Rien ne va plus en éducation

Le Rendez-vous de la réussite éducative organisé par le ministère de l’Éducation n’a pas créé l’engouement attendu. Il a même été qualifié, par certains groupes, de mascarade pour tenter de hausser la popularité du ministre qui défaille. Bref, il semble que la confiance soit grandement ébranlée.
On se demande s’il y aura une réelle écoute des intervenants invités à ces tables où l’on a abordé des thèmes cruciaux, entre autres la santé mentale et le bien-être à l’école. La décision de tenir ces consultations à huis clos est fort étonnante d’ailleurs, les débats d’idées publics constituant un moyen sain d’entendre une diversité de points de vue sur un sujet aussi important que la réussite éducative. Ce qui est tout aussi surprenant, c’est que, parmi une multitude d’associations invitées, il semble que peu de chercheurs en sciences de l’éducation aient été présents. S’ils y étaient, ils ont été très discrets. L’objectif consistait à s’entendre sur une vision commune pour assurer la persévérance et la réussite des élèves afin d’élaborer un plan d’action. Leur participation n’aurait-elle pas enrichi davantage les réflexions ?
Je ne suis pas pessimiste de nature mais, malheureusement, les constats sont faits et rien ne va plus en éducation. La pandémie actuelle n’a fait qu’exacerber les maux d’un système qui était placé sous un respirateur artificiel depuis des décennies à la suite d’une maltraitance constante de la part de la classe politique. Les conséquences de cette gestion entrepreneuriale à coups de coupes budgétaires n’ont fait qu’aggraver graduellement la souffrance des élèves, des enseignants et des intervenants scolaires tout en dégradant les conditions d’exercice des professions en éducation. L’école est devenue un bien de consommation, au grand détriment de la collectivité.
Rien ne va plus en éducation parce qu’à force de focaliser uniquement sur les besoins des élèves, on met une pression constante sur les acteurs du système. Les décisions s’appuient souvent sur leur capacité d’adaptation et de faire tout avec rien dans un contexte de ressources déficientes qui contribue à leur épuisement psychologique.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que le bien-être des élèves est tributaire d’une bonne santé mentale chez les enseignants et les intervenants scolaires. Pour tenter d’exercer un contrepoids à cette situation alarmante, on croit qu’intégrer le concept de bien-être dans les politiques éducatives pourrait être la panacée. C’est un leurre. Actuellement, on compte sur les doigts d’une main les chercheurs québécois comme moi qui se penchent spécifiquement sur le phénomène du bien-être en éducation.
Mettre en place un plan d’action pour favoriser le bien-être à l’école ne se règle pas seulement à l’aide d’une démarche par problème de laquelle ressortent des solutions alimentées par l’expérience du terrain. Les données scientifiques sont essentielles pour bien comprendre la complexité de ce concept afin d’entreprendre des interventions efficaces dans les écoles auprès du personnel et des élèves. Il faut amorcer un changement de culture institutionnelle axé sur une vision plus humaniste par l’entremise d’une réelle volonté de concertation dans les milieux où le bien-être est une préoccupation constante et quotidienne. Mais pour y arriver, il faut avant tout que nous valorisions et reconnaissions l’apport indispensable des professions de l’éducation dans notre société. Les valoriser et les reconnaître, c’est, entre autres, mettre en place les conditions de travail qui protègent leur santé mentale et leur bien-être afin qu’ils puissent exercer leur expertise. C’est rendre ces professions attrayantes pour la relève. C’est s’engager socialement dans une démarche où l’éducation est notre réelle priorité.