Et les élèves, M. Legault?

Le débat entourant la nouvelle loi sur l’organisation et la gouvernance scolaire m’a donné l’occasion de relire avec intérêt vos déclarations indiquant que l’éducation est votre principale priorité. J’ai lu avec autant d’intérêt les déclarations plus récentes de votre gouvernement, qui voit dans la réforme une occasion pour les élèves d’être pris en main par celles et ceux qui les connaissent par leur nom.
Je suis on ne peut plus d’accord avec ce principe. Et je vous demande aujourd’hui que l’on revienne à notre mission première : s’assurer que nos élèves reçoivent la meilleure éducation possible, celle qui leur permettra d’évoluer dans un monde de plus en plus complexe.
Or, le manque de ressources dans nos écoles publiques demeure un grave problème. Mettre chaque élève sur la voie de la réussite devient de plus en plus ardu. Les écoles n’ont pas assez de moyens pour accompagner les élèves qui proviennent de milieux défavorisés, qui parlent très peu français ou qui requièrent du soutien particulier.
Elles n’en ont pas plus pour fonctionner tous les jours. À la Fondation CSDM — un organisme indépendant sans but lucratif dont la mission est l’épanouissement des élèves —, des écoles nous appellent pour qu’on finance l’embauche d’un orthopédagogue. Des centres de formation professionnelle nous demandent de payer le transport de leurs élèves.
Des professeurs et des parents apportent des meubles parce qu’il en manque dans leur classe et ils quêtent de l’argent pour acheter des dictionnaires. On nous parle aussi d’élèves de 11 ans qui ne savent toujours pas lire. Au Québec. En 2020.
Selon les données de l’OCDE, le système d’éducation québécois est le plus inéquitable au Canada : nos élèves issus de milieux défavorisés ont moins de chances de réussir qu’ailleurs au pays. Cette iniquité hypothèque non seulement notre avenir, mais aussi celui de la société entière.
À cela s’ajoutent les efforts à consentir pour nous adapter. La société numérique, c’est maintenant. La pensée computationnelle — qui suppose que plusieurs solutions sont bonnes — est une compétence clé pour l’économie de demain. Or, l’intégration des technologies de l'information et de la communication (TIC) dans l’enseignement est loin d’être achevée. Notre fondation finance un tel programme, CodeMtl.org, avec votre aide d’ailleurs et celle du privé, mais cet effort est insuffisant.
Notre fondation appuie aussi de magnifiques projets qui favorisent la persévérance scolaire et réduisent les iniquités en donnant aux enfants l’occasion de s’épanouir à travers les arts, la culture, la technologie, l’activité physique, etc. Mais ces projets ne réussiront pas à eux seuls à combler le déficit de ressources dans le système d’éducation. Ils demeurent à l’état de laboratoire.
Maintenant que le débat sur les structures est terminé, attaquons-nous aux vrais problèmes et faisons réellement de l’éducation notre principale priorité, comme vous l’avez promis. Là réside le vrai défi. Nous vous aiderons !