Quel doit être le rôle du Québec à la COP25 ?

«La COP25 a lieu à un moment charnière de l’histoire, où, plus que jamais, la population se rend compte que la crise climatique, les violations des droits de la personne et les inégalités sont des symptômes d’un même problème», écrivent les auteurs.
Photo: Gabriel Bouys Agence France-Presse «La COP25 a lieu à un moment charnière de l’histoire, où, plus que jamais, la population se rend compte que la crise climatique, les violations des droits de la personne et les inégalités sont des symptômes d’un même problème», écrivent les auteurs.

C’est sur fond de tensions sociales, du Liban au Chili en passant par Hong Kong, l’Iran et la Bolivie, et de mobilisation populaire environnementale que se déroulera la 25e conférence des parties (COP25) de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).

La colère sociale et les grèves pour le climat sont issues d’une même frustration : les politiciens font la sourde oreille aux revendications de leurs citoyens et ils n’ont pas le courage de prendre les décisions qui s’imposent pour que nos démocraties et notre planète soient plus en santé.

Alors que se réuniront à Madrid les États membres de la CCNUCC et de l’Accord de Paris du 2 au 13 décembre prochains, quel devrait être le rôle du Québec lors de cette rencontre internationale incontournable ?

Avec les plans climatiques des États actuels, nous nous dirigeons vers un réchauffement supérieur à 3 degrés Celsius, ce qui serait catastrophique pour les individus, les communautés et la biodiversité. Nous sommes très loin de l’objectif mondial visant à atteindre zéro émission nette en 2050, ce qui constitue une condition indispensable pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. La COP25 à Madrid est l’occasion pour les États et les régions de confirmer qu’ils reverront leurs plans climatiques à la hausse en prévision de la COP26.

Transition juste

 

Le Québec devra être un intervenant actif lors de cet événement, car il fait partie des grands émetteurs : seuls six États ont une consommation d’énergie par habitant supérieure à celle du Québec : le Canada, les États-Unis, Trinité-et-Tobago, le Qatar, l’Islande et le Luxembourg.

Le gouvernement du Canada a aussi annoncé qu’il souhaite réviser sa cible en campagne électorale, et le Québec ne peut d’ailleurs plus se targuer d’être le leader parmi les provinces alors que la Nouvelle-Écosse et la Colombie-Britannique viennent tout juste d’annoncer des plans climat plus ambitieux que le nôtre.

La démarche en cours visant l’élaboration du Plan d’électrification et changements climatiques (PECC), dont on attend le dévoilement au début 2020, sera inadéquate si elle ne s’accompagne pas d’une révision de nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre (GES).

À Madrid, le Québec doit envoyer un signal clair non seulement sur le fait qu’il planifiera une décarbonisation rapide de notre économie, mais aussi sur le fait qu’elle se fera de manière juste. Notre projet de transition écologique doit être un projet de société à l’écoute des travailleurs, mais aussi des populations marginalisées. La transition énergétique du Québec doit absolument être une transition juste.

Comptabilité créative verte

 

Dans une perspective de justice climatique, les États du Nord, qui sont les plus grands responsables de la crise climatique, doivent apporter une juste contribution. Ils doivent réduire de manière urgente leurs propres émissions et assurer une transition juste. Ils doivent également appuyer les groupes qui en subissent les pires conséquences : les populations du Sud, les femmes, les Autochtones et les jeunes.

L’Accord de Paris prévoit plusieurs mécanismes à cet effet, dont l’article 6 qui sera discuté à Madrid. Les règles de cet article devront assurer que les réductions des émissions provenant de marchés du carbone — comme celui du Québec — ne soient pas calculées en double et amènent de véritables réductions.

Rappelons que le Québec ne peut pas exporter des énergies fossiles afin d’obtenir des réductions de GES d’autres États. L’article 6 ne doit pas être utilisé pour réaliser des opérations de comptabilité créative verte, qui n’auront aucune incidence sur la planète.

Dans cette optique de justice climatique, la contribution des États du Nord à la finance climatique internationale est essentielle, et nous nous devons de souligner le leadership du Québec à ce sujet. Rappelons qu’en plus des 20 millions de dollars annoncés dans son budget 2019 pour le Plan de coopération climatique internationale — un plan qui a été lauréat en 2019 des Prix de l’action climatique mondiale de l’ONU —, le Québec a également versé 3 millions de dollars au Fonds d’adaptation au changement climatique de la CCNUCC.

Luttes citoyennes

 

La COP25 a lieu à un moment charnière de l’histoire, où, plus que jamais, la population se rend compte que la crise climatique, les violations des droits de la personne et les inégalités sont des symptômes d’un même problème. Il s’agit donc d’une occasion pour le Québec d’exprimer sa solidarité, en premier lieu avec le peuple chilien et ses demandes pour une société plus égalitaire.

Rappelons qu’initialement la COP25 devait avoir lieu à Santiago, au Chili, mais que la rencontre a été déplacée à la suite d’une mobilisation citoyenne sans précédent contre les politiques néolibérales du gouvernement. En deuxième lieu, on se souvient que cette conférence mondiale se déroule en Espagne. Le Québec doit continuer d’exprimer sa solidarité envers la Catalogne, qui ne souhaite qu’une chose : que l’Espagne respecte les droits et libertés fondamentales de l’ensemble de ses citoyens, y compris ceux qui revendiquent l’autodétermination.

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