Bloc-notes gourmand (spécial alcools du Québec)

Maryse Deraîche
Cahier Plaisirs

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Le printemps est à nos portes : on est revenus à l’heure normale, les érables coulent à flots et le thermomètre grimpe enfin au-dessus de zéro. Bonheur ! Cela est aussi annonciateur de l’arrivée de nouveaux alcools sur les tablettes. Cette semaine, le Bloc-notes gourmand accorde toute la place à quelques-unes de ces nouveautés désaltérantes, et québécoises.

De main de Maître

 

La Chaufferie, cette distillerie située en bordure de la rivière Yamaska à Granby, propose depuis peu et en édition très limitée la nouvelle eau-de-vie de prune Maître Pierre. Nommé en l’honneur de Pierre Jodoin, un ancien avocat possédant désormais une exploitation agricole basée à Saint-Paul-d’Abbotsford, le spiritueux est produit à partir de la variété de prunes se trouvant sur ses terres : la Mont-Royal.

« Les prunes utilisées pour la production de Maître Pierre sont très mûres, dit Claudia Doyon, gestionnaire de marque de la distillerie. On récupère les fruits, on évite le gaspillage. La distillerie possède des valeurs écoresponsables, d’agriculture locale et circulaire. C’est nécessaire pour préserver les traditions et le savoir-faire. »

Selon Mme Doyon, Vincent Van Horn, le maître distillateur de La Chaufferie, est spécialisé dans les eaux-de-vie. C’est probablement pour cette raison que Maître Pierre recèle une palette aromatique variée et intense. Au nez, le produit est vif et fruité. La pelure des prunes mûres lui confère des tanins riches et une fraîcheur oléagineuse. En bouche, c’est l’explosion ! La dégustation se fait en trois étapes. La première révèle la force traditionnelle de l’eau-de-vie, celle-ci contenant 40,4 % d’alcool. La deuxième provoque un chatouillement des papilles situées sur le bout de la langue, dû au sucre contenu dans le fruit. Celles situées sur les côtés sont également sollicitées étant donné l’acidité de la prune Mont-Royal. Finalement, c’est la texture grasse et onctueuse du spiritueux qui termine cette gorgée en tapissant le palais et les parois de la bouche. Un produit fièrement étiqueté « Origine Québec ».

Maître Pierre, 35 $ pour 375 ml, offert à la distillerie La Chaufferie et sur leur boutique en ligne.

Amer à souhait !

Les amers, mieux connus sous leur nom anglais de bitters, ne sont pas des alcools en soi, mais ils rehaussent ceux-ci. En plus de s’occuper de la gestion de marque de La Chaufferie, Claudia Doyon est mixologue. Reconnue pour son utilisation des produits boréaux et son désir de voir naître une mixologie 100 % locale au Québec, elle s’est associée à Vincent Van Horn, distillateur en chef de La Chaufferie, afin de créer l’entreprise Amer Kebek. Leur collection d’amers est conçue à partir de la macération d’alcool de grains du Québec et d’une variété de produits d’ici : fleurs, champignons sauvages, arbres fruitiers… En tout, cinq amers sont proposés : l’Aromatik, le Noix de noyer, le Fleurs, le Forêt et le Champignons sauvages. « Ce sont des rehausseurs de saveurs, explique Mme Doyon. Cela ajoute un côté aromatisé aux cocktails et, parfois, une seule goutte vient changer toute la dynamique. » La mixologue précise qu’il est aussi possible de les utiliser en cuisine, mais qu’il faut avoir une bonne compréhension des saveurs et des arômes pour faire les bons mélanges. Êtes-vous de ceux-là ?

Entre 16 $ et 22 $ l’unité, ou 80 $ pour le coffret de quatre amers

Du soleil en verre

 

Lorsque Lilian Wolfelsberger, le bouilleur de cru de la Distillerie de Montréal, a créé son rhum aromatisé à l’ananas, il ne s’imaginait pas que celui-ci deviendrait un des produits phares de la gamme. Le rhum aux parfums des Caraïbes est le fruit de la distillation et de la macération d’ananas provenant du Costa Rica. « On a utilisé 250 ananas pour créer le premier lot et, en toute franchise, je suis un grand fan d’ananas. Quand je commence, je suis incapable de m’arrêter ! » lance en riant Lilian Wolfelsberger, qui précise que la recette de ce rhum provient d’un vieux livre de recettes de 1857.

