Lettres - Éthique et valeurs
«La laïcité a besoin d'une éthique à elle, d'une profondeur spirituelle», déclare le chanoine Jacques Grand'Maison.
Qu'est-ce à dire? Il me semble que l'éthique se base sur des valeurs, et que ces valeurs proviennent de toutes ces relations que les êtres humains entretiennent entre eux. La mère qui allaite son enfant entretient avec lui une relation étroite, charnelle, qui précède et fonde les valeurs communes à ces deux êtres humains, qui précède aussi et fonde les valeurs communes à tous ces autres humains qui partagent leur vie. Les valeurs et l'éthique sont inscrites dans la chair, et ce n'est pas le fait de les avoir définies, justifiées, encadrées, divinisées qui leur donne vie.En fait, dès qu'on les définit, dès qu'on les encadre, dès qu'on tente de les extraire de la chair dans laquelle elles s'incarnent, les relations humaines, les valeurs et l'éthique risquent de perdre leur sens. Les idées prennent alors le pas sur la réalité — réalité qu'il faut tordre et plier pour qu'elle ressemble à ce que nous pensons qu'elle devrait être. Les Églises sont passées maîtresses dans l'art de triturer les chairs pour répondre aux idées.
Les relations humaines, les valeurs et l'éthique existaient bien avant les Églises et s'il doit y avoir conciliation entre le christianisme et la laïcité, c'est aux chrétiens que revient le soin de s'adapter, non l'inverse.