Doug Ford appelé devant la Commission sur l’état d’urgence

Doug Ford fait appel aux tribunaux pour ne pas avoir à répondre aux questions sur sa gestion de la manifestation du Convoi de la liberté. Après avoir refusé l’invitation, le premier ministre de l’Ontario est maintenant assigné à comparaître devant la Commission sur l’état d’urgence à Ottawa.
« Le gouvernement [de l’Ontario] tentera d’obtenir une révision judiciaire pour mettre de côté l’assignation à comparaître sur la base que cette assignation est incohérente avec le privilège parlementaire [de M. Ford et de sa ministre Sylvia Jones] », explique l’attaché de presse du procureur général de l’Ontario dans un courriel au Devoir.
Une lettre datée de lundi et signée par une avocate de la commission confirme qu’une invitation à comparaître a été envoyée à Doug Ford et à une ministre de son gouvernement, Sylvia Jones, qui était solliciteuse générale de l’Ontario au moment du Convoi de la liberté.
« C’était notre espoir que le premier ministre Ford et la ministre Jones accepteraient de se présenter volontairement devant la Commission. Par contre, puisque toutes les invitations ont été refusées, la Commission a émis une assignation à comparaître aujourd’hui [lundi] », peut-on lire.
Absent d’Ottawa
Le premier ministre de l’Ontario ne s’est jamais présenté dans la ville de sa province deuxième en importance durant les trois semaines qu’a duré l’occupation du Convoi de la liberté, l’hiver dernier. Il aurait aussi décliné une invitation à se joindre à une importante réunion sur l’événement, a-t-on appris lors des audiences de la commission, la semaine dernière.
« Je crois qu’il y avait le sentiment dans la communauté [de se demander] : “pourquoi le premier ministre n’est pas là ?” » a critiqué le maire sortant d’Ottawa, Jim Watson, lors de son propre témoignage.
Selon M. Watson, le gouvernement ontarien doutait du bien-fondé des plans du Service de police d’Ottawa et de son chef, Peter Sloly. Mal préparée, épuisée, et en proie à un chaos interne qualifié d’« insurrection », la police municipale demandait des renforts policiers à hauteur de 1800 agents provinciaux et fédéraux.
Dans un appel entre le maire d’Ottawa et le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, ce dernier a laissé entendre que son homologue provincial se tenait volontairement à l’écart de toute implication dans cette crise. « Doug Ford s’est caché de ses responsabilités pour des raisons politiques », peut-on lire dans la transcription de l’appel publiée par la commission.
« Les gens d’Ottawa se sentaient comme si la province et le premier ministre [de l’Ontario] ne reconnaissaient pas le sérieux de la crise », a commenté lundi Paul Champ, l’avocat de citoyens et de commerces directement touchés par le Convoi de la liberté.
Plan partagé avec un consultant
Le chef adjoint de la police d’Ottawa durant le Convoi de la liberté était mal à l’aise de l’embauche de la firme privée de communications Navigator durant la crise, peut-on lire dans sa préentrevue avec les avocats de la commission.
« Le chef Sloly s’est lancé dans une discussion ouverte avec Navigator qui a généré des idées sur comment poursuivre des opérations policières, incluant comment l’opération est gérée et comment la communiquer au public », peut-on lire dans le résumé des propos de Steve Bell, désormais chef par intérim du service de police.
Ce dernier dit avoir « exprimé des inquiétudes » sur le fait de partager de l’information confidentielle avec Navigator. Même le maire d’Ottawa disait ne pas être mis au courant des plans opérationnels de la police.
Les audiences de la Commission Rouleau ont surtout démontré jusqu’ici l’importante dissension interne au sein de la police d’Ottawa, même dans le haut commandement, cause de la déroute d’une opération policière visant un groupe québécois d’opposants aux mesures sanitaires.
Des critiques de l’ex-chef Peter Sloly auraient par exemple préféré la négociation et la bonne entente avec les manifestants, même si ceux-ci ont finalement été visés par 533 accusations criminelles, incluant des accusations pour des crimes liés aux armes à feu et à des crimes violents.
Avec Étienne Lajoie