Mourir deux fois…

On l’a beaucoup dit : Karim Ouellet était la gentillesse incarnée, le raffinement, la classe, le talent fou. Autant de qualités qui habitent à jamais les oeuvres qui l’ont élevé au rang de personnalité publique et qui lui survivront. Sa mort a créé une onde de choc en plein coeur de l’hiver. Les circonstances de sa mort en créent une deuxième en plein début d’été. Et les vautours se vautrent : « Où donc était sa famille ? » « Où étaient tous ceux qui se réclament aujourd’hui d’avoir été son ami » durant les longs mois où son corps gisait seul ? Autant de questions lancées dans l’espace public sans la moindre nuance ou retenue. Il est si tentant de tirer des conclusions à partir d’une nouvelle. On fait ça à longueur d’année. […] Parce qu’on aime quand ça frappe. On carbure aux gros titres, on y projette ses fantasmes et toutes ces ombres qu’on refoule sans arrêt.

Ça donne ce que ça donne. Une éclaboussure qui n’est belle à voir pour personne. Scabreuse pour les uns, rassurante pour les autres. Mais qui concerne généralement tout le monde sauf la personne concernée. Car, au fond, que savons-nous réellement de l’homme qu’était Karim Ouellet ? Que savons-nous des liens qu’il avait — ou n’avait plus — avec les siens ? Que savons-nous de ses conflits intérieurs, en dehors de ceux qu’il magnifiait dans ses chansons ? Que savons-nous de ce que ressentaient sa famille, ses amis, ses proches ? Rien. On n’en savait — et n’en saura — strictement rien.

La double mort de Karim Ouellet, c’est d’abord la double mort d’une icône. Et pour un qui meurt deux fois, combien — à longueur de vie — s’éteignent dans le silence et l’indifférence. Reposez en paix, Monsieur Ouellet. Et respect à vous, parents et amis, qui le regretterez toujours.

À voir en vidéo