Achat de 17 avions C-130J de Lockheed - Les provinces devront se battre entre elles pour le partage des retombéees

Ottawa — Le gouvernement Harper a une fois de plus rejeté du revers de la main hier l'idée de garantir au Québec 55 % des retombées économiques des contrats militaires. Mais, contrairement au tollé que cette décision avait soulevé l'an dernier, les entreprises et le gouvernement du Québec sont restés prudents dans leurs commentaires hier.

Le gouvernement conservateur était visiblement pressé d'annoncer la signature du contrat avec le géant américain Lockheed Martin pour l'achat de 17 avions de transport militaire C-130J. En effet, le gouvernement n'a dévoilé qu'une partie de l'entente hier, soit l'achat des appareils, car la lucrative portion du contrat qui concerne l'entretien des avions sur 20 ans fait toujours l'objet de négociations avec Lockheed Martin. Il faudra donc attendre plusieurs mois avant de connaître la valeur totale du contrat, et donc les retombées économiques destinées au Canada.

Ainsi, Ottawa achète les 17 avions pour la somme de 1,4 milliard de dollars, soit près de 82 millions par appareil. Ces avions, qui doivent remplacer les vieux Hercules, seront livrés entre 2010 et 2012.

Même si le contrat d'entretien de plusieurs milliards de dollars n'est pas connu, le gouvernement estime déjà que la facture totale pour l'État sera de 4,6 milliards de dollars, tel que révélé hier par Le Devoir. Ce montant comprend tous les coûts: l'achat, l'entretien, la construction de nouvelles infrastructures (hangars), la formation des pilotes, etc. «Le coût total pour le gouvernement devrait tourner autour de 4,6 ou 4,9 milliards, selon l'entente concernant l'entretien qu'on réussira à obtenir de Lockheed Martin», a soutenu Terry Williston, directeur général en approvisionnement militaire au ministère des Travaux publics.

À qui profiteront les retombées?

Selon la loi, Lockheed Martin doit réinvestir au Canada l'équivalent de la valeur du contrat sous forme de retombées économiques. Pour aller chercher leur part du gâteau, les entreprises du Québec devront toutefois se battre contre l'industrie des autres provinces, puisque Ottawa refuse de garantir une part spécifique pour le Québec même si ce dernier renferme 55 % de l'industrie aérospatiale canadienne.

«Je ne me transformerai pas en policier des contrats. Ils tomberont où ils tomberont», a lancé le ministre-sénateur des Travaux publics, Michael Fortier. «C'est le Canada qui est gagnant», a-t-il ajouté.

Le ministre du Développement économique du Québec, Raymond Bachand, avait fortement critiqué le laisser-faire d'Ottawa dans ce domaine l'an dernier. Hier, il semblait beaucoup plus conciliant. «J'ai une grande confiance que le Québec va obtenir sa juste part. [...] Parfois, c'est mieux de ne pas exiger de quota. Sans quota, normalement, les meilleurs gagnent. On est les meilleurs», a-t-il dit à sa sortie du caucus libéral, à Sherbrooke.

Du côté de l'Association québécoise de l'aérospatiale (AQA), qui représente les PME du secteur, on y allait hier d'un «optimisme prudent». «C'est sûr que si le gouvernement canadien avait pu nous garantir 55 % des retombées économiques, ç'aurait été magnifique. Mais je ne suis pas inquiet pour autant, on va aller chercher notre part. On va suivre ça de très près», a soutenu au Devoir le p.-d.g. de l'AQA, Jacques Saada. Même son de cloche au regroupement Aero Montréal. «On espère décrocher 60 % des contrats avec Lockheed, ce serait normal. Mais on va voir», a dit la directrice générale, Suzanne Benoît.

De leur côté, le PQ et le Bloc ont dénoncé les agissements du gouvernement Harper. «C'est complètement injustifiable et préjudiciable pour l'ensemble du Québec», a affirmé la porte-parole du Bloc en matière d'industrie, Paule Brunelle.

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Avec la collaboration d'Antoine Robitaille

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