le PC ne voulait peut-être pas froisser l'ADQ en nommant un nouvel organisateur trop associé au PLQ de Jean Charest. Pierre Coulombe était issu de la filière libérale, alors que les deux plus importants candidats pressentis pour le remplacer, Gisèle Morgan et Ghislain Maltais, étaient eux aussi des libéraux provinciaux qui ont très peu de liens avec l'ADQ.

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