Investir dans l’avenir: une affaire de confiance

En 2014, le taux d’obtention d’un diplôme du secondaire en moins de cinq ans atteignait 84 % en Ontario et 67 % au Québec. Pour l’Ontario, il s’agit d’une progression de 16 % par rapport à 2004. Toutes proportions gardées, l’écart représente plus de 10 000 jeunes que nous n’arrivons pas à diplômer en moins de cinq ans.

Par conséquent, tous les acteurs de l’éducation regardent de près le modèle ontarien et se demandent quelles sont les composantes de ce modèle et comment implanter le même genre de transformation au Québec. Malheureusement, le premier pilier permettant de mettre en place ce type de changement est la confiance dans l’avenir et la volonté ferme de viser l’excellence du système d’éducation et le développement optimal des jeunes, de tous les jeunes, principes qui ne guident visiblement pas le Conseil du trésor et le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

L’exemple de l’Ontario

Lorsque j’ai confiance dans une entreprise ou dans une affaire, je n’hésite pas à y investir les ressources nécessaires. Le postulat est toujours le même : les bénéfices (de tous ordres) à tirer de cet investissement seront plus élevés que les coûts (aussi de tous ordres). Ainsi, lorsque l’on croit vraiment en l’avenir d’une entreprise, on n’hésite pas à y mettre ses économies, à investir sur marge de crédit ou encore à hypothéquer sa maison, toujours avec le même raisonnement. Dans cet esprit, de nombreuses familles empruntent pour permettre à leurs enfants d’accéder à ce qu’ils considèrent comme la « meilleure » éducation en postulant que les gains, pour l’avenir de leur enfant, seront plus élevés que leur investissement.

Bien sûr, l’Ontario est en déficit. Mais augmenter la réussite et miser sur l’avenir, ce n’est pas seulement changer des pratiques. C’est aussi, et surtout, ajouter le soutien et l’expertise nécessaires, rémunérer les gens adéquatement pour qu’ils se consacrent à leur travail, valoriser l’activité de l’entreprise. Ça ne se fait pas en s’appuyant sur des croyances ou en utilisant des raisonnements trompeurs concernant l’éducation au Québec. Augmenter la réussite de tous se fait lorsqu’on a d’abord confiance dans les jeunes et dans leur capacité à participer au développement de la société.

Plusieurs laissent entendre qu’il y a suffisamment, voire trop d’argent en éducation. Certains avancent des augmentations des dépenses d’éducation mirobolantes. Pourtant, les comptes publics sont clairs. Les investissements dans les commissions scolaires du Québec sont passés de 5,7 milliards en 2005-2006 à 7,3 milliards de dollars en 2015-2016. Une hausse de 28 %, soit une moyenne annuelle de 2,8 %, pendant qu’ils augmentaient de 49 % en Ontario, soit 4,9 % par année. Or, actuellement, certains journalistes et chroniqueurs affirment que, compte tenu de la fréquentation qui a légèrement diminué, ces hausses suffisent. Selon eux, doit-on comprendre que l’Ontario investit trop en éducation ? Que cette province aurait pu accroître son taux d’obtention d’un diplôme du secondaire en moins de cinq ans sans augmenter le budget des conseils scolaires à 15,8 milliards ?

Fonds de retraite

 

Nombre d’acteurs sur le terrain et de spécialistes affirment que les choses ne vont pas bien. Que l’on perd des gains durement gagnés. Que, faute de ressources adéquates, nous sommes en train d’abandonner des enfants, malgré tout le potentiel qu’ils ont. Sur la scène publique, des journalistes, des chroniqueurs et des think tanks de droite critiquent les écoles et les besoins dont elles font part. Certains affirment même (dans des cabinets politiques) qu’il y aurait trop de personnes dans les universités. Le problème serait qu’il faut « orienter » les jeunes. Mais que se passe-t-il ?

On me dira que l’Ontario est en déficit, mais voilà, la question se pose. Qu’est-ce qui pousse une population à faire des déficits ? La réponse est simple : la confiance en l’avenir. Nous acceptons l’endettement parce que nous pensons que l’usufruit de cette dette générera des gains supérieurs aux coûts, à court terme, ou à long terme.

Les décisions prises actuellement en éducation nuisent au développement des jeunes, appauvrissent leur avenir et, inévitablement, celui de la société. Tôt ou tard, il nous faudra payer le prix de la pauvreté intérieure que l’on aura créée.

Or, nos fonds de retraite sont bien garnis et ce sont eux qui, pour l’essentiel, financent notre dette. Quel problème y a-t-il à nous emprunter davantage ? Pourquoi ce manque de confiance? Qu’est-ce que ce gouvernement craint de nos enfants, de la jeunesse ? Qu’elle réussisse ? Le prix à payer pour ne pas avoir investi en éducation sera trop élevé à payer. Il est temps de réinvestir, et ce, de façon stratégique, en ayant le courage de revoir nos façons de faire et de s’assurer qu’elles reposent sur des bases solides.

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