Lettre - Ces juges qui siègent

Ce lundi, c’est une Cour suprême des États-Unis très divisée idéologiquement qui a jugé que la récitation d’une prière catholique en ouverture des séances des conseils municipaux de ce pays ne violait pas la Constitution. Il est intéressant de constater qu’alors qu’ici, certains commentateurs avaient parlé de présumées nouvelles accointances conservatrices chez les péquistes porteurs du projet de charte québécoise de la laïcité, chez l’oncle Sam, ce sont plutôt les quatre juges dits « progressistes » qui ont plaidé en faveur du retrait de la prière dans les assemblées de l’État. Les cinq juges conservateurs, tout juste majoritaires, ont quant à eux soutenu le maintien de la « tradition » de la prière. Qu’on soit au sud ou au nord du 49e parallèle, voilà qui démontre bien que le noyautage du plus haut tribunal d’un pays à grands coups de nominations partisanes permet d’infléchir significativement et dans la durée la nature et le fonctionnement des institutions de l’État.

 

La récente contestation québécoise de la nomination du juge Nadon à la Cour suprême du Canada par le gouvernement Harper était donc loin d’être anodine. De plus, les cinq conditions énoncées par le gouvernement de Robert Bourassa en 1987 pour réintégrer le giron constitutionnel canadien — dont celle concernant le droit de regard du Québec sur la nomination des trois juges québécois à la Cour suprême — sont donc toujours d’une actualité très concrète. Et par conséquent, le débat constitutionnel sur la place du Québec au sein du Canada n’a rien d’une futile « vieille chicane ».

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