Verre Pickl, une sandwicherie pas piquée des vers!

Le Verre Pickl' à Québec
Photo: Francis Vachon Le Devoir Le Verre Pickl' à Québec

L’équipe derrière Verre Pickl' avait un joli concept en main. Sandwicherie de jour, restaurant le soir, ambiance conviviale, ardoise spontanée, vins nature : tout avait été pensé. Jusqu’à ce que l’ouverture prévue en mars prenne une autre tournure…

« Naître » en pleine pandémie, voilà de quoi mettre une nouvelle adresse sur la carte. Il n’en reste pas moins qu’après le brouhaha, il faut savoir répondre à la curiosité et aux attentes sans cesse titillées. Celles de votre dévouée critique étaient grandes. Pour moi qui suis gourmande de nature, le sandwich est le summum d’un bon lunch. Ça peut sembler banal, mais pour qu’il ne soit pas aussi vite oublié qu’avalé, ça demande au minimum de la fraîcheur, de la texture et un bon pain légèrement croûté. Vous dire à quel point j’avais hâte d’aller voir de quel bois se chauffaient les créations de Verre Pickl’.

Des sandwichs et des guêpes

 

Deux parents qui font le travail buissonnier un jeudi midi pour aller boire et manger sur une terrasse, voilà certes un des atouts du télétravail ! Dès notre arrivée, la chaleur du soleil et l’accueil d’Alexandra Roméo, la copropriétaire, nous donnaient raison d’avoir osé l’escapade. Une place en terrasse nous attendait — tout comme des dizaines de guêpes, mais nous y reviendrons… À l’intérieur, le menu du jour disposé sur la grande table proposait mille et une directions à suivre sans pour autant s’égarer. Que ce soit en présentant sa vision des classiques, comme le club sandwich avec tomates confites, en faisant la part belle à l’été en jumelant mortadelle et ricotta citron-pistache dans une focaccia aux herbes ou encore en magnifiant les saveurs du Mexique, pays d’origine d’Alexandra, tous les plats offerts suivaient la ligne directrice d’une cuisine du marché. Connaissant les dernières tables où avaient officié Pierre-Alain Deschênes (Chez Saint-Pierre, Les Arrivages) et Jérôme Gilpin (Chaz, Initial, Toast !), qui complètent le trio de chefs copropriétaires, on n’en attendait pas moins.

Dans le menu à boire, de l’agua fresca, une eau aromatisée aux fruits frais, est sans doute la signature de la place. Celle du moment était aromatisée aux pêches de l’Ontario, à laquelle on aurait pu donner une twist de rhum ou de gin. Sur la table, quelques bières et une dizaine de bouteilles de vin défilaient pour nous. Si une des missions du restaurant est de mettre en valeur les vins nature et les importations, cela colle moins à l’idée d’une sandwicherie. Avec des bouteilles entre 60 et 85 $, l’accord mets et vin proposé, aussi bon puisse-t-il être, nous a laissés un peu perplexes. Fort heureusement, détonnait dans le lot un tempranillo de soif à 35 $ qui nous a ravis dans tous les sens du terme.

Photo: Francis Vachon Le Devoir Pour qu’un sandwich ne soit pas aussi vite oublié qu’avalé, ça demande un minimum de fraîcheur, de la texture et un bon pain légèrement croûté.

Ce vin, que nous venions à peine d’entamer, fut la cible d’une guêpe qui s’est noyée dans la bouteille — une parmi d’autres qui rendront le repas moins agréable, mais qui viendront confirmer le service attentionné et affable des proprios, qui œuvrent tant en salle qu’en cuisine. La bouteille fut changée illico et on vint vérifier au fil du repas si nous étions bien. On nous fait sentir comme de la visite dont on veut prendre soin, et c’est heureux.

Dans nos assiettes aussi, c’est fort heureux : BLT du Pickl’ avec galette d’œuf et cotechino, puis torta au porc braisé de la ferme Turlo garnie de crème fraîche, d’avocat, de salsa et d’oignons marinés — celui-là, juste à le décrire, je salive encore ! C’est archifrais, c’est réfléchi, c’est généreux. Il n’y a rien dans ces sandwichs qu’on aurait fait autrement ou qu’on aurait substitué par autre chose. Même le fromage cheddar jaune dans la torta qui fait sourciller nous a réjouis par son crémeux bien à lui. Les pains qui unissent tout ça proviennent de la boulangerie artisanale Chez Paul, à quelques coins de rue. Un choix délicieux et local.

Nous avons partagé le tout ainsi que les « sides » du jour, dont les coloris éclatés nous mettent en appétit. D’un côté, un guacamole très réussi avec un pico de gallo d’oignons rouges, de tomates et de piments qui prend son aise dans une purée d’avocat acidulée de jus de lime. C’est parfaitement équilibré, et sans doute un des meilleurs guacamoles que nous avons eu la chance de manger. La chip de blé soufflée qui l’accompagnait était néanmoins trop petite pour la si généreuse quantité de guacamole, que nous avons fini… à la cuillère ! Bonne deuxième, l’esquite, une salade de maïs mexicaine, rivalisait elle aussi de fraîcheur. Elle aurait toutefois profité d’un boost de lime. Mais c’était on ne peut plus de saison et c’était bon.

Pendant toute cette orgie de saveurs, les guêpes n’ont pas lâché prise, nous forçant même à accélérer la cadence et à déclarer forfait en demandant notre dessert pour emporter. Devant notre désarroi, notre hôte nous l’a offert « sur le bras de la maison ». Les guêpes, ce n’était pas leur faute, et le geste nous a fait plaisir. Être attentionné est une grande qualité. Encore plus en restauration. Des deux desserts du jour, c’est la mud pie au chocolat qui, à mon propre étonnement, l’a remporté devant le gâteau au fromage et aux fraises de l’île d’Orléans. Un élan de nostalgie des mud pies partagées durant les années d’université. Mais trêve d’anecdotes, celle de Verre Pickl’ respectait haut la main tous les critères d’une tarte du genre. Je n’ai simplement plus le bec sucré de ma vingtaine ! Tandis que je sacrifiais les dernières bouchées, j’en étais déjà à penser avec qui et quand je retournerais à cet endroit. Serait-ce en formule pique-nique avant l’automne ou pour essayer le menu du soir autour de l’unique grande table dans la salle à manger ? Dans tous les cas, il y aura une prochaine fois.


Légende

★ Je regrette de devoir vous en parler
★★ Pas mauvais, mais on n’est pas obligés de s’y précipiter
★★★ Bonne adresse
★★★★ Très bonne adresse
★★★★★ Adresse exceptionnelle pour la cuisine, le service et le décor

$ Le bonheur pour une vingtaine
$$ Une quarantaine par personne
$$$ Un billet rouge par personne
$$$$ Un billet brun par personne
$$$$$ Le bonheur n’a pas de prix

Verre Pickl’

★★★★

$
1314, avenue Maguire, Québec, 581 748-8750. Deux sandwichs et deux à-côtés, avant taxes et pourboire : 36 $.



À voir en vidéo