Québec dit proposer 13% sur 5 ans pour les salaires au public, une offre aussitôt rejetée

Si on inclut une somme forfaitaire de 1000 $ la première année, on arrive à 13 % sur cinq ans, selon Sonia LeBel, accompagnée pour cette annonce des ministres de la Santé et de l’Éducation, Christian Dubé et Bernard Drainville.
Jacques Boissinot La Presse canadienne Si on inclut une somme forfaitaire de 1000 $ la première année, on arrive à 13 % sur cinq ans, selon Sonia LeBel, accompagnée pour cette annonce des ministres de la Santé et de l’Éducation, Christian Dubé et Bernard Drainville.

La présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a déposé jeudi ses offres au personnel des secteurs public et parapublic, offres qui ont aussitôt été rejetées par les syndicats.

Elle était accompagnée pour l’occasion des ministres de la Santé et de l’Éducation, Christian Dubé et Bernard Drainville.

Les conventions collectives des secteurs public et parapublic, qui concernent plus d’un demi-million d’employés de l’État, viennent à échéance le 31 mars prochain.

Rappelons que le front commun intersyndical revendique des augmentations de salaire supérieures à l’inflation, soit 2 %, 3 % et 4 % sur trois ans, en plus de l’équivalent de l’Indice des prix à la consommation (IPC).

Québec offre plutôt 3 % la première année, et 1,5 % pour les quatre prochaines, pour un total de 9 % sur cinq ans.

À cela s’ajoutent 2,5 % sur cinq ans, « afin de répondre aux priorités gouvernementales », selon Mme LeBel. En récurrence, le gouvernement offre donc 11,5 % sur cinq ans, a-t-elle dit.

« Cette offre est à la hauteur de l’inflation prévue », a-t-elle plaidé.

De plus, le gouvernement offre une somme forfaitaire de 1000 $, la première année, « afin de reconnaître l’apport des personnes salariées à leur réseau ».

« Ainsi, l’offre gouvernementale pour les cinq prochaines années se chiffre à 13 % sur cinq ans », conclut Sonia LeBel.

Réelles améliorations sur le terrain ?

Mais ce n’est pas qu’une question de salaire, a-t-elle ajouté lors de sa conférence de presse, en insistant sur le fait qu’il faille revoir l’organisation du travail pour améliorer les services.

« Force est de constater que les investissements gouvernementaux majeurs que nous avons faits, particulièrement […] en santé et en éducation, n’ont pas eu sur le terrain les effets attendus », a-t-elle déploré.

Elle propose de mettre en place trois forums pour discuter du soutien à apporter aux équipes-écoles, ainsi qu’aux équipes de soins.

« La population, les élèves, les patients attendent toujours des résultats concrets, et je pense qu’il est temps de se questionner sérieusement sur ce qui ne fonctionne pas et pourquoi ça ne fonctionne pas. »

La dernière négociation, qui s’était déroulée au plus fort de la pandémie de la COVID-19, avait permis de réaliser des gains notables, parmi lesquels une reconnaissance des préposés aux bénéficiaires et un rattrapage salarial pour les enseignants. Les augmentations de salaire avaient aussi été plus marquées pour les plus bas salariés.

« La question fondamentale […], c’est pourquoi il est encore si difficile d’implanter des mesures qui sont convenues avec les syndicats, qui ont été signées ? » s’est demandé Mme LeBel.

Les syndicats réagissent

« Ça prend deux personnes pour danser le tango », a riposté le vice-président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), François Enault, en conférence de presse peu après.

Les syndicats regroupés en front commun, la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et la CSN, n’ont donc pas mis de temps à réagir en s’opposant aux propositions du gouvernement.

« Nos vis-à-vis devant nous [les gestionnaires] devraient passer moins de temps à infliger des mesures disciplinaires pour des toasts au “beurre de pinotte” et travailler sur les horaires avec nous. C’est bien beau de dire que cela ne s’est pas fait si les gestionnaires ne prennent pas le temps de le faire », a ajouté M. Enault.

Les problèmes de lourdeur de l’appareil ne relèvent pas d’eux, mais des cadres, a renchéri le président de l’APTS, Robert Comeau. La pandémie a bien démontré que les directives ne se rendaient pas sur le terrain, ont ajouté les leaders syndicaux.

La rémunération reste l’écueil principal dans ces négociations qui s’annoncent déjà difficiles. « Si on accepte [l’offre du gouvernement], c’est sûr qu’il y aura un appauvrissement de nos membres », a déploré le président de la FTQ, Daniel Boyer.

« Notre premier objectif est de revenir avec des clauses pour protéger le pouvoir d’achat », a-t-il poursuivi, en faisant ainsi référence à l’inflation qui est bien supérieure aux augmentations salariales proposées.

Enfin, le front commun s’oppose aussi vigoureusement à la mise en place de trois forums pour discuter de l’organisation du travail.

« Perte de temps », selon les leaders syndicaux. Selon eux, il existe déjà des tables sectorielles, mises en place pour les négociations, qui servent précisément à aborder ces questions.

S’il s’agit de demander plus de souplesse dans l’organisation du travail simplement pour en exiger davantage du personnel, c’est non, ont-ils soutenu.

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