Le livre du ministre Proulx, une autre réforme politique électorale

Le ministre Sébastien Proulx
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne Le ministre Sébastien Proulx

Monsieur Proulx publie Un Québec libre est un Québec qui sait lire et écrire. On doit bien lui dire « bravo » pour sa reconnaissance : l’éducation est ce qu’il y a de plus important dans notre société !

Mais j’ai un doute : peut-on avoir réfléchi sérieusement sur l’éducation, problématique des plus compliquées dans une société complexe, lorsqu’on se vante d’avoir exprimé sa réflexion en un livre de 144 pages écrit en quelques jours, « durant le congé des Fêtes » ? Prolixe, oui ; réfléchi, documenté, informé ?

« Je lance ici un appel à une réelle conversation ! Une conversation qui ne sera pas soumise à un échéancier trop court et à des objectifs convenus d’avance, de part et d’autre », écrit Sébastien Proulx.

Très bien ! Mais veut-il une conversation ouverte ou veut-il converser pour ensuite décider seul en faveur de ses idées ? Est-ce pour cela qu’il propose une conversation « hors du cadre formel des relations de travail » ? Hors du cadre des relations de travail ; voilà qui laisse le gouvernement décider seul des suites à donner aux conversations alors que le cadre des relations de travail se conclut par un contrat dûment signé : une convention collective. Une décision unilatérale du gouvernement dure jusqu’à la prochaine révision des priorités gouvernementales. C’est parfois aussi éphémère qu’un printemps !

M. Proulx ouvre le débat avec au moins deux a priori : un ordre pour les enseignantes et enseignants et un plan d’insertion professionnelle pour favoriser la rétention des enseignantes et enseignants en début de carrière.

L’idée d’un ordre pour les enseignantes et enseignants est une idée des années 1990 déjà rejetée à au moins deux reprises par le milieu de l’éducation après de longues consultations des enseignants, consultations parfois tumultueuses, mais concluantes. Est-ce cela, l’ouverture ?

Autre sourire cynique : « un plan d’insertion professionnel pour favoriser la rétention des nouveaux enseignants » ! Je me dois de penser que le ministre Proulx a lu les cahiers de revendications de la CSQ et de la CSN d’il y a plus de 10 ans. C’était alors une demande syndicale ; une demande à laquelle les patrons les plus proches des étudiantes et étudiants des écoles et cégeps étaient sympathiques. Comme dans bien d’autres débats, la réponse a été très timide à cause du Conseil du trésor. C’est le Conseil du trésor, en bout de course, qui décide des mandats en éducation, comme pour les autres services de l’État, sans connaissances, mais avec des finances ! Je suis de ceux qui croient que le Conseil du trésor n’a pas à coeur les intérêts de notre société, mais plutôt ceux des oligarques discrets… mais efficaces auprès du gouvernement…

Pourtant, les propositions pour améliorer l’éducation venant du milieu de l’éducation sont nombreuses ; ce milieu qui, lui, connaît l’expérience finlandaise depuis longtemps. Ce milieu qui vit quotidiennement les préoccupations de l’éducation.

Si le ministre veut « une conversation ouverte », il faudra qu’il implique aussi les syndicats et, impérativement, le Conseil du trésor.

En bout de course, soyons au moins étonnés qu’une telle proposition du ministre de l’”Éducation arrive après trois ans de sombres compressions dans les services de l’éducation, sans discussions ou « conversation », mais à la veille d’élections ! M. Proulx est-il à la recherche d’une réforme sérieuse ou simplement d’une mesure pour favoriser sa réélection ?

C’est un scénario déjà vécu.

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