Harper s'attaquera au smog en priorité

Après des mois de tergiversations, le gouvernement Harper a enfin donné la date à laquelle il dévoilera son approche environ-nementale. Les premières mesures conser-vatrices seront connues dès la semaine prochaine, lors du dépôt de la nouvelle Loi canadienne sur la qualité de l'air. Cette loi ciblera le smog. Mais pour ce qui est de la réduction des gaz à effet de serre, il faudra encore attendre, a prévenu Stephen Harper hier.
Ottawa — Le gouvernement conservateur a sorti l'artillerie lourde hier à Vancouver: trois ministres (Environnement, Ressources naturelles et Transports) et le premier ministre apparaissaient sur une même tribune pour annoncer... qu'il y aura une annonce en matière d'environnement la semaine prochaine.Stephen Harper a ainsi confirmé que le premier volet de l'approche conservatrice en environnement serait la Loi canadienne sur la qualité de l'air, comme sa ministre de l'Environnement, Rona Ambrose, l'avait souligné jeudi dernier lors de son passage devant un comité parlementaire.Le premier ministre, qui n'a pas voulu donner de détails sur la nouvelle loi ou sur la stratégie générale de son gouvernement, a toutefois soutenu qu'elle comportera éventuellement des mesures obligatoires visant à contraindre certains secteurs industriels à diminuer leurs rejets de gaz à effet de serre (GES). La nouvelle loi contiendra aussi des initiatives pour combattre les polluants qui causent le smog, a-t-il dit.
«Nous avons un plan qui remplacera les belles paroles par des résultats, qui nous permettra de passer des manchettes à court terme aux progrès à long terme et qui améliorera l'environnement de façon concrète», a soutenu Stephen Harper. Le premier ministre a ajouté qu'il y aurait des «normes nationales claires et cohérentes» et que les GES et les polluants ne seraient plus traités selon une approche séparée.
Le premier ministre a dit s'attendre à des critiques lors du dévoilement du plan. «Je n'ai pas de doute que certains vont trouver les mesures insuffisantes, mais c'est ce qui a été dit en 1991 lorsque le traité sur les pluies acides a été signé [avec les États-Unis]. C'est ce qui a été dit lors de toutes les mesures prises par le dernier gouvernement conservateur, et ce, jusqu'à l'an dernier, quand les critiques ont finalement reconnu que c'était le gouvernement [Mulroney] qui était le plus vert de l'histoire», a affirmé Stephen Harper.
Un an d'attente?
Des paroles qui n'ont toutefois pas calmé la grogne des partis d'opposition et des groupes écologistes, qui ont jugé hier l'annonce de Stephen Harper «décevante» et «désolante». Les critiques les plus vives concernent l'annonce d'une nouvelle ronde de consultations avec les industries, les provinces et les territoires, dans le but de fixer de nouveaux objectifs de réduction des émissions de GES «réalistes». Le tout prendra au moins un an, a averti le premier ministre.
«C'est désolant d'entendre ça. Le gouvernement a passé l'été à nous annoncer un gros plan, un bon plan, et à monter les attentes pour finalement accoucher d'une minuscule souris, a soutenu au Devoir Hugo Séguin, d'Équiterre. On va perdre des années avec une nouvelle loi inutile et avec de nouvelles consultations. Ça montre que pour les conservateurs, l'environnement, c'est juste important politiquement, mais que, sur le fond des choses, ils nous font perdre notre temps. Ils n'ont que des beaux discours.»
Au Bloc québécois, on soutient que les conservateurs ramènent le pays six ans en arrière. «En 2000, le gouvernement de Jean Chrétien a annoncé une grande consultation pour savoir comment appliquer le protocole de Kyoto au Canada. Là, on annonce encore des consultations. On retourne en arrière alors que c'est le temps de l'action», a affirmé Bernard Bigras.
Le Parti libéral s'en prend lui aussi à la nouvelle loi qui sera dévoilée la semaine prochaine. Selon son porte-parole Pablo Rodriguez, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (LCPE), déjà en vigueur, comporte tous les outils nécessaires pour contrer la hausse des GES et contrôler les polluants. «Il faut passer à l'action et ne pas chercher à gagner du temps. Il faut des objectifs à court, moyen et long termes, ainsi que des chiffres et un échéancier. Et vite, le temps presse!»
En prononçant l'expression «réductions basées sur l'intensité» des GES, Stephen Harper a aussi semé l'inquiétude, puisque cette approche, adoptée par les États-Unis, ne prend pas en compte la réduction totale des émissions, mais la réduction par unité de production. Bref, les efforts d'une usine pour émettre moins de GES seront reconnus même si sa production totale a augmenté et même si cela signifie qu'elle émet, en fait, plus de GES qu'auparavant.