PQ-QS, un choc des cultures internes

Les divergences entre QS et le PQ sont ancrées dans des cultures politiques qui s’opposent et qui alimentent une certaine incompréhension, estiment les auteurs. 
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Les divergences entre QS et le PQ sont ancrées dans des cultures politiques qui s’opposent et qui alimentent une certaine incompréhension, estiment les auteurs. 

Déception, méfiance, insultes, accusations et procès d’intentions ont dominé les échanges des derniers jours entre les militants des deux formations partisanes. Manifestant tour à tour incompréhension et colère, les dirigeants du Parti québécois sont également passés par différentes émotions, alors que ceux de Québec solidaire ont plutôt insisté sur le caractère démocratique de leurs instances.

La sociologie politique peut nous aider à comprendre les difficultés qu’ont eues ces deux formations à se comprendre et à s’entendre. Au-delà des enjeux partisans, des idéologies et de la stratégie partisane, ne serions-nous pas en présence d’un choc des cultures organisationnelles ? Cette incompréhension mutuelle pourrait-elle découler de règles de fonctionnement interne spécifiques à chaque formation politique et de l’asymétrie quant à leur niveau respectif de décentralisation ?

Dès son congrès de fondation en 1968, le PQ a vécu des débats internes afin de déterminer le niveau de sa démocratie interne. Les « électoralistes », proches de René Lévesque, souhaitaient une structure plus souple, alors que les « participationnistes », dont André Larocque, préféraient une structure décentralisée à l’image du Parti communiste yougoslave. À l’époque, ce sont les « participationnistes » qui l’ont emporté.

Encore aujourd’hui, le PQ demeure un parti plus décentralisé que le Parti libéral du Québec ou la Coalition avenir Québec. Avec le temps, il a cependant subi un processus de « dédémocratisation » conduisant à une centralisation plus importante des pouvoirs vers le chef. L’initiative de consultation menée par Paul St-Pierre Plamondon vise d’ailleurs à rétablir un certain équilibre institutionnel et à redonner davantage de pouvoir aux militants.

Résolument plus à gauche de l’échiquier politique, QS a réuni, comme le PQ, différentes tendances et différentes organisations lors de son congrès de fondation. Les solidaires ont également opté pour une structure organisationnelle décentralisée d’où émanent deux porte-parole. Cela implique une culture organisationnelle qui ne repose pas sur une hiérarchie classique impliquant un chef formel. Rappelons que la dernière élection de ses co-porte-parole échappait aux dispositions de la Loi électorale québécoise en matière d’encadrement d’une course à la chefferie.

Une analyse plus fine serait utile pour mesurer l’écart culturel entre les dirigeants des deux formations politiques. Les dirigeants du PQ se sont d’ailleurs attaqués à la structure de QS en comparant son comité de direction à un « Politburo soviétique » et en s’interrogeant sur l’absence d’un chef réel. Comme si le fonctionnement de QS (collégialité dans la gouvernance, poids plus important des membres dans la conduite des affaires du parti, co-porte-parole) était d’emblée suspect, parce que distinct.

N’oublions pas que si la trajectoire institutionnelle du PQ depuis sa fondation l’a conduit vers une plus grande centralisation, celle de QS s’apparente davantage à celle d’une organisation de la société civile, comme c’est généralement le cas pour un parti qui en est toujours à l’étape de sa genèse institutionnelle.

Les divergences entre QS et le PQ ne sont pas que stratégiques ou idéologiques. Elles sont ancrées dans des cultures politiques qui s’opposent et qui alimentent une certaine incompréhension.

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