Les grands acteurs du transhumanisme

Fervent défenseur des idéaux transhumanistes, Elon Musk a fondé, en 2016, la «start-up» Neuralink avec pour objectif affiché de fusionner le cerveau humain et l’intelligence artificielle.
Photo: Brendan Smialowski Agence France-Presse Fervent défenseur des idéaux transhumanistes, Elon Musk a fondé, en 2016, la «start-up» Neuralink avec pour objectif affiché de fusionner le cerveau humain et l’intelligence artificielle.

Né à la fin des années 1980 au coeur de la Silicon Valley, en Californie, le mouvement transhumaniste n’a cessé depuis d’essaimer et de gagner en notoriété en Europe et en Amérique du Nord. Loin d’être homogène, le mouvement regroupe aujourd’hui une diversité d’acteurs, notamment des ingénieurs, des philosophes, des bioéthiciens, des entrepreneurs ainsi que de nombreux membres de la société civile, dont plusieurs occupent d’importantes positions de pouvoir.

Si le mouvement compte plusieurs tendances idéologiques qui ne se recoupent pas toutes, ses différents membres partagent néanmoins un même optimisme quant à la capacité d’améliorer l’être humain et ses performances grâce aux avancées techno-scientifiques et biomédicales. Créée en 1998 à l’initiative des philosophes Nick Bostrom et David Pearce, Humanity + (anciennement la World Transhumanist Association) constitue à ce jour la plus importante association transhumaniste avec près de 6000 membres revendiqués.

Parmi ceux-ci figure le philosophe et bioéthicien d’origine australienne Julian Savulescu, qui enseigne à l’Université d’Oxford et qui est l’un des éditeurs du renommé Journal of Medical Ethics. Diplômé de la London School of Economics, le philosophe d’origine suédoise Nick Bostrom enseigne également à l’Université d’Oxford et dirige l’influent Future of Humanity Institute. Autre figure phare du transhumanisme, le sociologue et bioéthicien américain James Hughes, qui est professeur au Trinity College de Londres et dirige par ailleurs l’Institute for Ethics and Emerging Technologies, qu’il a cofondé avec Nick Bostrom.

La force du mouvement est aussi de fédérer des figures médiatiques qui, sans être directement affiliées au mouvement, n’en défendent pas moins ses idéaux avec vigueur. Le cas de l’ingénieur et futurologue Ray Kurzweil est emblématique. Fervent défenseur de la thèse de la Singularité technologique, Kurzweil est conseiller stratégique auprès de l’armée américaine et, depuis 2012, de la firme Google sur les questions de « l’augmentation humaine ». Il est également le fondateur, avec le physicien Peter Diamandis, de la célèbre Université de la Singularité, qui vise à sensibiliser et à former les leaders du monde économique aux idéaux de l’humain augmenté.

À travers ces figures de proue du transhumanisme, le mouvement recouvre un vaste réseau d’associations, de think tanks, de fondations et d’instituts, qui s’est considérablement développé ces dernières années. Plusieurs associations nationales ont notamment vu le jour dans l’optique de défendre et de diffuser localement les idéaux transhumanistes. En France, l’Association française transhumaniste (AFT) Technoprog fut ainsi officiellement créée en 2010. L’AFT se revendique d’un transhumanisme progressiste, soucieux de marier progrès technique et progrès social.

Plusieurs partis politiques transhumanistes ont également émergé ces dernières années aux États-Unis, en Angleterre et, plus récemment, en Allemagne. L’écrivain et philosophe américain Zoltan Istvan fonde le Parti transhumaniste en 2014. Sillonnant les routes des États-Unis à bord du « bus de l’immortalité », Istvan s’est présenté à l’élection présidentielle américaine de 2016 avec pour but principal de vulgariser les idéaux transhumanistes auprès de la population américaine.

Le transhumanisme constitue finalement une véritable économie de l’espoir autour de laquelle gravitent les plus importantes firmes économiques telles que Google ou PayPal ainsi qu’une multitude de start-ups. À travers ses investissements importants dans les sciences du vivant, Google apparaît en effet ces dernières années comme l’un des plus puissants fers de lance du transhumanisme. Ses fondateurs, Sergey Brin et Larry Page, militent ouvertement en faveur d’une augmentation techno-scientifique de l’être humain et orientent les activités du groupe en ce sens (le complexe Alphabet regroupe notamment l’ensemble des activités de Google qui ne concernent pas directement les services liés à Internet). Fondée le 18 septembre 2013, la filiale Calico (California Life Company) consacre dans cette perspective ses recherches à la lutte contre le vieillissement et la mort, tandis que, de son côté, la société 23andMe propose à ses clients un séquençage génétique personnalisé afin de prévenir d’éventuelles pathologies.

Autre figure économique importante du transhumanisme : Elon Musk, entrepreneur et p.-d.g. des entreprises SpaceX et Tesla Motors. Fervent défenseur des idéaux transhumanistes, Musk fonde, en 2016, la start-up Neuralink avec pour objectif affiché de fusionner le cerveau humain et l’intelligence artificielle. Le transhumanisme nourrit ainsi, en définitive, tout un biocapitalisme de l’amélioration et de la spéculation qui constitue une composante centrale du mouvement.

Des Idées en revues

Chaque mardi, Le Devoir offre un espace aux artisans d’un périodique. Cette semaine, nous vous proposons un texte paru dans la revue Relations, septembre-octobre 2017, no 792.

Des commentaires ou des suggestions pour des Idées en revues ? Écrivez à rdutrisac@ledevoir.com.



À voir en vidéo