Course à la direction du Parti québécois - La perspective de l'urgence désigne Landry

Le 4 juin dernier, au congrès national du Parti québécois, Bernard Landry a obtenu un vote de confiance de plus des trois quarts des délégués (76,2 %), appui qu'il a jugé insuffisant. S'étant fixé un seuil de 80 %, il a démissionné sur-le-champ. Pourtant, dans bien d'autres formations politiques, un tel résultat aurait constitué un plébiscite. Mais le Parti québécois n'est pas un parti ordinaire.

Sur les 1461 délégués, il aurait suffi que 28 votes de non-confiance aillent dans le sens inverse pour que Bernard Landry atteigne son objectif de 80 % d'appuis. Il est paradoxal qu'un si petit nombre de gens aient eu une si grande influence sur le destin d'un homme d'une telle stature qui a ensuite déclaré qu'il quittait «par respect pour la démocratie». L'insuffisance relative de ce résultat a évidemment plus d'une source. L'une d'elles est que, plusieurs jours avant le congrès, les médias ont sans cesse martelé que le vote de confiance était «dans la poche», les participants à la course larvée se ralliant les uns après les autres. Compte tenu du genre de rapports qu'entretiennent les militants péquistes avec leurs chefs, plusieurs délégués ont finalement voté la non-confiance au chef sortant, non tant par insatisfaction de son leadership que pour s'assurer que le résultat ne soit pas trop élevé, pensant ainsi garder Bernard Landry sur le qui-vive pour la suite des choses. Au dévoilement du contenu des urnes et de la décision de Bernard Landry, il y a fort probablement eu plus que 28 de ces votants stratégiques dont la surprise a vite cédé le pas à la consternation. La course au leadership était néanmoins ouverte.

À mesure que se rapproche l'échéance du 15 novembre prochain, cherchant à se convaincre qu'une des personnes en lice est celle qui les mènera à la réalisation de leurs plus hautes ambitions collectives, de nombreux membres en viennent aussi à se poser une autre question: le prochain chef du PQ sera-t-il meilleur que le précédent? En effet, ce que les péquistes recherchent n'est pas simplement un bon chef de l'opposition ou un bon premier ministre mais plutôt un bâtisseur de pays. Après tout, la dernière fois que les Québécois ont voulu du changement pour le changement, ils se sont retrouvés à le regretter amèrement.

Par ailleurs, une fois élu premier ministre, le prochain chef n'aura pas un seul instant pour s'adapter à ses nouvelles fonctions et ne saurait y voir la moindre finalité. Or qui a déjà occupé avec panache la tête du gouvernement du Québec et de nombre de ses plus importants ministères au point de n'avoir plus rien à prouver en cette matière? Qui n'a plus qu'un objectif à atteindre dans sa prolifique carrière politique, soit celui de mener le Québec au concert des nations? Qui est perçu comme offrant la meilleure chance de victoire électorale pour le PQ chez les moins de 34 ans? (Sondage CROP-La Presse du 29 juin 2005.)

Ce chef devra aussi faire montre d'une grande culture universelle et déployer un vaste réseau de contacts internationaux pour assurer la reconnaissance du futur pays par le reste du monde. Or qui détient ce réseau? Plus exigeantes encore qu'une victoire référendaire souverainiste, la construction et la mise en marche de l'appareil gouvernemental du jeune pays ainsi que la satisfaction des attentes élevées du peuple demanderont du prochain chef une connaissance très approfondie de l'État et de la gouverne telle qu'elle se pratique ici et ailleurs. Or qui détient cette culture de la raison d'État?

Nous, soussignés, tenons en haute estime les aspirants à la succession de Bernard Landry. Nous savons pertinemment que le prochain chef, quel qu'il soit, devra pouvoir compter sur des troupes renouvelées, résolues et unies. Après neuf ans de pouvoir et une défaite électorale, une conjoncture transitoire probablement inévitable a mené notre parti là où il se trouve aujourd'hui. Et, à ce stade, nous croyons que la personne la plus apte à déployer la détermination et le savoir nécessaires pour relever ce défi colossal demeure nul autre que Bernard Landry. Et s'il suspend lui aussi le sens et l'intelligence des finalités qui devraient animer l'idéal souverainiste, alors le sort en sera jeté. Pour ceux qui sont capables de lire plus loin que le bout de leur nez crochu, pointu ou épaté, l'histoire retiendra de son retrait et de sa torpeur face à la course qui s'engage pour tenir le «gouvernail» du seul vecteur capable de déclencher le processus qui mènera le Québec à vivre enfin dans l'indépendance qu'il aura été un des fossoyeurs de notre projet de souveraineté. Voilà ce qui nous pousse aujourd'hui à l'interpeller vigoureusement afin qu'il pose sa candidature à sa propre succession.

Par la même occasion, nous sollicitons l'ensemble des souverainistes de tous les horizons afin qu'ils entendent également notre appel pour mettre fin à une histoire sans fin, qu'ils se mobilisent et consolident la seule formation politique capable de réaliser à courte échéance l'incontournable et urgente indépendance nationale pour le salut du Québec: le Parti québécois.

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* Maka Kotto, député du BQ de la circonscription de Saint-Lambert; Maria Mourani, candidate du BQ d'Ahuntsic et présidente régionale du PQ de Montréal-Ville-Marie (à titre personnel); Christian Gagnon, président régional du PQ de Montréal-Centre (à titre personnel); Osvaldo Nuñez, ex-député du BQ de la circonscription de Bourassa; Nayef Mustapha, vice-président du Forum jeunesse du BQ (à titre personnel); Claude Racette, trésorier du PQ de L'Acadie; Jean-Paul Gilson, président de l'exécutif du BQ d'Outremont; Dave Turcotte, président du PQ de Saint-Jean; Juan José Hernandez, ex-président du PQ d'Outremont et directeur de la campagne du BQ dans Outremont; Gaston Laurion, ex-candidat du PQ et professeur émérite à l'université Concordia; Ibrahim el-Bechara, conseiller à la citoyenneté du PQ de L'Acadie et membre fondateur du Conseil libano-canadien; Joan Gosselin, conseillère à l'action politique des femmes du PQ de Saint-Jean; Henri Naud, président du BQ de Saint-Jean; Varouj Boudakian, conseiller à l'exécutif du BQ d'Ahuntsic; Tony Hayek, président d'Action Liban; Marouan Gebrayel, vice-président d'Action Liban; Paul Alexis François, responsable du PQ de Jeanne-Mance-Viger; Antoine Nahas, président du Club des Lions, section Québec; Hassan Hamieh, Centre islamique libanais; Khaled Lbaz, membre du PQ de Saint-Laurent; Denis Beaulé, sociologue et philosophe; Caroline Moreno; Claude Pépin, membre du BQ de Rivières-du-Nord; Hassan Zanoun et Rafic Asmar, Centre culturel libanais; Bassam Salmen, président du Centre charitable druze; Wassim Balouk, el-Hidaya; Chuck Malhab, président de l'Association des kataebs libano-canadiens; Michel Abi-Mikael, président de l'Union culturelle libanaise; Fares Malek, président de la Société libanaise; cheik Ali Sbeité; père Talal el-Hachem, grand prêtre de l'église Saint-Antoine-le-Grand; Elie Mougaes, journaliste; Ali Faour et Hassan Jamal el-Dine, Association el-Rissalah libano-canadienne; Houssein Hoballah, journaliste; Labib Farajallah, Association nationaliste syrienne; Maroun Chamoun, journaliste; Sami Bakkar et Nadim el-Sayd, Association al-Siraj; Bassam Houssein, Association el-Hiday.

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