Un pari risqué pour les épargnants et les contribuables

La participation de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) au projet de cimenterie à Port-Daniel est inquiétante. Les millions affluent, mais la valeur de notre investissement semble décroître.
En effet, la Caisse de dépôt a injecté 125 millions supplémentaires dans le projet de Ciment McInnis, qui s’élève maintenant à 1,5 milliard de dollars. Comment ne pas grincer des dents lorsqu’on apprend qu’un dépassement de coûts de 40 % est assumé en partie par le public ?
Les instigateurs du projet, Beaudier, ne débourseront pas un sou de plus, et ce, malgré un dépassement de coûts majeur. En fin de compte, Beaudier aura investi uniquement 150 millions sur 1,5 milliard.
Revenons à la valeur de notre investissement. Au départ, la CDPQ possédait 45 % de Ciment McInnis avec un investissement de 100 millions. Entre-temps, avec l’annonce de l’explosion des coûts, la part de la CDPQ a été bonifiée de 40 millions en raison de l’entente d’investissement initiale. Au total, l’investissement de la CDPQ s’élève à 265 millions et nous avons maintenant seulement 55 % de Ciment McInnis.
La valeur de notre investissement a-t-elle fondu sous le soleil d’été ? Pourquoi ne pas attribuer une part égale pour chaque dollar injecté dans le projet ? Il est difficile de prévoir la rentabilité de l’entreprise, certes, mais il est impératif que notre investissement soit considéré avec justesse. Pourquoi notre nombre de sièges au conseil d’administration augmente-t-il alors que proportionnellement chaque dollar investi vaut maintenant moins ? Est-ce que l’argent des épargnants vaut moins que celui du privé ? S’il y avait une chance pour que nous rentabilisions notre investissement, il faudrait posséder notre juste part du gâteau, point final.
Tentant de se faire rassurante, la CDPQ mentionnait la semaine dernière qu’« avec l’équipe de direction qui est là maintenant, nous avons toute l’expertise opérationnelle pour remettre le projet sur les rails ». En quoi cette réorganisation de l’équipe de direction assurera-t-elle la rentabilité de la cimenterie ? Avons-nous investi dans le projet sans avoir évalué la compétence des gestionnaires ? Les épargnants s’attendent, non seulement à ce que la cimenterie soit opérationnelle après y avoir investi autant, mais à ce qu’elle soit rentable lorsque la production y débutera.
Il est difficile d’avoir confiance en ce projet lorsque M. Sabia mentionne qu’il y aura potentiellement un nouveau partenaire stratégique qui ouvrira des chemins de développement du projet. Des détails, s’il vous plaît ! Expliquez-nous en quoi la première équipe de gestion a échoué et pourquoi la nouvelle réussira. Il est particulièrement important d’être rassurés lorsqu’on constate que le rendement de la Caisse des six derniers mois est de 2 %.
Le degré de risque du projet nous semble très élevé pour pallier une année difficile pour les épargnants. La diversification des produits d’investissement est selon nous une bonne stratégie pour contrer la volatilité des marchés. Cependant, lorsqu’on analyse les deux dernières annonces d’investissement de la Caisse au Québec, McInnis et le train électrique à Montréal, on est perplexe quant à la rentabilité de ces projets à court terme. Est-ce vraiment ainsi que nous irons chercher un taux de croissance du bas de laine des Québécois de plus de 10 % ?
N’oublions pas que la mission de la Caisse est de faire fructifier les acquis des épargnants et non d’épauler des projets industriels risqués. Les preuves restent à faire, car, malheureusement, l’histoire récente des investissements dans les infrastructures au Québec ne nous permet pas d’être rassurés.