L’accès à l’art, un outil de justice sociale

« La plus grande richesse, c’est entre les deux oreilles. » Voilà une phrase que mes parents m’ont souvent répétée au cours de ma jeunesse. Maintenant adulte et maman d’une jeune fille de sept ans, je comprends tout le sens de cet héritage familial. La richesse culturelle est déterminante dans la vie d’un être humain.
L’accès à l’art est un combat qui m’a toujours animée. Rapidement, j’ai réalisé que cette richesse culturelle que j’ai eu la chance de développer au fil des années me donne des outils fantastiques, qui ne sont malheureusement pas accessibles à tous, malgré le fait que nous vivions dans un pays développé et doté de mécanismes sociaux protecteurs.
Ce que j’ai constaté au fil des années, c’est que l’art n’est pas accessible équitablement dans toutes les sphères de la société. Je crois que nous avons un devoir de rendre l’art accessible, dans un souci de justice sociale. Chaque enfant devrait avoir accès à toute la culture possible ; que ce soit la musique, le théâtre, la danse, la peinture ; peu importe la forme d’expression. Au-delà de la pratique artistique, ce qui est important, c’est surtout d’apprendre aux enfants à apprécier l’art et à profiter de tous les bénéfices qu’ils peuvent en retirer à son contact.
Un citoyen cultivé est curieux intellectuellement et est doté de ressources qui lui permettent de critiquer le monde qui l’entoure. Son discours est varié ; il mène à l’échange et au partage. Il est mieux outillé pour exprimer ses opinions et faire face aux aléas de la vie.
L’accès à la culture n’est malheureusement pas le même pour tout le monde, dans notre société où on la considère trop souvent comme un simple divertissement, et où l’on privilégie les formes d’art qui sont lucratives. Même si je considère que le Québec est présentement doté d’une structure gouvernementale inclusive sur le plan culturel, il s’est installé au fil des décennies une sorte de centrifugeuse culturelle au sein de notre société qui ne permet pas un accès équitable à la culture pour tous.
L’accès à l’art est de plus en plus limité dans nos médias, qui se concentrent surtout sur ce qui est considéré comme populaire. C’est là où l’effet de centrifugeuse culturelle se fait sentir ; moins la population est exposée à une culture générale variée, plus elle se concentre vers ce qui est populaire et accessible facilement, rapidement et sans trop se poser de questions.
Aujourd’hui, on est plus intéressé par le processus que par le produit final, parce que le fruit de plusieurs années de labeur et de recherche en art est de moins en moins exposé. On préfère l’éviter, et on se tourne vers une culture qui s’apparente à de la restauration rapide. Devant cet égarement, on qualifie certaines formes artistiques d’élitistes et d’inaccessibles. Un grand mur se construit, tranquillement, entre les humains et leur histoire culturelle.
On croit alors qu’il faut éduquer le public et démocratiser cet art qui nous semble inaccessible. Rien de tout cela n’est nécessaire. Il faut en faciliter l’accès, simplement. L’art doit être présent à la télé, à la radio, mais aussi dans nos écoles, nos centres jeunesse, nos centres communautaires. L’art doit être là où les gens sont ; il appartient à tous, c’est ce qui le définit en lui-même.
L’intention de base de cette grande culture artistique millénaire reste la même : toucher les humains et les connecter entre eux. C’est ce que je souhaite que nous puissions donner à nos enfants aujourd’hui ; ce coffre d’outils magique qui leur permettra de devenir des adultes épanouis, engagés et heureux.