À ces délicieux fruits, le bouilleur de cru a ajouté un soupçon de caramel maison ainsi qu’un concentré de matricaire odorante. Pour ceux et celles qui se poseraient la question, la matricaire odorante est une plante qui figure dans le Guide d’identification des mauvaises herbes du Québec. Largement sous-estimée, elle était auparavant utilisée pour soulager les douleurs menstruelles, d’où son nom botanique « Matricaria », qui vient de « matrix » (femelle, matrice, utérus). À ce point, vous vous demandez sûrement pourquoi Lilian Wolfelsberger a ajouté une « mauvaise herbe » servant à réduire les crampes menstruelles à son rhum. Pour la bonne raison qu’elle dégage un doux parfum d’ananas. « J’ai eu ce tuyau par le mixologue de renom André Duncan, qui a été le premier à mettre notre rhum blanc à l’honneur en le mélangeant avec de la matricaire, explique M. Wolfelsberger. Il se trouve que cette plante partage quelques molécules avec l’ananas. On en a produit un concentré qu’on a ajouté à notre rhum, et on s’est rendu compte que ça lui donnait une pointe herbacée complètement capotée, entre l’ananas et la camomille, c’était vraiment plaisant pour le palais. À ce moment, on a su qu’on tenait quelque chose d’unique entre les mains ! »

40 $, à la SAQ

Mentholée, mais pas menteuse !

La Mentherie, la nouvelle crème de menthe de la distillerie Les Spiritueux Ungava, est d’un raffinement à la hauteur de la menthe fraîche et du petit thé des bois du Québec qui la composent. Le digestif arbore une belle robe de couleur émeraude intense qui se laisse admirer à travers la bouteille de verre transparent ornée d’une étiquette blanc et vert aux reflets métallisés. Ce célèbre spiritueux est entré dans les bars — et le cœur — des Québécois il y a belle lurette, d’où son nom, qui évoque une langue populaire encore appréciée aujourd’hui. La Mentherie est produite de façon artisanale à partir d’une herbe typique des forêts boréales québécoises, le petit thé des bois. Celui-ci confère à la liqueur une saveur unique, légèrement poivrée, et bien loin de la « paparmane » d’autrefois. Aussi surprenant que cela puisse paraître, la menthe fait son entrée en second lieu sur la langue. L’alcool est délicat, pur et il se déguste aussi bien sur glace comme digestif qu’en cocktail. Les gens de la distillerie nous proposent ici un produit d’une élégance digne des plus chics soirées.

35,25 $, à la SAQ

Écoresponsable sans compromis

 

Après deux ans de travail, Fou Gin fait son entrée sur le marché des spiritueux québécois. Fondée par Sébastien Cliche-Roy, la marque se targue d’être un peu folle et d’avoir créé un gin pour les gens un peu fous également. À l’arrière de la bouteille, on peut d’ailleurs lire ceci : « À ceux qui se lèvent le matin pour changer les choses. À ceux qui osent créer différemment. À ceux qui exhibent fièrement leur expression la plus pure. Ode aux créatifs. Ode à ceux qui lâchent leur fou. Engagé. Authentique. Un peu fou. » Venu du monde du marketing et de l’entrepreneuriat, M. Cliche-Roy s’adresse à une clientèle jeune et « de son époque ». La vision des Spiritueux SCR, entreprise basée à Sorel-Tracy, consiste à changer les standards et à créer un précédent par l’utilisation de matériaux plus écoresponsables dans leur production. Leur bouteille, faite à 100 % de verre recyclé, est d’ailleurs un élément central de leur message.

Outre le crémage, le gin est très intéressant. Treize herbes aromatiques ont été macérées puis distillées afin de produire un spiritueux qui présente des arômes de concombre et des notes franches de genièvre. Le chrysanthème, le myrique baumier, la camomille et quelques autres aromates québécois, comme le houblon citronné, engendrent un assemblage complexe et tout en douceur. On se rapproche d’une conception écossaise où la bouche est pleine et la finale, moelleuse. Un gin parfaitement équilibré qui dévoile de subtiles notes florales, à déguster sur glace ou en martini.

46 $, à la SAQ

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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