Un frein indu à la relève infirmière

J’ai obtenu mon diplôme d’études collégiales (DEC) en soins infirmiers en mai 2022 après des années d’efforts acharnés. J’ai réussi tous mes stages, mes examens et mon examen de synthèse de programme, à la fin de mon DEC, qui englobait tous les acquis du parcours attendus d’une étudiante en soins infirmiers.
En septembre 2022, j’ai fait l’examen de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) pour la première fois, pour apprendre, après des semaines d’attente interminable, que je ne l’avais pas réussi, et ce, à 1 % de la note de passage fixée à 55 %. Mon monde s’est écroulé et je savais que je méritais de passer cet examen.
Il est important de savoir qu’en tant que candidate à l’exercice de la profession infirmière (CEPI) et qu’avec le manque d’infirmières et la réalité du terrain, nous avons les mêmes tâches que les infirmières, à quelques exceptions près. Nous avons toujours des infirmières, nos collègues, à qui nous pouvons nous adresser pour des questions, car il s’agit d’une profession où les acquis se font au quotidien.
Plusieurs fois par jour, j’ai de très bons commentaires de patients me remerciant d’être leur « infirmière ». Je n’ai jamais compromis la sécurité d’un patient, car la sécurité est prioritaire pour moi. Mes collègues sont du même avis. Et les commentaires du président de l’OIIQ, Luc Mathieu, qui dit que les CEPI ne sont pas assez prêtes pour l’examen et qu’il y a donc un risque de préjudices pour la protection du public m’atteignent au plus haut point, car jamais je ne compromettrais la sécurité d’un patient.
Je suis passionnée par le métier d’infirmière et je fais présentement mon baccalauréat en sciences infirmières pour aller chercher des connaissances supplémentaires. Mes notes sont excellentes.
Ainsi, j’ai tenté pour la deuxième fois l’examen de l’OIIQ. Cette fois-ci, j’avais bon espoir de réussir l’examen. J’étais mieux préparée, entre autres grâce à mon expérience d’un an en tant que CEPI. Aujourd’hui, je reçois toutefois un courriel m’annonçant que mon résultat pour ma deuxième tentative est disponible. J’attends en file d’attente, la boule au ventre, pour être déçue une fois de plus. Aujourd’hui, je suis à nouveau à 1 % de réussir l’examen le plus important de ma vie. J’ai obtenu 54 %, encore 1 % sous la note de passage. Je suis anéantie, déçue.
Mes collègues et mes supérieurs étaient persuadés que j’allais réussir en raison des compétences que je démontre sur le plancher.
Je ne peux pas comprendre comment, et surtout à quel point, la relève infirmière peut être freinée ainsi. Nous connaissons les conditions de travail du réseau de la santé et la réalité de la profession infirmière et des milieux, mais cela ne nous empêche pas de vouloir poursuivre notre carrière et tout donner, de sourire aux patients et d’en prendre soin, car nous sommes passionnés par ce métier.
Ce qui me paraît encore plus choquant, c’est que dans le rapport du commissaire à l’admission aux professions, qui a été dévoilé dernièrement, il a été prouvé que l’examen de l’OIIQ comporte des failles et que des CEPI ont été recalées inutilement. De plus, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a insisté pour rappeler qu’avec le contexte actuel, nous ne pouvons pas nous permettre de perdre 500 infirmières. Parmi les CEPI, plusieurs penseront sans doute à changer de profession, en plus de celles qui en sont à leur troisième, et dernier, échec.
J’ai, une fois de plus, honte de mon ordre professionnel aujourd’hui. Cette honte a, de plus, un goût très amer.