Une soixantaine de Québécois privés d’accès à la Russie

Des élus fédéraux de partout au pays sont visés, à commencer par le premier ministre Justin Trudeau et sa ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, mais aussi des élus de l’opposition.
Photo: Justin Tang La Presse canadienne Des élus fédéraux de partout au pays sont visés, à commencer par le premier ministre Justin Trudeau et sa ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, mais aussi des élus de l’opposition.

Œil pour œil, dent pour dent. La Russie a ajouté mardi près de 70 Québécois à sa « liste noire » de personnes interdites sur son territoire, parmi une liste d’élus fédéraux et de responsables gouvernementaux que le Kremlin accuse d’« attaques russophobes ».

Des politiciens libéraux d’avant-plan tels que le premier ministre Justin Trudeau, sa ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, ou encore l’ex-astronaute Marc Garneau sont visés par ces sanctions, mais aussi des élus de l’opposition comme le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, le député conservateur Alain Rayes ou encore Alexandre Boulerice, du Nouveau Parti démocratique.

Les sanctions économiques imposées par le Canada à l’endroit de ses entreprises, de ses dirigeants et de ses oligarques ont visiblement attisé la colère de Moscou, qui a répliqué férocement mardi en annonçant d’un seul coup des sanctions contre un total de 313 Canadiens, dont la plupart des députés de la Chambre des communes ainsi que des hauts fonctionnaires et des « personnalités antirusses ».


La liste publiée sur le site du ministère des Affaires étrangères de la Russie compte les noms d’au moins 67 Québécois, selon le décompte fait par Le Devoir. Y sont inclus les élus fédéraux Jacques Gourde, Dominique Vien, Gabriel Ste-Marie ou encore Alain Therrien, tout comme l’ensemble du caucus conservateur du Québec et la majorité de celui du Bloc québécois. On y retrouve en plus des députés libéraux qui n’ont pas de fonctions ministérielles, comme Yves Robillard, Emmanuel Dubourg ou encore Joël Lightbound.

Ce sont ainsi 86 % des élus fédéraux québécois qui se retrouvent interdits de visite en Russie. Plusieurs ministres québécois ne font toutefois pas partie de la liste. C’est le cas de Jean-Yves Duclos, de Marc Miller, de Diane Lebouthillier et de Steven Guilbeault, entre autres.

Des élus de partout au pays sont visés, comme le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, ou encore Elizabeth May, du Parti vert. Des représentants d’organismes, comme la présidente du Congrès ukrainien canadien, Natalie Jatskevych, sont aussi du lot. Toutes ces personnes se retrouvent interdites d’entrée en Russie jusqu’à nouvel ordre.

« Cette mesure est forcée et prise en réponse à l’hostilité scandaleuse du régime canadien actuel, qui a mis notre patience à l’épreuve pendant si longtemps », a indiqué le ministère dans un communiqué publié en langue russe, mardi.

Mélanie Joly n’a d’ailleurs pas été surprise par cette réplique de Moscou. « On s’y attendait », a-t-elle répondu mardi lors d’une mêlée de presse. « On ne va pas reculer. »

« Je remercie le président Poutine de me reconnaître comme un adversaire de son régime odieux », a déclaré le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, quand les journalistes lui ont appris qu’il était lui aussi visé par ces sanctions. « Je n’avais pas de plans de vacances en Russie. »

Si ces sanctions auront peu d’effets directs sur la plupart des élus ciblés, elles envoient toutefois un message clair à la population canadienne, selon le fondateur de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’UQAM, Charles-Philippe David. « Ça rallie encore plus l’opinion publique comme quoi on fait face à un ennemi », explique-t-il en entrevue au Devoir. 

Par ailleurs, « c’est par la bande qu’on est très affectés par ce conflit », car, au-delà de ces sanctions individuelles, la guerre en Ukraine a d’importantes « répercussions économiques », notamment en poussant le prix du pétrole à la hausse, rappelle-t-il.

Joe Biden ciblé

 

Dans un communiqué distinct, le ministère russe des Affaires étrangères a aussi annoncé mardi une série de sanctions « sans précédent » contre 13 élus et personnalités américaines, eux aussi interdits d’entrée en Russie. La liste comprend le président des États-Unis, Joe Biden, son secrétaire d’État, Antony Blinken, de même que l’ancienne candidate à la présidentielle américaine, Hillary Clinton. Le fils du président américain, Hunter Biden, est aussi concerné.

« Cette mesure, prise en contre-réaction, était une conséquence inévitable de la voie extrêmement russophobe prise par le gouvernement américain actuel, qui, dans une tentative désespérée de maintenir l’hégémonie américaine, s’est appuyé, au mépris de toute décence, sur l’endiguement frontal de la Russie », indique le communiqué, qui précise que cette liste de personnes sanctionnées pourrait s’allonger.

« Dans un avenir proche, de nouvelles annonces suivront pour élargir la liste des sanctions en incluant de hauts responsables américains, des responsables militaires, des législateurs, des hommes d’affaires, des experts et des journalistes qui sont russophobes ou qui contribuent à inciter à la haine envers la Russie et à l’introduction de mesures restrictives », peut-on lire.



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