La pensée magique
Le président du prochain sommet sur les changements climatiques (COP28), le sultan Ahmed al-Jaber, p.-d.g. de l’ADNOC, l’une des plus grandes entreprises pétrolières au monde, annonçait récemment la nécessité de continuer à exploiter le pétrole pour permettre de financer la transition énergétique, au grand dam de plusieurs environnementalistes.
De façon surprenante, cette idée s’est même répandue à certaines organisations environnementales, qui n’ont pas hésité depuis plusieurs années à collaborer avec les grandes pétrolières, à admettre des cadres de ces entreprises dans leurs conseils d’administration et même à recevoir du financement de celles-ci (comme l’a déjà révélé la journaliste et essayiste Naomi Klein), en véritable profession de foi envers un hypothétique et incertain progrès technologique qui permettrait d’éviter une catastrophe climatique qui semble désormais inévitable.
Il est aisé de constater ce changement de paradigme chez certains tenants de la lutte contre les changements climatiques. Nous n’avons qu’à penser à un ministre libéral de l’Environnement et du Changement climatique, anciennement membre actif de Greenpeace, qui a étonnamment donné son appui l’année dernière au vaste projet d’extraction pétrolière Bay du Nord au large des côtes de Terre-Neuve pendant le déroulement de la COP27, qui venait d’ailleurs d’accueillir pour la première fois des représentants de l’industrie pétrolière !
Certains pourraient affirmer alors que la nomination de ce nouveau président de la COP impliqué directement dans le commerce du pétrole, en pleine contradiction avec la cause elle-même, ainsi que l’indolence de prétendus défenseurs de l’environnement ne sont que l’aboutissement logique de notre refus collectif à admettre l’urgence de la situation et à remettre en question notre mode de vie… en pure pensée magique.