Dentistes : une question de fond et d'équité

L'Association des chirurgiens dentistes du Québec (ACDQ) déplore que le gouvernement l'ait contrainte à inviter ses membres à se retirer massivement du régime public de soins dentaires. Il en est toutefois le seul responsable puisque c'est son mépris, son entêtement et le non-respect de sa signature qui ont provoqué cette situation. Il importe de préciser comment on en est arrivés là.

- Par suite de l'imposition par le gouvernement du déficit zéro dans les années 1990 et des différents décrets fixant les augmentations salariales et tarifaires, les dentistes ont vu leurs tarifs payables par la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) pratiquement gelés jusqu'en 2003. Ils ont donc été forcés d'assumer une portion de plus en plus grande des coûts des services dentaires rendus dans le cadre du régime public, puisque leurs frais d'exploitation, principalement les salaires des employés, les fournitures dentaires, l'équipement et le loyer, ont continuellement augmenté, et ce, à un rythme annuel de plus de 3,5 %.

- La seule raison invoquée par le gouvernement pour justifier son offre, nettement insuffisante, est sa capacité financière limitée. En effet, il n'a aucun argument à opposer aux frais d'exploitation élevés des cliniques dentaires privées, qui représentent environ 85 % des tarifs que la Régie verse aux dentistes qui traitent les assurés du régime public, ou au fait que la rémunération personnelle découlant du régime public était en 2007 d'environ 10 dollars l'heure. Reniant son engagement formel de 2003, il va même jusqu'à refuser d'analyser les deux composantes des tarifs, à savoir les frais d'exploitation et la rémunération personnelle.

- La position du ministre Couillard est en complète contradiction avec celle qu'il a adoptée à l'endroit des cliniques médicales privées. Par exemple, le gouvernement compense directement, et indépendamment de la rémunération des médecins, les frais d'exploitation de la Clinique Rockland MD. Si le gouvernement veut accorder le transfert de certaines chirurgies aux cliniques médicales privées, il doit couvrir leurs frais d'exploitation, en plus de rémunérer justement les médecins qui y pratiquent. C'est normal. Pourquoi avoir deux poids, deux mesures lorsqu'il s'agit des dentistes?

- La survie du régime public de soins dentaires repose sur la volonté gouvernementale de le maintenir et de le financer adéquatement. Sinon, les victimes réelles de l'incompréhension et de l'inertie du gouvernement seront les enfants et les prestataires de l'assistance emploi. Les dentistes portent financièrement le régime sur leurs seules épaules depuis plus de 15 ans; c'est terminé. Le gouvernement ne peut ni exiger d'un groupe particulier qu'il finance un régime public, ni refuser de rémunérer convenablement un service, sous prétexte que la personne qui le rend bénéficie d'un bon revenu.

L'ACDQ souhaite arriver à une entente, mais les jours sont comptés d'ici le 27 mars. Le gouvernement doit revenir à la table des négociations avec la volonté de reconnaître les particularités des cliniques dentaires. Le temps presse. Je lance un appel au premier ministre et lui demande d'intervenir dans ce dossier afin que nous sortions de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons.

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