Pour sauver le système de santé

«Il faut rétablir la gestion de proximité dans les établissements de santé, plus particulièrement les hôpitaux de soins aigus, et la confier à des gestionnaires qui sont plus près du terrain et de la réalité du personnel médical et des patients», estime l'autrice.
Photo: Matthias Schrader Associated Press «Il faut rétablir la gestion de proximité dans les établissements de santé, plus particulièrement les hôpitaux de soins aigus, et la confier à des gestionnaires qui sont plus près du terrain et de la réalité du personnel médical et des patients», estime l'autrice.

La gestion hypercentralisée du système de santé nuit à la qualité des soins dispensés à la population et est en grande partie responsable des maux qui menacent l’intégrité du système sur plusieurs fronts : pénurie de personnel, démotivation du personnel, délocalisation des services, débordements et fermetures des urgences, listes d’attente qui perdurent en chirurgie, etc.

Exacerbées par la récente urgence sanitaire, les nombreuses manifestations du mal profond qui plombe notre capacité à prodiguer des soins de qualité dans un délai raisonnable font malheureusement trop souvent la manchette.

Si le diagnostic est clair, le remède l’est tout autant.

Il faut rétablir la gestion de proximité dans les établissements de santé, plus particulièrement les hôpitaux de soins aigus, et la confier à des gestionnaires qui sont plus près du terrain et de la réalité du personnel médical et des patients.

Nous sommes près de 800 médecins qui pratiquent dans toutes les régions du Québec à vivre ces problèmes au quotidien. Nous revendiquons la décentralisation du système de santé, cause pour laquelle nous avons formé le Regroupement québécois de médecins pour la décentralisation du système de santé (RQMDSS).

Actions

 

Nous savons avoir une oreille attentive de la part du ministre et du ministère, qui envoient déjà des signaux positifs quant à d’éventuels changements qui, sous une forme ou une autre, se rapprocheraient d’une gestion de la santé mieux adaptée à la réalité terrain.

Les propos du tout récemment nommé commissaire adjoint à la santé et au bien-être, le Dr Denis A. Roy, rapportés par la revue ProfessionSanté.ca, nous donnent espoir : « Nous devons passer d’une gouvernance hiérarchique axée sur la production à un leadership partagé et responsable, axé sur les résultats. »

Nous osons espérer qu’il s’agit là d’un signal annonciateur de changement et non d’un simple énoncé d’intention.

Nous tenons également à saluer la récente décision de Mme Lise Verreault, désignée par le ministre Dubé lui-même à titre de présidente-directrice générale par intérim au CISSS de la Montérégie Ouest, de doter deux des hôpitaux de sa région d’un directeur général adjoint local chacun.

De notre point de vue, il s’agit d’un exemple à suivre, d’un pas vers un modus operandi mieux adapté, d’un mode de fonctionnement qui favorise l’efficience des centres de soins, tout en envoyant un signal positif à ceux et celles qui traitent des patients au quotidien.

Solutions

 

La gestion de proximité est en somme une meilleure façon de mettre en œuvre des solutions adaptées à la réalité locale et d’encourager les initiatives en ce sens. C’est aussi un excellent moyen de valoriser l’engagement et le sentiment d’appartenance du personnel, ce qui devrait inexorablement en augmenter le taux de rétention.

Une gestion décentralisée devrait non seulement améliorer la qualité des soins, mais aussi redonner le goût de s’investir davantage et stimuler cette fierté de faire partie d’une équipe qui peut prendre les décisions qui s’imposent pour offrir les meilleurs soins dans le contexte propre à chaque établissement.

Pour y arriver, nous proposons notamment :

1. Qu’un directeur général (DG) adjoint responsable, autonome et imputable soit rattaché à chaque établissement ;

2. Que la fonction de direction des services professionnels (DSP) locale soit rétablie avec pleine autonomie et pleine autorité ;

3. Idem pour un conseil des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) local, c’est une fonction essentielle pour ces établissements ;

4. La présence de chefs de service et de département autonomes avec pouvoir décisionnel est également souhaitée afin d’obtenir au besoin la latitude nécessaire pour adapter l’offre de soins aux besoins particuliers de la population desservie par chacun des établissements.

Pour améliorer la qualité du service et l’efficience du système de santé, nous soutenons qu’il faut se fier au bon jugement de ceux et celles qui ont le doigt directement sur le pouls des Québécois et Québécoises qui ont besoin de soins de santé, et mettre l’expertise de ceux-ci à profit.

* Les membres du CA du RQMDSS : Dr Daniel Kaud, Dre Isabelle Lepage, Dre Ruth Vander Stelt, Dre Marie-Claude Blouin, Dr Philippe Rola.
 



Une version précédente de ce texte, qui mentionnait un directeur général adjoint comptable, a été modifiée.

 

Ce texte fait partie de notre section Opinion qui favorise une pluralité des voix et des idées en accueillant autant les analyses et commentaires de ses lecteurs que ceux de penseurs et experts d’ici et d’ailleurs. Envie d’y prendre part? Soumettez votre texte à l’adresse opinion@ledevoir.com. Juste envie d’en lire plus? Abonnez-vous à notre Courrier des idées.

À voir en vidéo