Trier et conditionner les matériaux

Les matériaux déjà triés et lavés par les citoyens faciliteraient grandement le processus, explique l'auteur.
Photo: Jacques Nadeau Archives Le Devoir Les matériaux déjà triés et lavés par les citoyens faciliteraient grandement le processus, explique l'auteur.

Le Devoir publiait le 26 janvier dernier le texte « La gestion des déchets ne s’améliore pas au Québec, conclut le BAPE ». Pourtant, le signal était clair lorsque la Chine a stoppé l’importation de nos matériaux recyclés pour les mêmes raisons que le BAPE cite dans son rapport. Le problème du recyclage au Québec, c’est que l’on confond recyclage avec ramassage : compresser en ballots des matériaux mal triés et sales ne constitue en rien du recyclage. D’ailleurs, l’émission Enquête de Radio-Canada confirmait récemment assez bien cette mystification.

Il faut obliger les centres de tri à conditionner les matériaux en formats prêts à la fabrication. Il faut donc les ramasser correctement, les trier finement et les conditionner parfaitement. Pour ce faire, il faudra revenir à la collecte d’un tri fait à la maison, comme cela se faisait au début. Ainsi, les matériaux déjà triés et lavés par les citoyens faciliteraient grandement le processus. La collecte pourrait être au début moins importante, mais il nous faut localement des matériaux recyclables, et non des déchets.

De plus, qu’advient-il des imprimantes, des consoles de jeu, des ordinateurs ? Où vont les matériaux des boîtiers « sertplusariens » ? Qu’en est-il des fers à repasser, des machines à café, des fours micro-ondes, des aspirateurs… que l’on apporte aux écocentres ? Il faut organiser et systématiser le processus de récupération afin d’alimenter des ateliers de démontage pour récupérer et trier ces précieux matériaux aux propriétés physiques plus avancées que celles des matériaux de l’emballage afin qu’ils resservent pour des objets utiles que nous fabriquerons localement. Le démontage existe dans une usine de Coaticook pour les déshumidificateurs et les unités d’air conditionné ; les matériaux y sont parfaitement triés. Il y a aussi une usine à Bécancour qui récupère entièrement les réfrigérateurs, par dizaines de milliers chaque année. On y trie correctement les plastiques, les métaux et le verre, et l’on extrait l’huile, le gaz frigorifique des compresseurs, mais aussi l’isolant soufflé aux hydrofluorocarbures (HFC), plus dommageables que les gaz frigorifiques. Ces matériaux, une fois conditionnés dans une usine au nord de Montréal, sont prêts pour fabriquer des produits. C’est encore trop peu.

Nous concevons, à l’Atelier de la soutenabilité appliquée, un réfrigérateur soutenable, d’un nouveau type, et nous passons en 2022 à la phase prototypage en appréhendant le moment où nous voudrons nous approvisionner en matériaux locaux bas carbone, c’est-à-dire les matériaux de la récupération et du démontage, pour la production des 5000 appareils de la première année. Ces matériaux sont à la base d’une empreinte carbone la plus basse possible, ce qui permet d’afficher la soutenabilité (ou pas) d’un objet. D’ailleurs, la soutenabilité justifie économiquement la fabrication locale au beau milieu de l’économie mondialisée ; c’est dire la nécessité stratégique d’un tri et d’un conditionnement impeccables.

Pour décarboner l’économie mondialisée surdimensionnée, il nous faut redéployer de manière soutenable l’économie locale en démontrant que l’on peut faire les choses autrement. Mais pour cela, il faut pouvoir compter sur la disponibilité des matériaux que nous consentons à donner et à faire trier par nos soins (nos taxes) pour fabriquer des objets bas carbone.

Le problème du recyclage
au Québec, c’est que l’on confond recyclage avec ramassage : compresser en ballots des matériaux mal triés et sales ne constitue
en rien du recyclage

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