Lettres - Rouler en Bombardier
Il est assez affligeant de voir certains pousser de hauts cris parce que le contrat du métro de Montréal est donné de gré à gré à Bombardier-Alstom, alors qu'aucune entente commerciale internationale ne contraint la STM à procéder autrement. Si nous avons l'expertise chez nous et que l'argent des contribuables finance ce projet, n'est-il pas normal qu'une entreprise d'ici obtienne le contrat, au bénéfice de la collectivité d'ici (par les emplois créés, les impôts payés, l'expertise consolidée, etc.)?
Certes, il importe que l'offre soit juste et soumise à des évaluations indépendantes, mais n'est-ce pas absurde d'avoir créé un chef de file dans le domaine, réputé de Paris à Shanghai, si on n'en profite pas chez nous? De même, les contrats que Bombardier obtient ailleurs ne devraient être les siens que lorsqu'il n'existe aucune expertise locale.Si l'Union européenne arrive à ses fins dans les négociations commerciales actuelles avec le Canada, une multitude d'entités publiques nationales, provinciales et municipales seront désormais contraintes d'ouvrir leurs marchés publics aux multinationales européennes. Cela signifiera de ne plus pouvoir privilégier nos entreprises. Le chercheur Scott Sinclair, qui a étudié ce projet d'accord obtenu grâce à une fuite (la transparence n'étant pas une caractéristique de ces négociations), révèle à quel point toute condition ou tout engagement encourageant le développement local et l'utilisation de contenu national, entre autres, seraient interdits.
Est-ce le prix que nous sommes prêts à payer pour que le profit privé de quelques-unes de nos entreprises puisse se concrétiser à l'étranger? Les marchés publics ne sont pas que de la business. Ils sont un outil fondamental de développement local et d'expression de la souveraineté populaire, dont aucun pays ne devrait se priver. Une autre vision du commerce doit s'imposer.