Les voeux du premier ministre

La magie de Noël a tardé à s’emparer de François Legault lors de l’échange de voeux des chefs de groupes parlementaires.
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne La magie de Noël a tardé à s’emparer de François Legault lors de l’échange de voeux des chefs de groupes parlementaires.

Le premier ministre jouit de plusieurs privilèges, dont celui d’adresser des voeux de Noël. François Legault ne s’en prive pas.

Il a donné le coup d’envoi de l’« échange de voeux » des chefs de groupes parlementaires dans la salle de l’Assemblée nationale, le 8 décembre dernier. La magie de Noël a toutefois mis du temps à s’emparer de lui.

D’emblée, M. Legault a rappelé à la mémoire des élus n’avoir pu transmettre ses voeux au lendemain des élections générales de 2018, car le député de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, s’était opposé à ce qu’il le fasse avant de filer à Montréal pour une rencontre des premiers ministres fédéral et provinciaux. « On a trouvé le moyen d’éviter que le député de Matane m’empêche de le faire [de nouveau] », a-t-il lancé, sourire en coin, prétendant avoir repoussé pour cette raison l’adoption de la Loi visant à reconnaître le serment prévu par la Loi sur l’Assemblée nationale comme seul serment obligatoire pour y siéger, sans quoi les trois élus ne pouvaient pas mettre le bout du nez à l’intérieur du Salon bleu.

Le premier ministre a suggéré à la nouvelle présidente de l’Assemblée nationale, Nathalie Roy, de « baisser le chauffage » — comme le nouveau superministre de l’Économie et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, qui est converti à la sobriété énergétique, le recommande — si les esprits s’échauffent au cours des quatre prochaines années dans le parlement.

Puis, il a souhaité ses meilleurs voeux à chacun des chefs de parti d’opposition, soit Marc Tanguay, Gabriel Nadeau-Dubois et Paul St-Pierre Plamondon, qu’il « aime tous égal », a-t-il fait remarquer.

D’abord, M. Legault a éprouvé de l’admiration pour le chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay, qui a succédé « à pied levé » à Dominique Anglade à la tête du Parti libéral du Québec, dont le leadership avait été contesté dans la foulée de la défaite électorale libérale du 3 octobre dernier. « Bravo ! Déjà, c’est tout un exploit. Et on espère… En tout cas, moi, j’espère sincèrement, là, qu’il va être là en janvier, quand on va revenir. Eh oui. Et je veux lui dire merci aussi parce qu’il m’a facilité la tâche en reprenant à peu près mot par mot les questions de sa prédécesseure. On dirait presque du karaoké », a-t-il lancé, rappelant sournoisement le rare talent de chanteur de M. Tanguay.

M. Legault s’est par la suite tourné vers le porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. « Je lui souhaite de passer un beau temps des Fêtes, de poursuivre son recentrage, de chanter, de danser avec la députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques [Manon Massé]. Mais ce n’est pas nécessaire de mettre ça sur TikTok. Suggestion, comme ça », a-t-il déclaré devant un auditoire amusé. Le premier ministre avait en tête les pas de danse faits par les porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé, sur le rythme sexiste du morceau Hit You With The Blick du rappeur KJ qui avaient été immortalisés dans une courte vidéo sur l’application mobile durant la campagne électorale.

Après, le chef du gouvernement a élevé le ton afin que le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, l’« entend[e], de l’autre bord de la porte » de la salle de l’Assemblée nationale, où il était maintenu faute d’avoir prêté serment au roi Charles III durant la période de travaux parlementaires. L’ex-péquiste a dit ne « pas [avoir] de souvenir d’un chef du Parti québécois qui avait autant la mainmise sur tout son caucus » que M. St-Pierre Plamondon, qui dirige un groupe parlementaire de trois personnes, incluant lui.

M. Legault n’a pas manqué de saluer les journalistes perchés dans les tribunes qui forment, selon lui, « la quatrième opposition » à son gouvernement. « Ça a été une grosse année aussi pour les journalistes. Eux autres aussi, ils ont eu une campagne électorale. Donc, je leur souhaite de se reposer, puis de revenir… là je ne sais pas si je devrais dire plus de bonne humeur ou tout simplement de bonne humeur, en janvier », a-t-il dit, à moitié sérieux.

De la lecture pour les Fêtes

En échange de ses bons voeux, le premier ministre a reçu un guide touristique de l’Ontario des mains du chef libéral intérimaire, Marc Tanguay. « On a voulu, bien comme il faut, le documenter sur un sujet qui le passionne », a-t-il affirmé, rappelant la manie de M. Legault à comparer la « richesse » du Québec et de l’Ontario.

M. Legault a récolté une « suggestion de lecture » de la part de M. Nadeau-Dubois, soit l’essai Une brève histoire de l’égalité, de l’économiste Thomas Piketty. « Il y a quelques chapitres sur ses taxes préférées dans ce livre-là. Ça va, j’en suis sûr, alimenter nos échanges à venir sur la fiscalité », a-t-il fait valoir au terme d’un automne où QS a été pris à partie à plus d’une reprise sur ses propositions d’imposer des « taxes orange » sur les véhicules les plus polluants ou encore sur les actifs nets excédant 1 million de dollars.

Trêve de plaisanteries, M. Legault a invité les autres élus québécois à se féliciter de « vivre dans une démocratie » où les uns « écoutent » les autres malgré leurs divergences de vues. Il a lancé « un appel à la solidarité de tous les Québécois » dans cette période inflationniste où « on vit des moments qui sont éprouvants ». « Sinon, bien, je souhaite à tout le monde de passer un beau temps des Fêtes, donc, un joyeux Noël, une bonne année 2023. »

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