L'entente de «tiers pays sûrs» - Les réfugiés ne pourront plus se rendre au Canada par voie terrestre
Dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, le Canada et les États-Unis ont conclu une entente dite de «tiers pays sûrs». Le cabinet fédéral vient d'avaliser cet accord qui n'est pas sans inquiéter les groupes de défense des réfugiés.
Ottawa — Le cabinet fédéral a donné son aval à l'accord canado-américain de «tiers pays sûrs» qui obligera les demandeurs d'asile à faire leur requête dans le premier des deux pays où ils mettront les pieds. Ils n'auront plus le droit de tenter leur chance dans le second pays.Selon deux sources proches du dossier, les ministres ont accepté la version finale de l'entente hier matin. Cet accord fait partie du projet de frontière intelligente entre le Canada et les États-Unis. Il doit encore être revu par un comité ministériel — une formalité, dit-on — et être approuvé par Washington avant d'entrer en vigueur. Une source à Citoyenneté et Immigration Canada ne pouvait préciser quand cela se produirait.
En vertu de l'accord, un demandeur d'asile ne pourra plus se rendre au Canada par voie de terre, parce qu'il arrive d'Amérique centrale ou parce qu'il a transité par les États-Unis, et faire une demande de statut de réfugié au poste-frontière. Il devra s'adresser aux autorités américaines.
Des exceptions sont prévues pour les mineurs non accompagnés, les personnes ayant de la famille établie au pays ou détenant les documents de voyage réglementaires.
Les groupes de défense des réfugiés déplorent cet accord et craignent une déstabilisation du système d'accueil. D'abord, comment arrivera-t-on, à la frontière, à vérifier la validité des exemptions invoquées? se demande Rivka Augenfeld, de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes.
Comme toute personne déjà en territoire canadien aura le droit de faire une demande d'asile, peu importe qu'elle ait passé ou non par les États-Unis, on craint que des passeurs en profitent pour inciter des gens à entrer illégalement ou que des personnes désespérées s'y risquent.
Les ministres n'ont toutefois pas eu à se prononcer sur une note diplomatique qui précise l'application d'un des articles obligeant le Canada à aider, sur demande de Washington, au rétablissement de réfugiés sélectionnés par les Américains à l'extérieur de leur territoire. Cette note, dont Le Devoir a obtenu copie, confirme ce que nous révélions cet été, à savoir que le Canada pourrait devoir accueillir ou aider, par exemple, des réfugiés haïtiens coincés sur la base de Guantanamo et que les Américains ne veulent pas voir s'établir chez eux. Le Canada s'engage à voir au rétablissement d'environ 200 personnes par année. Plus, s'il y a crise.
Fait à noter, les libéraux étaient opposés, durant les années 1980, à ce concept de tiers pays sûrs. À l'époque, les réfugiés pauvres d'Amérique centrale arrivaient à nos portes par voie de terre alors que les États-Unis ne reconnaissaient pas l'existence de réfugiés provenant de ces pays alliés et qu'ils déportaient automatiquement ces demandeurs.