Un budget pour hommes seulement?
Le Québec est un précurseur, dans la francophonie, de la féminisation des titres et des textes. En 1979, l’Office québécois de la langue française proposait l’utilisation des formes féminines dans tous les cas possibles et en 2015, il recommandait la féminisation des appellations de personnes et la rédaction épicène.
Or, cet héritage, que l’on doit aux féministes des années 1970 et qui a fait la fierté et la spécificité québécoises depuis près de 50 ans, a complètement été occulté par le ministre des Finances Eric Girard, dans son discours du Budget 2023.
En effet, fini l’expression « les Québécoises et les Québécois », le ministre Girard s’est adressé à 31 reprises directement aux Québécois, et pas une fois aux Québécoises. Cet impair s’est répété alors qu’il s’est adressé neuf fois aux étudiants et cinq fois aux travailleurs, mettant ainsi de côté les étudiantes et les travailleuses.
Pourquoi mettre fin ainsi à une tradition québécoise qui a permis de reconnaître l’apport des femmes dans la société ? Il est vrai que d’autres ministres des Finances québécois, tels Nicolas Marceau, Carlos Leitão et Raymond Bachand, ont aussi agi de la sorte au cours des ans. Cependant, le ministre Girard a parlé, dans son budget, d’inclusion et d’égalité en plus de vouloir « promouvoir la culture et la langue ».
Que doit-on en conclure ? Que la féminisation des titres et des textes, qui a caractérisé le Québec pendant plusieurs années, ne fait plus partie de la culture québécoise à valoriser ? Que la culture québécoise exclut les femmes ?
Difficile, dans un tel contexte, de parler d’égalité entre les sexes, une des valeurs fondamentales du Québec, pourtant protégée par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.