Gatineau tente de combler un vide laissé par le gouvernement du Québec

Je suis très préoccupée par la situation de l’itinérance sur le territoire de Gatineau. Je parle régulièrement avec les organismes et je me rends compte de l’ampleur et de la charge du travail accompli par leurs équipes. Celles-ci sont à bout de ressources et épuisées. Devant la situation critique à laquelle nous faisons face, je souhaite porter les préoccupations du milieu et des pistes de solution auprès du gouvernement du Québec. C’est pourquoi j’ai demandé une rencontre d’urgence avec le ministre responsable des Services sociaux, monsieur Lionel Carmant.
Je l’ai invité à rencontrer nos organismes pour constater la réalité sur le terrain.
Ces derniers mois, plusieurs municipalités au Québec ont connu une hausse marquée de l’itinérance. Gatineau ne fait pas exception. Un récent recensement dénombre pas moins de 1200 à 1500 personnes en situation d’itinérance dans la ville. Notre proximité avec Ottawa fait de Gatineau une région métropolitaine comparable à Montréal.
Si les origines de cette situation sont multiples, le désengagement du gouvernement du Québec par rapport aux services de santé et aux services sociaux, jumelé aux difficultés d’accès à certains services, notamment en matière de santé mentale, fait certainement partie des principales raisons.
Les conséquences de la crise sanitaire et de la crise du logement — le taux d’inoccupation à Gatineau est de 0,8 % — ont amplifié le phénomène. De plus en plus de personnes se retrouvent à la rue, sans aucun autre recours possible. C’est le cas de près de 200 ménages à faible revenu depuis le début de l’année. Il ne s’agit pas ici de cas de toxicomanie, de problèmes de santé mentale ou de dépendance.
Nous avons aussi des lacunes importantes dans les services d’hébergement d’urgence et spécialisé sur le territoire. Le service de la halte-chaleur, par exemple, bénéficie d’un financement non récurrent qui prendra fin au printemps. Aucune solution pérenne n’est actuellement prévue. Chaque année, c’est à recommencer. Cette instabilité fragilise les personnes qui utilisent le service, mais aussi épuisent les extraordinaires et dévouées équipes de nos organismes communautaires.
Le décalage est immense entre les besoins et les ressources humaines et financières disponibles. La Ville de Gatineau est tantôt meneuse, collaboratrice ou partenaire en itinérance, selon les besoins et les dossiers. Appelée à intervenir dans un champ de compétence qui n’est pas le sien, notre ville, comme plusieurs au Québec, demeure le répondant de première ligne durant les crises, au nom de la qualité de vie des citoyens. Les citoyens de nos villes sont aussi des citoyens du Québec. À ce titre, l’action doit être collective, mais commande la détermination claire des comptes que doit rendre chacun des partenaires.
La pression sur le municipal (et surtout sur le communautaire) est grande dans une gamme d’interventions qui s’élargit sans cesse. Les villes viennent combler véritablement un grand vide malheureusement laissé par le gouvernement du Québec.
Un leadership plus soutenu de Québec est nécessaire, parce que les villes veulent faire partie de la solution au bénéfice de tous leurs citoyens.
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