Pour un réseau collégial cohérent

Les diplômes collégiaux doivent répondre aux besoins de main-d’oeuvre des entreprises, mais ils doivent être pertinents au-delà des transformations du marché de l’emploi.
Photo: Michaël Monnier Le Devoir Les diplômes collégiaux doivent répondre aux besoins de main-d’oeuvre des entreprises, mais ils doivent être pertinents au-delà des transformations du marché de l’emploi.

Le 50e anniversaire de la création des cégeps suscite un large intérêt dans les médias. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Toutefois, certains de ces articles soulignent l’importance d’accélérer les processus de révision des formations initiales collégiales pour accroître leur capacité de s’adapter rapidement à l’évolution de la société et des technologies. À la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), nous sommes conscients que les avancées du numérique pourraient générer des transformations du marché de l’emploi et qu’il faut s’y préparer. Si nous partageons le constat selon lequel les processus actuels de révision des programmes sont trop longs pour faciliter cette adaptation, il est important d’intervenir sur la question pour recentrer le débat autour de la cohérence des formations collégiales et du réseau des cégeps.

D’abord, il est primordial que le ministère de l’Enseignement supérieur joue pleinement son rôle de coordonner les diplômes nationaux pour en assurer la valeur équivalente dans toutes les régions et les établissements collégiaux, et pour rendre les travailleurs moins vulnérables d’une entreprise à l’autre et d’une région à l’autre. Les travailleurs diplômés des cégeps seront pour une grande partie appelés à changer de fonction ou d’emploi en cours de carrière dans un monde en transformation. Le taux de survie des petites et moyennes entreprises, qui représentent la vaste majorité des établissements commerciaux, est d’à peine 50 %, ce qui indique clairement l’importance de former des travailleurs qui disposent de compétences larges leur permettant de s’adapter aux changements du marché du travail, plutôt qu’en fonction de compétences étroites et difficilement transférables liées à des contraintes immédiates et ponctuelles des entreprises.

Des acteurs incontournables

 

Certains proposent, pour raccourcir les délais de révision des programmes, de décentraliser et de donner plus d’autonomie aux collèges. Nous croyons que c’est une fausse solution. Il faut rappeler que les collèges disposent déjà de flexibilité en matière de formation continue. Nous constatons que cette latitude a donné des résultats peu probants : en effet, à l’heure actuelle, le même titre d’attestation d’études collégiales (AEC) est décerné à des programmes dont le nombre d’heures varie de 135 à plus de 2000 heures d’un établissement à l’autre. Loin de favoriser l’harmonie entre la formation et le marché du travail, la flexibilité a pour effet de rendre difficile l’identification des fonctions de travail auxquelles correspondent ces formations, et les employeurs ne sont plus en mesure d’évaluer la valeur de la formation.

Les diplômes collégiaux doivent bien sûr répondre aux besoins de main-d’oeuvre des entreprises, mais ils doivent être pertinents au-delà des transformations du marché de l’emploi. Autrement dit, la formation doit être suffisamment large pour permettre aux finissants de s’adapter aux changements, plutôt que d’être confinés à des fonctions de travail restreintes résultant d’une formation calquée sur des changements immédiats sans projection à plus long terme.

C’est dans cette perspective, celle d’assurer la préservation d’un réseau collégial offrant des formations et un diplôme national qualifiants, qu’il est nécessaire de trouver des solutions structurantes pour l’ensemble du réseau aux problèmes que posent les délais des processus actuels de révision des programmes. Les enseignants des cégeps, forts de leur expertise et d’une connaissance de terrain des milieux de travail, sont des acteurs incontournables de cette réflexion.

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