Meik Wiking et l’art du «hygge» en temps de confinement

Charlotte Mercille
Collaboration spéciale
Selon l'auteur Meik Wiking, la clé du bonheur réside essentiellement dans l’entraide et le développement de nos réseaux.
Photo: Institut de recherche sur le bonheur Selon l'auteur Meik Wiking, la clé du bonheur réside essentiellement dans l’entraide et le développement de nos réseaux.

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Le mot danois hygge (prononcé hou-ga) incarne un art de vivre réconfortant et intime pratiqué par un nombre grandissant d’adeptes à travers le monde. Meik Wiking, auteur du Livre du Hygge. Mieux vivre, la méthode danoise et président de l’Institut de recherche sur le bonheur à Copenhague, nous donne des pistes pour goûter au bonheur, même au coeur d’une pandémie.


 

Comment le hygge peut-il nous aider à traverser le contexte difficile du confinement ?

Durant la pandémie, l’intérêt pour le hygge s’est renouvelé. Cette notion évoque souvent à la « parfaite soirée chez soi ». Alors que nous devons passer beaucoup plus de temps à l’intérieur, on peut le pratiquer dans l’optique de tirer le meilleur parti des conditions dans lesquelles nous vivons. Les Danois le voient comme une « stratégie de survie » pour l’hiver, lorsque les jours deviennent plus courts et plus sombres. Cet état d’esprit a été et continue d’être une façon de se réconforter, de se retrouver et de se détendre à travers les épreuves engendrées par la pandémie.

 

Comment pouvons-nous incorporer plus de hygge dans un quotidien chamboulé ?

On peut choisir de voir l’obligation de rester à la maison comme une occasion de passer plus de temps avec nos proches et de créer un environnement qui favorise la relaxation, le sentiment de sécurité et l’égalité. Les temps que nous traversons sont difficiles, mais de ceux-ci émergent toujours des choses pour lesquelles nous pouvons éprouver de la reconnaissance. Concentrons-nous sur celles-ci.

Quelles astuces proposez-vous aux Québécois qui vivent aussi dans un climat froid, comme le Danemark ?

Tout le monde peut savourer les moments empreints de simplicité qui constituent l’essence du hygge. Il suffit de profiter de ce que nous avons en abondance présentement : les rituels quotidiens. Quelques suggestions : enfiler des vêtements chauds et aller marcher dans la nature en bonne compagnie ; créer une atmosphère relaxante et confortable dans laquelle passer du temps de qualité avec soi-même, nos colocataires, notre partenaire ou notre famille ; cuisiner et savourer des plats délicieux, ou encore s’offrir une gâterie. La clé du bonheur réside essentiellement dans l’entraide et le développement de nos réseaux.

Quels changements importants voyez-vous dans les dernières collectes d’information de l’Institut ?

Dans notre plus récente étude, nous avons constaté qu’à mesure que les cas de COVID-19 ont augmenté, les répondants se sentaient plus anxieux. Ils s’ennuyaient plus et se sentaient moins fiers, détendus et heureux. Les jeunes, les célibataires et les personnes n’occupant pas d’emploi souffrent davantage de solitude, tandis que les personnes qui continuent de travailler et qui ont un partenaire stable sont celles qui ont le moins ressenti d’isolement. La cohabitation ne protège pas toujours contre la solitude. Les personnes célibataires vivant avec plus de trois personnes se sentaient plus seules que celles vivant en solo. La méditation, les appels avec les proches et le plein air se révèlent les activités clés pour apaiser la solitude. Enfin, le degré d’inquiétude d’une personne est directement lié au choix des médias consultés pour s’informer sur la pandémie.

 

Quelles activités vous aident à cultiver le bonheur ?

Personnellement, je passe plus de temps aux fourneaux ces derniers temps. La cuisine me rappelle l’époque où je pouvais retrouver mes amis à l’occasion de notre « club souper » avant la pandémie. Tout le monde apportait des ingrédients et nous préparions la nourriture ensemble. De cette façon, l’hôte ne se retrouvait pas encombré par l’ensemble des tâches. Nous trouvions un thème (mexicain, canard ou saucisses) pour chaque repas. Certains plats se sont avérés complètement infects, mais leur création nous a procuré énormément de plaisir. Nous ne pouvons pas nous revoir actuellement, mais je chéris ces souvenirs en peaufinant mes recettes.

Comment la pandémie influe-t-elle sur le travail de l’Institut de recherche sur le bonheur ?

L’Institut a lancé une étude en avril 2020 pour mieux comprendre les effets de la pandémie sur notre bonheur et étudier certaines pistes pour cultiver le bien-être dans ce contexte particulier. Cette étude nous a permis d’analyser les conséquences de la pandémie sur la santé mentale et de faire des recommandations pour protéger la population de ces effets néfastes. Dans notre plus récente publication, nous présentons un plan d’action quotidien qui favorise le bonheur malgré l’isolement :

  • Passer plus de temps dehors : 15 minutes par jour suffisent pour amplifier l’impression d’être satisfait de notre vie.
  • Plonger dans l’art, l’artisanat et les projets de type « DIY » : travailler avec ses mains ne demande pas nécessairement de contact physique avec les autres.
  • Méditer : pour aborder les défis avec ouverture, acceptation et curiosité.
  • Donner un coup de main à nos proches : faciliter la vie des autres a un effet bien réel et positif sur notre bien-être individuel.
  • Garder contact avec nos proches : même virtuelles, les rencontres augmentent le sentiment de bien-être.
  • Bouger : l’exercice est crucial pour le maintien de la santé physique et mentale.
 

Pensez-vous qu’il est plus difficile d’être heureux actuellement ?

Les défis sont certainement plus nombreux en temps de pandémie. On a tendance à s’inquiéter davantage de notre santé, de notre sécurité d’emploi, de l’économie, de la solitude, etc. Ce stress ajouté peut altérer notre bien-être. C’est là que réside toute l’importance de prendre soin de soi et de nos proches durant ces temps incertains dans le but de protéger à la fois notre santé et notre bonheur. De nombreuses personnes sont actuellement séparées de leur famille et de leurs amis et peuvent, par conséquent, se sentir plus seules qu’en temps normal. Malgré l’éloignement physique, nous pouvons demeurer ensemble, notamment grâce à la technologie. Que ce soit en participant à une classe de sport virtuelle, en organisant une soirée quiz en ligne avec des amis ou en partageant un repas par Zoom, nourrir l’intention de se rapprocher des autres peut s’avérer aussi bénéfique que des échanges sociaux assidus. C’est aussi une occasion d’avoir plus de temps pour soi, de pratiquer un nouveau loisir, de reprendre une activité que nous avions délaissée par manque de temps, de rattraper le temps perdu avec d’anciennes relations. La clé réside dans l’entraide et le développement de nos réseaux.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.

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