Retour vers un avenir laïc en Iran

Soutenus inlassablement par la diaspora, les Iraniens ont déclenché une révolution pour renverser le régime islamique.
Photo: Mathiew Leiser Agence France-Presse Soutenus inlassablement par la diaspora, les Iraniens ont déclenché une révolution pour renverser le régime islamique.

« Femme, vie, liberté » résonne depuis plus de sept mois et a sensibilisé le monde libre, saisit d’admiration pour la jeunesse iranienne guidant un combat universel. Les Iraniens de l’intérieur du pays, soutenus inlassablement par la diaspora, ont déclenché une révolution pour renverser le régime islamique et le remplacer par une démocratie laïque.

Or, la laïcité n’est pas un concept nouveau en Iran. L’histoire de l’Iran ne se limite pas aux 44 ans du régime islamique fondé par l’ayatollah Khomeini. Il s’illustre plutôt par une histoire millénaire fascinante. L’Empire perse est un exemple de gouvernance et d’administration grâce à son fondateur, le roi Cyrus le Grand. Cyrus était un monarque « libéral » qui a produit la première déclaration des droits humains, l’« Édit de Cyrus », dont une réplique est exposée au siège des Nations unies. Il fut une source d’inspiration pour les pères fondateurs des États-Unis, comme Thomas Jefferson. Dans ses écrits, ce roi de Perse évoque les premiers éléments indicateurs de la laïcité : neutralité, égalité devant la loi et protection et liberté.

Toutefois, après la conquête arabo-musulmane de la Perse, le peuple iranien a lutté pour préserver sa langue et sa culture préislamique, ainsi que d’affirmer son individualité. L’Iran passe successivement par des périodes sombres et glorieuses, mais reste toujours incomprise et mal définie.

Sous la dynastie Qadjar (1796-1925), l’Iran subit une période de négligence et de puissance religieuse dominante. La condition féminine y est alors déplorable, les femmes se retrouvent isolées et leurs droits dominés par la charia.

Par la suite, les réformes laïques introduites par Reza Shah (1925-1941), premier roi de la dynastie Pahlavi, viennent changer la donne et sauver l’Iran. Notamment, la loi sur l’abolition du voile et du tchador dans les lieux publics qui est renforcée de 1936 à 1941, et suscite une controverse de nos jours parmi les opposants à la monarchie Pahlavi. Pourtant, la décision de Reza Shah était une manifestation de bonne volonté à l’égard de son peuple.

Lorsque Reza Shah Pahlavi devient roi, l’Iran du début du 19e siècle est sous-développé avec un taux d’analphabétisme élevé, ravagé par les maladies, ne possédant aucune infrastructure ; mais surtout, une société ultrareligieuse tombée sous le joug du patriarcat et de la misogynie. Dans cette conjoncture, seul le retrait obligatoire du tchador de l’obscurantisme permettait la libération de la femme iranienne. Pour Reza Shah, la domination religieuse était le principal ennemi de l’Iran, le présage d’une catastrophe : la domination future du clergé.

Dans un élan de modernisation, Reza Shah mise alors sur l’éducation et l’émancipation de la femme, ainsi que des réformes laïcistes, pour aligner la société sur sa vision d’un nouvel Iran. Selon ses propres dires, « l’Iran ne pouvait être libre, tant que les femmes n’étaient pas libres », et que jusque-là, le pays avait agi « comme si les femmes étaient des personnes différentes et ne comptaient pas parmi la population iranienne ». Ainsi, la liberté de l’Iran doit passer par l’émancipation de la femme.

Par ce fait, il voyait le hidjab comme un obstacle à la modernité et au progrès ; un outil tangible et visible d’infériorisation, et un symbole d’inégalité. Reza Shah a vu le retrait du hidjab comme seul moyen pour les femmes de faire leur entrée dans la société. Il y voyait un moyen d’habilitation (empowerment) des femmes.

Son fils et successeur, Mohammad Reza Shah Pahlavi, poursuit sur la même lancée les objectifs de modernisation. Scolarisé en Suisse dans une école laïque et francophone, l’Institut Le Rosey, il développe des idées progressives et occidentales. Ainsi, en 1941, le nouveau Shah d’Iran abroge l’interdiction du voile et laisse aux femmes le choix de le porter ou non. L’Iran essaie donc d’avancer avec son époque. Le Shah laisse à l’éducation, à la société moderne et au temps le soin d’informer les femmes de leurs droits et libertés.

En 1963, les droits d’éligibilité et de vote sont octroyés aux femmes — huit ans avant la Suisse. Ensuite, les femmes sont élues députés et sénateurs dès 1963, et la première femme ministre de l’Éducation fait son entrée en politique en 1968. Une série de réformes et de lois suivent au cours de la fameuse « révolution blanche », et la condition féminine évolue considérablement en quelques années.

Malheureusement, la société était encore déchirée entre modernité, idéologie communiste et obscurantisme religieux. Aujourd’hui, les jeunes Iraniens exigent un avenir sans idéologies et ouvert sur le monde. Un retour sur le projet inachevé de la modernisation de l’Iran.

Pour la troisième fois de l’histoire, un autre Pahlavi, digne de ce nom, peut guider le pays vers l’avenir que ces jeunes méritent : le Prince héritier Reza Pahlavi, exilé aux États-Unis depuis la révolution islamique, et fervent défenseur d’une démocratie laïque en Iran. Comme le proverbe le dit, jamais deux sans trois ?

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