Le ministre de la Défense dément qu'un manuel qualifie les autochtones d'ennemis potentiels

Toronto — Le ministère de la Défense nationale qualifie «de conjecture, de sensationnalisme et de fausseté» un article d'un quotidien qui traite d'un manuel de mesures anti-insurrectionnelles des Forces armées canadiennes, qui incluent des groupes autochtones radicaux dans une liste de mouvements menaçant la sécurité nationale au même titre que le Djihad islamique, le Hezbollah ou les Tigres de libération de l'Eelam tamoul.
La version finale du manuel devrait être terminée d'ici quelques mois, mais le brouillon, dont le Globe and Mail a obtenu copie en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, circulerait depuis 2005, selon une lettre d'accompagnement.Le document définit une série de mesures, comme des embuscades ou des mises à mort, que pourraient prendre les militaires pour combattre des insurgés au Canada et à l'étranger. «La montée d'organisations autochtones radicales, comme la Société des guerriers mohawks, peut être vue comme une insurrection avec des buts définis», indique le manuel.
«Même si elles ne recherchent pas le contrôle total du gouvernement fédéral, elles cherchent à obtenir des concessions politiques particulières dans leurs relations avec les gouvernements nationaux et à contrôler (ouvertement ou non) la politique au niveau local ou de la réserve, et ce par la menace ou l'utilisation de la violence», ajoute le manuel.
Un «brouillon»
Un communiqué diffusé par le bureau du ministre de la Défense, Gordon O'Connor, samedi, précisait que le manuel n'était qu'un brouillon et n'avait jamais été approuvé par des cadres supérieurs. Il assurait également que «la version finale ne comportera de références à aucune organisation autochtone existante».
Il indiquait aussi que le brouillon du manuel «ne faisait aucune comparaison entre les groupes autochtones et des groupes d'insurgés (comme les Tigres tamouls ou le Djihad islamique)».
Le communiqué notait que le brouillon du manuel utilisait «des exemples de soulèvements passés au Canada et à l'étranger pour illustrer comment des groupes avaient utilisé la violence ou la menace de violence dans le passé pour influencer les décisions politiques ou obtenir des concessions».
La Société des guerriers mohawks a été impliquée dans la crise d'Oka en 1990. Cette dernière avait déclenché une confrontation de 78 jours entre les policiers et les militaires. Un policier y avait trouvé la mort. Le groupe réunit les autochtones plus militants des territoires mohawks traditionnels qui couvrent en partie le Québec, l'Ontario, le Vermont et l'État de New York.
Le grand chef de la Union of British Columbia Indian Chiefs, Stewart Phillip, qui a récemment prédit «un été de protestations des autochtones» en réponse au peu de mesures proposées dans le dernier budget conservateur pour s'attaquer à la pauvreté autochtone, s'est dit «complètement outré» par le manuel en entrevue au Globe and Mail.
«C'est une attaque envers nos droits politiques, a-t-il déploré. Ce que nous voyons est la criminalisation délibérée des efforts des autochtones pour marcher, manifester et attirer l'attention publique sur la pauvreté dévastatrice qui est réelle dans nos communautés».