Belles casseroles indiennes

Même si Gandhi a grandi, le décor est resté aussi soigné qu’aux premiers jours.
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Même si Gandhi a grandi, le décor est resté aussi soigné qu’aux premiers jours.

Partout dans le monde, les restaurants situés dans les quartiers touristiques proposent des choses au mieux convenues, au pire immangeables, en tout temps hors de prix pour ce qui se trouve dans les assiettes. Le Vieux-Montréal est dans cette veine. Partout également dans ces quartiers, si l’on cherche un peu, on réussit à trouver de bonnes tables. Chez nous, Gandhi figure parmi ces dernières.

En juillet 2001, quelques mois après l’ouverture de ce restaurant rue Saint-Paul, Le Devoir publiait une critique de Gandhi intitulée « Montréal-sur-Gange » et plutôt élogieuse. Quinze ans plus tard, j’aurais pu reprendre le même titre en ajoutant « La suite ». Quinze ans plus tard, les éloges sont toujours là.

Service irréprochable

 

Au cours de cette période, Gandhi a évolué dans le bon sens, conservant ce qui faisait sa particularité, améliorant ce qui méritait de l’être. Parmi les bonnes choses figure la qualité de service, toujours irréprochable, accueillant, affable, attentif.

Dans ce coin de la ville fréquenté par de nombreux touristes américains ou autres ne-parlant-pas-français, on aurait pu s’attendre, comme ailleurs dans le quartier, à être servis dans la langue de Shakespeare.

Il n’en est rien et le français pratiqué par les serveurs de Gandhi est louable. On sent une pointe de québécois attestant une enfance passée dans les cours d’école de la métropole et, dans la bouche de ces jeunes gens dont les parents sont venus du sous-continent indien, les tics de langage locaux ont quelque chose de touchant. Qui adopte la langue de son pays d’accueil fait partie intégrante de ce pays-là.

La cuisine, elle non plus, n’a pas bougé d’un iota. Le menu, assez convenu pour qui aime les grandes envolées de la cuisine indienne, est composé de façon à plaire au plus large public possible. Presque tous les plats peuvent être réglés à des intensités variables et les cuisiniers se montrent accommodants avec les papilles plus sensibles.

Une valse odoriférante

 

Biryanis, spécialités de tandooris et de caris ; poulet, boeuf, agneau ou crevettes arrivent chargés de ces épices si goûteuses que cette cuisine crée un état de dépendance difficile à soigner. Dès le seuil de la porte, on est entraîné dans la valse odoriférante du curcuma, de la cannelle, de la cardamome, du cumin, du fenugrec et du clou de girofle.

Dans la salle, portés par des serveurs en uniformes soignés, de petits woks passent en grésillant et pour peu que l’on n’ait pas arrêté son choix sur un plat en particulier, l’hésitation commence.

C’est ici qu’entre en scène Monsieur Faruk (prononcez Farouk) Ahmed. Ce diable de petit Bangladais connaît le menu de fond en comble et possède le don de poser les bonnes questions à chaque client, afin de recommander le plat le plus à même de contribuer au bonheur du visiteur.

Deux saints

 

Il y a 15 ans, le très pure-laine propriétaire de Gandhi avait nommé Faruk responsable des opérations. Au fil des ans, ce dernier s’est si bien acquitté de ses tâches que, au moment de prendre sa retraite, ledit propriétaire lui a vendu le restaurant.

Faruk s’est acheté des costards à faire frémir d’envie ou d’autre chose tous les propriétaires de restaurant et a conservé son sourire avenant et son extrême amabilité avec tout le monde, clients et employés confondus.

Parmi les choses qui ont changé pour le mieux, ce doublement de superficie, par exemple, permet d’accueillir davantage de clients. La nouvelle grande salle fait le coin des rues Saint-Paul et Saint-Nicolas, deux saints bien connus pour leur solide coup de fourchette. Avec des alliés pareils, on comprend pourquoi cette nouvelle salle est baignée d’une lumière quasi mystique. Ou alors, c’est la protection du mahatma.

Même si le restaurant a grandi, le décor est resté aussi soigné qu’aux premiers jours, avec nappes et serviettes de coton blanc et autres petits détails qui mettent ce restaurant dans une classe à part.

L’ajout de deux bières indiennes servies à la pression améliore encore l’expérience. Il y a 15 ans, Gandhi était le premier restaurant indien à proposer une carte des vins digne de ce nom. On y trouve encore quelques bouteilles affriolantes.

Plus expert que moi en la matière, mon éminent collègue Jean Aubry dit ceci : « Bon, cette carte ne renouvelle pas le genre en étant un chouïa commerciale, mais elle a le mérite d’être proposée à des prix fort corrects tout en plaisant à une majorité de clients. »

 

Gandhi

230, rue Saint-Paul Ouest
Montréal ☎ 514 845-5866

Ouvert midi et soir du lundi au vendredi et en soirée seulement les samedi et dimanche. Table d’hôte du midi à partir de 17 $. Le soir, comptez une quarantaine de dollars par personne pour un festin exotique.

Légendes

★ Je regrette de devoir vous en parler
★★ Pas mauvais, mais on n’est pas obligés de s’y précipiter
★★★ Bonne adresse
★★★★ Très bonne adresse
★★★★★ Adresse exceptionnelle pour la cuisine, le service et le décor

$ Le bonheur pour une vingtaine
$$ Une quarantaine par personne
$$$ Un billet rouge par personne
$$$$ Un billet brun par personne
$$$$$ Le bonheur n’a pas de prix

Gandhi

★★★ 1/2

230, rue Saint-Paul Ouest, Montréal, 514 845-5866, $$

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