Des gardes du corps… pas pour le PCQ

«Ce qui est sûr, c’est que la population a droit à une campagne juste et respectueuse», souligne l’autrice. Des pancartes électorales à Montréal à l’occasion des élections provinciales de 2022.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir «Ce qui est sûr, c’est que la population a droit à une campagne juste et respectueuse», souligne l’autrice. Des pancartes électorales à Montréal à l’occasion des élections provinciales de 2022.

Durant les derniers jours, on a assisté à divers comportements dangereux (intimidation, harcèlement, violence verbale, menaces de mort…) envers les chefs de divers partis politiques, des bénévoles installant des pancartes électorales, de nouveaux candidats se présentant aux prochaines élections provinciales, des députés fédéraux… Le climat politique change à ce point au Québec et au Canada que la sécurité des politiciens a dû être renforcée : on multiplie les gardes du corps, la visibilité des policiers lors de rassemblements partisans s’est accrue, on propose aux chefs de parti de porter des gilets pare-balles, et quoi encore… Un peu plus, on se croirait de l’autre côté de la frontière, chez nos voisins du Sud, habitués à de telles bassesses devenues monnaie courante et qui fragilisent d’autant la démocratie.

De surcroît, même les stratégies de campagne électorale n’échappent pas à des intentions vicieuses et réactionnelles, qui s’apparentent à de la pure vengeance impulsive, beaucoup plus insidieuse, chacun y allant de déplacements qui « punissent » les adversaires d’avoir piétiné leur fief la veille… Ne viens pas sur mon territoire et ne marche pas dans mes plates-bandes ou je sors mes gros canons ! Plutôt puérile et « enfant de cour d’école » comme démarche de campagne… Nos élus auront-ils tous bientôt un toupet orange ?

Dans le cadre de la présente campagne électorale provinciale, tous les chefs de parti s’accordent pour dire que cette augmentation des menaces envers les élus est inacceptable et inquiétante. Tous réclament davantage de protection. Tous, sauf un. Le seul qui semble ne pas se sentir concerné par cette nouvelle réalité à l’américaine est le chef du PCQ, Éric Duhaime, qui a en effet déclaré : « Si la Sûreté du Québec juge que je n’ai pas besoin d’avoir de protection, c’est probablement parce que ma sécurité n’est pas menacée » et « Nous, on n’a pas besoin de gardes du corps parce que le peuple est avec nous ».

En suivant ce raisonnement pour le moins simpliste, faut-il donc comprendre que les attaques envers les autres partis proviendraient des militants du PCQ ? Ce « peuple » qui appuie le PCQ est-il à ce point déconnecté et mû par des idées d’extrême droite ultra-individualistes qu’il se prêterait à la même servilité aveugle que ces innocents Américains nous ont fièrement exposé le 6 janvier 2021 au Capitole ? Et, plus près de nous, lors des frasques des manifestants à Ottawa en janvier 2022 ? La question se pose…

Ce qui est sûr, c’est que la population a droit à une campagne juste et respectueuse, et non pas à une joute du roi de la montagne que les enfants de cinq ans se plaisent à se disputer sur une butte de neige. Ne pas la lui offrir signifie qu’on estime que les Québécois n’ont ni l’intelligence ni la capacité de réflexion suffisante pour juger quel parti présente les idées et les projets les plus profitables pour leur assurer un avenir à la hauteur de leurs aspirations. Des débats d’idées et du contenu, svp ! À ce jour, ils sont camouflés sous d’épaisses couches de peinture. Si vous ne savez pas de quoi je parle, retournez dans vos livres d’histoire et regardez un peu en arrière. Vous apercevrez certainement des Lévesque et Trudeau nous offrant quelque chose de bien différent, élevant les esprits et enflammant les discussions autour des tablées le dimanche, peu importe notre allégeance politique. Poursuivre la campagne sur sa lancée violente, menaçante et vide de contenu signifiera qu’on bafoue de plus en plus sérieusement nos institutions démocratiques et qu’on aura dorénavant comme seul leitmotiv : « Gloire aux libertés individuelles, les droits collectifs et la démocratie peuvent aller se rhabiller »

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