COP22: un déficit de cohérence?

«On le voit, les solutions pour lutter contre le réchauffement climatique sont là. Pourtant, la COP22 a accouché d’une souris», écrivent les auteurs.
Photo: Fadel Senna Agence France-Presse «On le voit, les solutions pour lutter contre le réchauffement climatique sont là. Pourtant, la COP22 a accouché d’une souris», écrivent les auteurs.

L'accord de Paris représente un jalon crucial dans la lutte contre le réchauffement climatique, avec notamment une cible commune de limiter le réchauffement de la planète à moins de 2 °C d’ici 2030. Cette cible est essentielle afin de préserver nos richesses naturelles collectives et nos sources d’eau potable. Mais maintenant que nous avons fixé une cible, il est urgent de se doter d’un plan d’action et d’outils afin d’atteindre l’objectif visé. Puisque la pollution ne connaît aucune frontière, ce plan d’action doit être respecté avec détermination par chacun des États signataires. Or, à l’heure actuelle, aucun mécanisme contraignant n’est prévu pour atteindre cette cible. Sans instruments internationaux, il sera difficile voire impossible d’atteindre la cible et les objectifs généraux de l’Accord.

La COP22 qui vient de se clore à Marrakech devait représenter l’occasion de mettre en place ces instruments contraignants absolument essentiels. Ce sera donc pour la COP23 ! Nous sommes d’avis que ces instruments devraient notamment inclure des pénalités pour les États en cas de défaut et une reddition de comptes annuelle, alors que l’Accord actuel prévoit que les États devront faire rapport seulement en… 2023. Si nous prenons vraiment au sérieux les objectifs que nous nous sommes fixés à Paris, il nous faut un véritable « plan de remise en forme » pour notre planète avec des suivis réguliers et systématiques.

Les solutions existent pourtant

 

Malgré l’avènement d’un nouveau président américain climatosceptique, la volonté politique internationale ne semble pas vouloir s’abattre, même si celle-ci a pris du plomb dans l’aile.

De plus, ces solutions existent et sont connues des experts et des politiciens. Parmi celles-ci, la mise en place d’une taxe sur le carbone et d’un marché du carbone, qui existent déjà sous certaines formes au Canada et dans la plupart des pays signataires, semble rallier de plus en plus d’États. Toutefois, une fois ces structures en place, le défi est maintenant de fixer un « prix pour polluer » qui ait un véritable effet incitatif sur les individus, les gouvernements et les entreprises. Afin de changer certaines de nos habitudes de vie, de consommation et de production tout en favorisant la croissance durable de notre économie, nos politiques fiscales doivent être revues de fond en comble. L’établissement d’une taxe en soi ne suffit pas. Nous devons trouver des solutions alternatives abordables.

Ainsi, en matière de transport, une des solutions possibles serait l’imposition d’une taxe sur le carbone d’environ 150 $ par tonne de CO2, graduellement mise en oeuvre, qui serait ultimement transférée aux conducteurs à la pompe. On se doute bien qu’une telle hausse de 35 cents le litre d’essence risquerait de trouver peu d’appui chez les citoyens, si elle n’est pas accompagnée d’autres mesures pour alléger le fardeau fiscal des contribuables (notamment les bas revenus) et pour encourager les changements de comportement.

En outre, nous pensons que les gouvernements devraient soutenir activement les acteurs de l’économie de partage, qui offrent de multiples solutions innovantes pour changer nos rapports à la mobilité, notamment les services de covoiturage et de voitures en libre-service. Il est par exemple difficile de comprendre pourquoi les autos en partage, comme la Smart2Go, connaissent des zones de restriction à Montréal. Au lieu de combattre ces services novateurs, on devrait plutôt chercher à étendre leur disponibilité à l’ensemble de la région métropolitaine, de Saint-Jérôme à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Les gouvernements doivent également poursuivre leurs investissements dans le transport collectif, en collaboration avec les investisseurs privés et institutionnels. Dans ce contexte, le nouveau projet de transport métropolitain de la Caisse de dépôt est un pas dans la bonne direction.

 

De plus, combiné à une offre de transport durable élargie, il serait tout à fait possible d’offrir des baisses d’impôts équivalentes aux revenus tirés de la taxe sur le carbone.

Enfin, nous pensons qu’il est temps de fermer définitivement la porte aux nouveaux projets de pipelines (comme Énergie Est ou Kinder Morgan), qui augmenteraient de façon significative les émissions polluantes du Canada.

On le voit, les solutions pour lutter contre le réchauffement climatique sont là. Pourtant, la COP22 a accouché d’une souris. Sommes-nous simplement en face d’un déficit de cohérence ?

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