Célébrer qui nous sommes et ce qui nous rassemble

«Il aura fallu attendre plus de 80 ans avant qu’une femme soit nommée à la tête du diffuseur public. Aujourd’hui, de plus en plus de talents d’horizons divers trouvent leur place à CBC/Radio-Canada», écrit l'autrice.
Photo: Valérian Mazataud Le Devoir «Il aura fallu attendre plus de 80 ans avant qu’une femme soit nommée à la tête du diffuseur public. Aujourd’hui, de plus en plus de talents d’horizons divers trouvent leur place à CBC/Radio-Canada», écrit l'autrice.

Les géants du numérique ont le vent en poupe. Si l’on peut se réjouir de l’accès qu’ils nous donnent à une foule de contenus, ils ne reflètent pas, ou si peu, nos réalités et cette culture francophone qui nous distingue. C’est pourquoi, maintenant plus que jamais, nous avons besoin de notre diffuseur public.

Mais pour que nous puissions pleinement jouer notre rôle, encore faut-il que nous représentions fidèlement la diversité des expériences au pays afin que chacun puisse se reconnaître dans son diffuseur public. Là-dessus, nous pouvons et nous devons faire mieux. Les Premières Nations, les Métis et les Inuits, tout comme les personnes racisées, en situation de handicap ou issues des communautés LGBTQ2+ ont souvent de la difficulté à se retrouver sur nos plateformes. Grâce à une enquête du Devoir, nous apprenions que même les femmes restent sous-représentées parmi les expertes et politiciennes citées dans les médias, dans des proportions de 36 % et 27 % respectivement.

À l’information comme dans le reste de notre programmation, nous reconnaissons qu’il faut en faire plus pour combler ces divers écarts de représentation. Le comédien Yanic Truesdale, qui joue dans la série Les mecs, confiait en 2019 à une journaliste de Radio-Canada : « Il y a 30 ans, quand je suis sorti de l’école, c’était des rôles de chauffeurs de taxi haïtiens [qu’on m’offrait]. Il fallait que je fasse l’accent alors que je ne suis même pas haïtien ! » Le talentueux Montréalais s’est ensuite expatrié et a fait sa marque, entre autres, dans la série américaine Gilmore Girls. Si la représentation de la diversité s’est améliorée depuis sur nos écrans, les comédiens racisés demeurent rares parmi les têtes d’affiche des productions francophones. Selon une recension de 2018, aucun des rôles-titres des dix séries québécoises les plus populaires de cette année n’était joué par un comédien racisé.

Tandis que le Canada continue à changer, c’est la responsabilité de son diffuseur public national de changer avec lui. Notre série jeunesse L’effet secondaire, diffusée sur ICI TÉLÉ et ICI TOU.TV, en est un bel exemple : la diversité se reflète à la fois dans les rôles principaux, dont plusieurs sont joués par des acteurs racisés, et dans les sujets abordés. La série a d’ailleurs été finaliste aux MIPCOM Diversify TV Excellence Awards. Nous avons aussi récemment lancé Pa t’mentir et Tu viens d’où ?, deux émissions sur les réalités des personnes noires et issues des communautés multiethniques au Québec, et The Porter, une fiction cofinancée par CBC et Radio-Canada qui raconte l’histoire de la création du tout premier syndicat noir par des travailleurs ferroviaires, qui se déroule entre autres dans le quartier montréalais de la Petite-Bourgogne. En mai, nous diffuserons également Pour toi Flora, notre première dramatique autochtone, inspirée des témoignages d’anciens résidents de pensionnats pour Autochtones.

Ce ne sont pas les géants étrangers qui vont faire l’effort de dénicher et soutenir ces créateurs qui ont à cœur de mettre cette diversité canadienne à l’écran. C’est à nous qu’il revient de le faire. C’est pourquoi nous avons dévoilé, l’automne dernier, un plan en matière d’équité, de diversité et d’inclusion qui nous servira de feuille de route, d’ici 2025, pour permettre aux Canadiens de tous les horizons de s’épanouir chez nous. Cela s’ajoute à notre engagement pris en 2019 d’accroître la diversité aux postes clés de création dans les productions indépendantes que nous commandons.

Dans ce même esprit, nous avons signé, le 3 mars dernier, un premier protocole d’entente avec le diffuseur autochtone APTN, pour faire rayonner les histoires autochtones partout au pays.

Nous allons aussi développer une première stratégie autochtone en travaillant de concert avec des représentants et des créateurs des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Nous irons à leur rencontre dès ce printemps.

Il aura fallu attendre plus de 80 ans avant qu’une femme soit nommée à la tête du diffuseur public. Aujourd’hui, de plus en plus de talents d’horizons divers trouvent leur place à CBC/Radio-Canada. Cette évolution est essentielle pour assurer notre pertinence dans l’avenir et pour sauvegarder notre capacité collective à transmettre une culture commune, que les créateurs et publics de tous les horizons peuvent s’approprier.

Incarner le Canada d’aujourd’hui pour mieux nous rassembler, voilà notre force comme diffuseur public national.

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