«Un beau cadeau»
« Quels ne seraient pas le plaisir et le bonheur d’un citoyen de dire “je viens de recevoir un beau cadeau de 18 000 $ parce que j’ai fait changer mes deux hanches et puis ça ne m’a rien coûté” », disait le ministre Christian Dubé le 8 décembre dernier à Radio-Canada. L’italique est le mien. Non, à ce prix-là, on ne parle pas d’un changement de pneus d’automobile. Mais plutôt des factures des soins médicaux payés par le gouvernement et destinés aux malades.
Une ancienne collègue de travail, qui a travaillé pendant 50 ans et qui a enfin eu son remplacement de hanche, après deux ans d’attente et de souffrance, est sûrement heureuse d’apprendre qu’elle a été chanceuse. Ça devrait favoriser une réadaptation plus agréable. Les patients qui reçoivent des traitements d’hémodialyse trois fois par semaine à vie pour ne pas mourir vivront sûrement beaucoup de « plaisir » et de « bonheur » de savoir à quel point ils coûtent cher à leurs concitoyens. Ça devrait les aider à endurer leurs traitements. Surtout, pour les plus âgés, peut-être que d’autres solutions […] pourraient leur venir à l’esprit. Après tout, les retraités, à moins d’être bénévoles, ont une valeur économique apparemment nulle. Les traitements, c’est fatigant à la longue, et pas seulement pour les patients. Et puis, le vieillissement de la population est tellement lourd à porter financièrement pour la jeune génération, rapporte-t-on régulièrement, à mots plus ou moins voilés. Et tant pis pour la contribution d’une vie de ces aînés.
Quant à moi, j’ai très hâte de recevoir les factures pour mes excellents traitements en cancérologie. Le « beau cadeau » du gouvernement me rendra plus serein. Surtout, il me donnera l’occasion d’envoyer au ministre copie de mes déclarations de revenus des 10 dernières années (ça suffira amplement). On fera le bilan. Moi aussi, je sais compter. Quant à ceux et celles qui, peut-être, abusent de nos urgences, ils et elles seront vraisemblablement indifférents aux factures qu’on leur enverra.
Je suggère plutôt au ministre, qui autrement fait un excellent travail, de ne pas encombrer inutilement l’administration du réseau avec ces factures, mais plutôt de continuer à améliorer l’accessibilité des soins au Québec. Il y a encore du chemin à faire.